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Intégrité versus corruption ambiante

Intégrité versus corruption ambiante

Par  

Blacke est un policier comme on les aime dans le genre. Dans A minuit, les chiens cessent d’aboyer, loin des stéréotypes, Michaël Moslonka a dressé le portrait de son héros. Seul dans son appartement, il ressasse fréquemment l’enquête en cours et les chiens du voisinage l’empêchent de trouver le sommeil : « Il enfile son pantalon de la veille, son maillot de la veille, son pull de la veille. Il y ajoute son blouson. Voilà cinq ans qu’il ne le quitte jamais. Qui pourrait croire qu’une veste fabriquée par des enfants chinois puisse tenir aussi longtemps ? Personne. La sienne doit être une exception. Seuls les coudes sont élimés. Les clébards, eux aussi, ils doivent être made in China. Ils sont omniprésents, infatigables. Insupportables. »

Pour supporter l’insomnie, Blacke se rend au bar voisin : « Le Joker est un bar enfumé malgré la loi. Ici, l’interdiction de fumer dans les lieux publics, on s’assoit dessus ». Là, les préjugés ont peu de chance, la loi commune est le tabagisme ambiant. « Les habitués du Joker sont une poignée. Tous rougeauds, les pifs énormes, leurs yeux bovins rendus brillants par le trop-plein d’alcool et la ferveur des débats populistes. Il y a une dame avec eux. Petite, grasse. Blonde. Elle s’empiffre de cacahuètes et bavarde en mâchant. » Chacun dans son rôle, ils se supportent sans vraiment s’insupporter.

Puis, un cadavre découvert sur le parking du supermarché change les habitudes, les rites, les réflexions, aussi. « La victime : cheveux rasés, yeux bruns, peau blanche. Son âge ? Dans la trentaine, à première vue. Le capitaine parierait sa chemise que le macchabée a 32 ans. Les yeux sont grands ouverts, sûrement sur son meurtrier. Celui-ci a déguerpi depuis belle lurette. Ou pas. Blacke en profite : des renforts sont venus de Marles-les-mines, la commune voisine. Il envoie donc une patrouille à pied et deux voitures ratisser les environs. Quand on peut jouer aux cowboys et aux indiens, il serait dommage de s’en priver. De toute manière, il ne croit pas qu’ils appréhenderont un suspect. Il en parierait son pantalon. On ne largue pas un cadavre comme ça, sans prévoir ses arrières. Car, à première vue, le macchabée ne vient pas d’ici. » L’allure de néonazi n’échappe pas à Blacke. Mais, de là à abandonner la chasse au meurtrier car il aurait rendu service à la société, il y a un pas que Blacke ne franchira jamais pas plus que sa coéquipière, la lieutenante Laribi qui le seconde de son mieux dans cette épreuve terrifiante qu’est la confrontation à un premier corps trucidé. Blacke, fait ce qu’il doit : son métier.

Dans ce polar, Moslonka réussit une critique cinglante de notre société tout en gardant une écriture digne qui fait honneur aux lacunes des uns et des autres tout en respectant leur valeur humaine. Un vrai tour de force.


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