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1900 : un accès au savoir

1900 : un accès au savoir

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A l'instar des manifestations précédentes, l'Exposition Universelle de 1900 présente tout ce qui se fait de plus aboutis en terme d'avancées technologiques, d'arts et d'artisanats, sous de vastes halls ou au cœur des Pavillons des Nations. Les innovations industrielles ne sont pas en reste et sont exposées dans des Palais situés sur le Champs de Mars. L'ensemble des palais du Champ de Mars représente une surface d'environ 20 hectares couverts et en partie à deux étages, et se présente sous forme de fer à cheval rectangulaire. De part et d’autre du Palais de l’Electricité se présentent successivement, à droite, les Palais des Industries chimiques, du Génie civil (construit par Jacques Hermant ; 1855-1930 ; architecte français et  pionnier pour l'utilisation du béton armé dans la construction des bâtiments) et des Lettres, Sciences et Arts (dû à Louis Sortais ; 1860-1911), et à gauche, les Palais de la Mécanique, des Fils et Tissus (construit par Victor-Auguste Blavette ; 1850-1933), et enfin celui des Mines (dû à Marcelin Varcollier ; 1829-1895). Tous ces palais sont livrés vides aux jurys d’installation, qui ont eu toute liberté pour l’agencement des expositions. Chaque classe française eut à l’honneur de présenter ses produits dans un décor artistique dont le souci avait été moindre aux Expositions précédentes.

Le développement industriel et les nouvelles technologies participent à la diffusion des sciences auprès du grand public. Bâtie autour de l’idée de progrès, l’Exposition universelle de 1900 veut vanter les mérites de l’électricité. Pour démontrer toute l’importante et la grandeur de cette formidable découverte, le Palais de l’Électricité est alors érigé. Œuvre d'Eugène Hénard (1849-1923), architecte et théoricien connu pour ses projets de transformation de Paris, le palais abrite dans son hall de fer et de verre diverses applications de l'électricité. Au sommet se dresse l'image même de la déesse, debout sur un char attelé d'hippogriffes et auréolée tout entière d'un soleil de cristal. Le gigantesque château d'eau, de l'architecte Edmond Paulin (1848-1915), fait office de façade au palais de l’électricité. Il s'agit d'un étonnant décor découpé et aérien : « un diadème, un éventail ouvert, la queue d'un paon faisant la roue ». L'eau jaillit d'une immense grotte, à laquelle est agrafée une série de vasques superposées, où se brise une nappe d'eau de 3o mètres de hauteur et de 10 mètres de largeur au milieu de laquelle émerge une allégorie (haute de plus de six mètres), représentant « l'Humanité conduite par le Progrès, s'avançant vers l'Avenir ». La quantité d'eau débitée est de 1900 litres à la seconde, soit près de 4 millions et demi de litres par heure ; elle est fournie par l'eau de la Seine refoulée au moyen de machines installées sur le quai d'Orsay. A droite et à gauche s'allongent deux galeries, que terminent des rotondes, surmontées de coupoles. La nuit, cet ensemble scintille de milliers de feux multicolores.

Derrière ce décor de rêve est bâtie une usine ; le contraste est saisissant. De chaque côté de l'ancienne Galerie de Trente mètres s'étendent deux cours couvertes, de 117 mètres de long sur 40 mètres de large, où, entre les bases énormes de cheminées de 80 mètres de hauteur, s'aligne une armée de chaudières : ce sont les chambres de chauffe. Là, jour et nuit, dans un sourd bourdonnement, s'élabore la force mystérieuse que de minces fils métalliques répandent partout sous forme de mouvement et de lumière. Un chemin de fer spécial apporte constamment du combustible qu'on enfourne sous les chaudières où, chaque heure, 200 000 litres d'eau se transforment en vapeur. Cette vapeur conduite au rez-de-chaussée du Palais, y actionne des moteurs accouplés à de puissantes dynamos, qui produisent un courant d'une force de 40 000 chevaux. Cette énergie est employée à l’éclairage général, à la transmission de la force motrice et au service des ascenseurs, elle participe aussi à l’illumination des abords du Trocadéro et de l’École Militaire, des ponts d’Iéna et de la Concorde. Cette usine sert également à alimenter les autres pavillons en électricité. Dans l'Annuaire de l'Exposition de 1900, on peut d'ailleurs lire : « Que le palais de l'Electricité vienne, pour une cause ou pour une autre, à s'arrêter et, toute l'Exposition s'arrête avec lui […]. Dans le palais de l'Electricité se fabrique, en effet, toute l'énergie nécessaire à l'éclairage et à la marche des organes divers de l'Exposition ».

