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De Gaulle et les siens

De Gaulle et les siens

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L’historien et essayiste Jacques Julliard nous offre un petit opuscule, intitulé De Gaulle et les siens, sous-titré Bernanos, Claudel, Mauriac, Péguy. Il affirme que De Gaulle détestait les intellectuels, jugés trop décadentistes, et vénérait les écrivains. Bernanos, Claudel, Mauriac, Péguy se confondent avec les valeurs nationales et le catholicisme qui imprègne la conscience -et l’inconscient- de la nation. Deux choses auxquelles se relie le Général.

En 1958, deux ans après la mort de Bernanos, Mauriac écrit dans son Bloc-notes : « Ce Bernanos éternel, j’ai peine à le concevoir désintéressé du temps dont la mort l’a délivré, et où l’histoire s’inscrit du peuple de France qu’il a tant aimé. Mais ce peuple, le voit-il toujours du même regard ? Ce qui revient à se demander si la France est réellement telle que Bernanos et Péguy l’ont vue, telle que De Gaulle exige qu’elle soit. Ou est-ce leur amour qui a inventé, recréé (comme fait de son objet tout amour) une France à sa mesure ? » Ce qui unit De Gaulle à Bernanos, c’est une certaine idée de la France, nous explique Julliard. Mieux, ils sont tous deux pénétrés de l’idée que « la France et le monde ne seront sauvés que par quelques-uns. Et même, au bout du compte, car ils sont chrétiens, par Quelqu’un… »

De Gaulle confie à Malraux : « Je lis Eschyle, Shakespeare, les Mémoires d’outre-tombe, un peu Claudel et ce qu’on m’envoie. » Si l’hommage est tempéré, il considère néanmoins que Paul Claudel se situe au firmament de la littérature universelle, au-delà des accidents de l’Histoire. L’auteur du Soulier de satin et des Cinq grandes Odes, dans une lettre du 5 octobre 1944, prend la défense des catholiques : « Vous êtes catholique, ô mon Général, si vous pouviez faire quelque chose pour ce lamentable troupeau, guidé par des pasteurs tellement insuffisants ! […] Trop longtemps, il est juste aussi de dire, les catholiques ont été traités en France en minorité obtuse, dangereuse et coupable… » A la mort du poète, le Général a ces mots justes, dans une lettre de condoléances adressée à Madame Claudel : « En retirant de ce monde le génie de Paul Claudel, Dieu y a laissé son œuvre, et je crois que c’est pour toujours. »

Le Bloc-notes de François Mauriac, hébergé par Le Figaro Littéraire, sera pour le Président de la Vème République le plus illustre et le plus constant des soutiens. Mauriac a cette formule surprenante : « Chrétien, je me suis senti, quant à moi, confirmé dans ma certitude : Charles de Gaulle n’est pas l’homme du destin, il est l’homme de la Grâce. » Une grâce qu’il faut entendre au sens d’un don de Dieu, d’une vocation même. La forme sacrée du destin. Julliard explicite : « Cette vision, qui reliait directement, grâce au sacre de Reims, les rois de France à Dieu lui-même n’était pas étrangère à l’idée que Charles de Gaulle se faisait lui-même de sa mission. Dans la querelle des deux glaives qui traverse le Moyen-Âge, le glaive temporel n’a pas besoin de l’onction du glaive spirituel. Son pouvoir, et sa Grâce, il la tient directement de Dieu. » Dans le premier tome de ses Mémoires d’espoir, le Général dira son immense estime à l’égard de l’auteur de Thérèse Desqueyroux : « François Mauriac, dont son attachement à la France, sa compréhension de l’Histoire, son appréciation patriotique et esthétique de la grandeur, son art de pénétrer et de peindre les ressorts des passions humaines font un observateur incomparable de notre temps. »

« Aucun écrivain ne m’a autant marqué. Dans les années qui ont précédé la guerre, je lisais tout ce que Charles Péguy écrivait pendant mon adolescence, et quand j’étais à Saint-Cyr, puis jeune officier, je me sentais proche de lui. Ce qui m’intéressait chez lui c’était son instinct. Pas seulement son instinct national. Il sentait les choses exactement comme je les sentais. » raconte De Gaulle à Peyrefitte. Le Général pense, comme l’écrivain mort en 1914, qu’un chef d’Etat a des comptes à rendre au passé lui-même, c’est-à-dire à son histoire. En son for intérieur, De Gaulle sait qu’il incarne une légitimité de deux mille ans. Il fait sienne la célèbre phrase de Péguy : « La République une et indivisible, c’est notre royaume de France. » Il se range encore du côté de l’auteur du Mystère des Sains innocents qui croit dur comme fer à la vocation providentielle de la France : « C’est pour cela, dit Dieu, que nous aimons tant ces Français ; et que nous les aimons entre tous uniquement ; et qu’ils seront toujours mes fils aîné ; ils ont la liberté dans le sang […] C’est embêtant, dit Dieu. Quand il n’y aura plus ces Français, il y a des choses que je fais, il n’y aura plus personne pour les comprendre. »


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