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Fort Hood redécouvre le mal

Fort Hood redécouvre le mal

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Encore une fois, le monde, le notre, celui de l'Empire du bien, semble être tombé dans le travers de tout le monde il est beau tout le monde il est gentil, et de s'étonner niaisement, benoitement de l'existence du mal. Aux USA, Texas, Fort Hood, la plus grande base militaire des Etats-Unis, un soldat a ouvert le feu. Bilan : trois morts sans compter le criminel qui s’est suicidé. Si on n’en revient pas, c’est surtout qu’il s’agit d’une récidive. Les américains ne supportent pas de se rendre compte de ne pas avoir su tirer les leçons du passé. Il faut tout maîtriser, il faut tout comprendre. Déjà en 2009, le médecin psychiatre du camp, Nidal Hasan, converti à la cause islamiste, avait tué 13 personnes, record jamais égalé. Nidal Hasan a été condamné à mort l’été dernier. Suite à cet attentat de 2009, tout le monde avait tiré des leçons destinées à mieux démasquer les ennemis infiltrés, les esprits faibles et faillibles. Et patatra, mercredi 2 avril 2014, un soldat est entré dans un bâtiment de la base, a ouvert le feu avant de monter dans un véhicule puis a tiré à nouveau avec un pistolet semi-automatique Smith & Wesson de calibre 45, acheté récemment dans un magasin des environs. Il est ensuite ressorti du véhicule, a pénétré dans un autre bâtiment et a tiré à nouveau. Le suicide a eu lieu sur le parking alors que la police militaire arrivait quinze minutes après le début de la fusillade. 4 morts en tout donc et 16 blessés.

Ni fou, ni terroriste, simplement humain


Il faut trouver une explication, et l’administration et le monde médiatique n’en voient que deux, tout attachés qu’ils sont à leurs œillères : soit c’est un fou, soit c’est un terroriste. La piste terroriste ne semblant pas trop prendre, même si on prend soin de préciser que rien n’est exclu, c’est la piste psychiatrique qui va faire l’objet de commentaires de la part des autorités et des professionnels de l’info. « Nous ne connaissons pas ses motivations. Nous savons que ce soldat souffrait de problèmes mentaux », a déclaré le général Mark Milley commandant la base. On apprend aussitôt que le gars suivait un traitement pour dépression et « d'autres problèmes psychiatriques et psychologiques. » Le général précise cependant que le soldat meurtrier ayant œuvré en Irak n'avait pas été diagnostiqué à ce stade comme souffrant de stress post-traumatique. Il faut savourer l’exactitude des termes cliniques concernant la psychologie d’un « sujet ». Comme si le mal ne pouvait avoir comme origine qu'un dérèglement psychique ou une volonté géopolitique. Il n'y a rien de plus humain que le mal, rien de plus banal, de plus ontologique. C'est que le diable a une vie cachée en chacun de nous. C’est que nous en sommes dépositaires, nos nombrils en sont l’origine dans le monde. Personne donc n'a jamais ressenti en soi la possibilité du meurtre ? Sa nécessité ? Personne n'a jamais ressenti la possibilité du suicide, sa nécessité ? Le jeune soldat a fait la guerre en Irak, il a tué de façon légale et on voudrait qu’il soit fou pour le faire de façon illégale… Ce à quoi nous avons été confrontés est tout simplement un attentat contre l'espèce, contre la création, une pure réaction de la créature contre « tout ça », la manifestation d’une non-adhésion au monde. Un crime tout simplement.

Le problème réside bien sûr dans cette société malade qui n’a jamais su reconnaître la manifestation de Dieu dans le monde et qui aujourd'hui n’attend même plus d'épiphanie, ne guettent plus rien. Rien d'autre que son propre reflet dans le miroir de ses smartphones, se faisant selfies à la chaîne, nouvelle technique de noyade pour les narcisses modernes. Comment voulez-vous que le diable ne trépigne pas pour agir du moment que ce dernier a trouvé un pêcheur ?

La légitimité de la folie et du terrorisme


Il n’est donc ni nécessaire d’être fou, ni nécessaire d’être terroriste pour passer à l’acte et au crime, il n’y a rien de plus humain. