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Bertrand Betsch révèle le vide en nous et ça vaut le coup

Bertrand Betsch révèle le vide en nous et ça vaut le coup

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Je ne suis pas la première à chroniquer « Tout Doux », le dernier album de Bertrand Betsch, car ils sont nombreux à en avoir fait des éloges, je veux bien être la dernière mais je ne peux me taire. Le bien que l’on pense ne va pas de soi, il doit se dire. D’aucuns déclarent que « Tout doux » est le meilleur album de B/B, pour moi il est tout simplement aussi bon que les autres. Ce qui doit surprendre, c’est sans doute cette obstination à ne pas renoncer à la beauté. Il en est encore là, et nous ? Il n’a pas peur de vieillir car la vieillesse est un leurre quand on aime la beauté.

Il chante, malgré l’indifférence d’un monde trop plein de lui-même. Celui qui a toujours autant de mal à mentir et par conséquent qui a toujours du mal à être vivant nous révèle le vide en nous. C’est la raison pour laquelle il chante. Il pousse plus loin son obstination à remplir notre silence d’une berceuse. Il sera toujours là à accompagner notre vie solitaire, le vide en nous. C’est la vérité qu’il nous livre. Car derrière la berceuse pop de ses chansons, il y a cette vérité qui fait souffrir comme un amour, qui nous dérange comme la mort. On a bien envie d’écouter la berceuse, on n’a moins envie d’entendre la vérité.

Sa voix s’attarde sur les syllabes, pour nous inviter à tendre l’oreille. Il s’étire, s’efforce pour nous toucher, nous effleurer sans jamais s’imposer. Sa voix toujours voilée parce qu’il faut être pudique quand on manie la vérité. Comme à Marseille au Poste à Galène en 2004, nous étions moins de dix à laisser le chanteur remplir notre vide, tandis qu’une bande de potes de celui qui lui succéderait éructait bruyamment. Il faudrait savoir sortir du bavardage, du brouhaha du monde pour retrouver la musique originelle qui est en nous. B/B disait dans un blues fataliste « Encore un mot de vous et je vous tords le cou. » tandis que le bon peuple trinquait à l’open bar, « rotait tout seul dans sa mangeoire », sans se rendre compte de la présence de la vérité nue sur scène. La beauté n’est pas pour tous, c’est vrai, elle n’était que pour moi ce soir-là, pour mon cœur et mon cerveau. L’image de la voix qui se voile dans ce vacarme symbolise B/B tout comme cette voix qui criait dans le désert était Jean le Baptiste.

La musique de B/B révèle tout doucement en nous, en posant ses mots pesés, par touche, syllabes après syllabes, notre être intérieur. B/B parle tout doucement à l’être intérieur, à l’être caché au fond de nous, à l’âme discrète. Secrète. Penser, écrire, lire,… prier, procède de la vie intérieure. C’est en chanson qu’il nous ré-apprivoise, qu’il refait de nous des personnes humaines, forcément inadaptées, prêtes à douter d’elles-mêmes pour ne plus jamais faire semblant.

Mais, nous l’avons dit, la beauté n’est pas pour tous, parce c’est trop dur, parce que la beauté tue en douce. Pas la peine de revenir écouter si vous voulez autre chose. Ne vous fatiguez pas à écouter B/ B si vous voulez continuer de faire semblant. Que de temps perdu ! Circulez, il n’y a rien à voir, il vous rend tout : votre liberté.

La vérité livrée est le passage obligé avant la petite espérance qui se livre dans une petite leçon de philosophie : ça valait le coup quand même, ça valait la peine. On sait qu’il va falloir passer par la mauvaise nouvelle avant que l’espérance du pauvre nous soit livrée. B/B a une bonne et une mauvaise nouvelle à nous annoncer et il nous donne les deux de concert enrobées de pop et de berceuse. Et quand le rythme s’emballe un peu dans une musette exotique et presque créole, c’est parce qu’il nous faut un peu de vin, un peu d’ivresse pour célébrer cette vie là. Ça vaut la peine, buvons un coup. On a même envie de danser pieds nus alors qu’il nous annonce la fin prochaine de la fête. Il chante au futur… Tu verras.  Demain reviendra avec ou sans moi. Il y a bien de quoi emprunter deux vers à Barbara pour une chanson et conclure ce papier : dis quand reviendras-tu, dis au moins le sais-tu ?


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