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Le sexe de l’État

Le sexe de l’État

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Lors de la Manif pour Tous du 13 janvier 2013, certains calicots proclamaient avec impertinence « On veut du sexe, pas du genre ! ». Il est singulier que la première de ces catégories soit si peu appliquée par l’analyse à l’État lui-même, coupable de la substitution du second, et ce bien avant l’élection de François Hollande.

La liquidation du paternalisme forme la trame de la modernité historique et politique. Ainsi le pape (dont le nom, grec, signifie « père ») est-il symboliquement déchu par la Réformation dès le XVIème siècle puis contraint par corps (Pie VII). Le régicide, catégorie du parricide, abat Charles Ier, Louis XVI, Nicolas II. La figure du général ne sort pas indemne des mutineries de 1917 (revoyons le déplaisant film Paths of Glory, de Stanley Kubrick, en ce centenaire), et le 5ème couplet de L’Internationale s’achève ainsi : « Ils sauront bientôt que nos balles / Sont pour nos propres généraux. » Le patron, lui (le nom en est-il suffisamment explicite ?), est progressivement supplanté par l’actionnaire, et le paternalisme des maîtres de forge précède la finance dérég(u)lée. Citons encore la marginalisation virile chez l’époux, qui partage deux bulletins de vote avec Madame depuis 1946 ; chez le père d’une famille dont il n’est plus le « chef » depuis Valéry Giscard ; chez le jeune homme, privé du service militaire depuis Jacques Chirac et astreint au port de la jupe l’an dernier.

Ainsi donc, la maternité, horizontale et douillette, émolliente et chaude, a revêtu la civilisation du bleu pastel de sa couverture ouatée. Ce sont d’abord les mamelles gonflées de lait du système social qui succède à l’Occupation. Il est « bienfaisant et doux », prévient les besoins et comble les désirs, récompense le travailleur et secourt l’imprudent. Il sera toujours là, on le saura toujours là. La féminisation est aussi celle de nos enseignants, nos fonctionnaires, nos employés, nos juges, nos politiques, nos militaires même. Toute autorité paraît un peu suspecte après Vichy. Nul ne prétend plus faire l’offrande de soi au pays. Ce sont les électeurs qui se donnent à un chef de rencontre. Et le pouvoir se drape de tailleurs-pantalons, d’étoles gris perle, de cheveux longs, de robes à fleurs. Ségolène Royal est autoritaire, Martine Aubry tenace, Cécile Duflot bien brave. Et Anne Hidalgo se veut « une bonne maire ». Les mœurs se féminisent : les jeunes gens sont appelés à faire ressortir leur part de féminité, qui désigne tout avantage et tout agrément social : écoute, sensibilité, délicatesse, correction des propos, recherche vestimentaire, soin corporel, etc. La femme, elle, se virilise dangereusement ; via le travail intensif, la société de loisirs, la pilule.

L’État n’est pas « homosexuel », contrairement à ce qu’ont pu croire certains des plus acharnés contre la loi Taubira. Mais anciennement travesti, il appelle moins la revirilisation que la sexuation. Comblons ses béances (« trou de la Sécu’ », dette publique, territoires perdus), et rendons-lui ses attributs : armée, justice, monnaie. Restaurons son autorité, refaisons ses forces, abandonnons son discours châtré, pardon châtié. Va pour l’État-Maman, mais vive l’État-Papa !


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