Grâce au Palais de l’électricité trois pôles de lumière attirent les visiteurs : la Porte monumentale, le Palais de verre et le Palais de l'électricité lui-même. L'Exposition dispose de cent trente-six guichets d'entrée, mais c'est par la Porte monumentale de René Binet, place de la Concorde, que la foule afflue, attirée par le puissant éclairage de ses trois grands arcs et de sa coupole. Quant au Palais de verre de l'architecte Joseph Ponsin, aussi appelé Palais lumineux, édifié entièrement en verre et en fer présente une architecture moderne dont le spectacle majeur provient des 12 000 lampes qui, habilement déposées, l'éclaire. Qu'il soit vu de l'extérieur ou de l'intérieur, il apparaît complètement lumineux sans que nulle part un seul point de feu y soit visible. Les marches, les contremarches et les rampes des deux escaliers qui donnent accès au Palais deviennent phosphorescentes ; les colonnes semblent taillées dans des pierres précieuses douées de rayonnement nocturne ; les murs s'éclairent ; les toitures déploient dans les ténèbres de flamboyants contours ; enfin, au faîte du monument, sur un globe de feu qui paraît tourner dans les airs, se dresse la déesse de la Lumière brandissant deux flambeaux éblouissants. Pour autant, la figure la plus représentative de cette innovation est peut-être la statue allégorique de l’Electricité dressée au somment du Palais de l'électricité cachant un système de dynamo qui illumine le Champs de Mars à la nuit tombée. La nuit, les visiteurs se pressent en ces lieux pour admirer ce spectacle. Un visiteur témoigne : « Le soir, l'Electricité apparaît comme nimbée dans une éclatante robe de feu que drape autour d'elle le phare de 10 000 bougies (…) d'autres lampes ont été placées et le soir, lorsque l'édifice s'embrase, le jeu des lumières changeantes que l'on varie à volonté par un mécanisme ingénieux placé au-dessous augmente encore l'impression de la fantasmagorique féerie que donne ce ruissellement continu de gerbes de feu. »

Par ailleurs, le grand public peut aussi se familiariser avec les sciences au Palais de l’optique dans lequel le public peut découvrir l’une des pièces maîtresses de l’Exposition universelle de 1900 : la Grande lunette astronomique. Son histoire débute en juillet 1892 lorsque le projet de François Deloncle (1856-1922 ; homme politique français) est voté par la Chambre des Députés. Ce projet consiste à construire pour l’Exposition Universelle « un télescope géant, laissant loin derrière lui, par ses dimensions et son pouvoir grossissant, les plus célèbres instruments des observatoires des Deux Mondes ». L’objectif est de montrer sur grand écran la Lune comme si elle se trouvait à 48 km du spectateur, et non « la Lune à 1 mètre » comme cela se dit dans la presse. Abritée dans une galerie et soutenue par des piliers métalliques, la Grande Lunette étend horizontalement son tube gigantesque de 60 mètres de longueur, et d'un mètre et demi de diamètre. Les rayons de l'astre à observer sont réfléchis dans un sidérostat, ou miroir, de 2 mètres de diamètre, de 30 centimètres d'épaisseur, et pesant avec son armature environ 7.000 kilogrammes. Du côté du miroir, l’entrée de la lunette est fermée par deux objectifs ; l’un est astronomique, l’autre photographique. A l’autre extrémité de la lunette se trouve l’oculaire, monté sur roues, de façon à permettre la mise au foyer. Là, l'image est reçue environ 10.000 fois grossie sur un écran ; or, la lune 10.000 fois agrandie, c'est la lune à plus ou moins 80 kilomètres. La photographie va aider à la rapprocher davantage. Au lieu de recevoir l'image oculaire sur un écran, on peut, en effet, la recueillir sur une plaque sensible, en tirer une épreuve durable qu'on projette ensuite avec agrandissement ; on obtient ainsi une reproduction du disque lunaire couvrant 12 mètres. En un mot, on a l'illusion de voir l'astre à une distance de 48 kilomètres. A la fin de l’Exposition, la Grande lunette est démantelée puis mise aux enchères en 1909. Seuls le sidérostat et les lentilles qui la constituent sont préservés et exposés à l’Observatoire de Paris où nous pouvons toujours les admirer.

Autour de la galerie principale se groupent des salles affectées à l’exposition et aux démonstration de tout ce qui tient du domaine de l’optique. En effet, au nom de la vulgarisation, des spectacles d’une fantaisie grandiose sont proposés au public. Dans des dioramas sont reproduit des paysages lunaires ; un voyage imaginaire dans un astre ; ou encore la genèse de la Terre racontée en en vingt tableaux. A ces vues astronomiques est joint, dans d'autres salles, le spectacle de tous les miracles de la lumière. En effet, le public découvre la lumière froide, le miroir magique, les rayons X, les danseuses phosphorescentes, ou encore le Monde Invisible contenue dans une goutte d’eau. Enfin, le visiteur s'émerveille aussi en découvrant le Grand Kaléidoscope. Ce dernier attire près de 3 millions de visiteurs et reste encore aujourd'hui une des grandes animations du musée Grévin sous le nom du Palais des Mirages. Toutes les découvertes de la science optique, tous les prodiges des fêtes foraines sont réunis dans ce palais. En trois quarts d'heure, le visiteur traverse vingt-six salles et assiste à soixante spectacles différents tels qu’il pourrait le faire de nos jours à la Cité des Sciences.


1900 : petit Paris Express
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Visite virtuelle de l’Exposition Universelle de 1900
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1900 : Paris est une fête
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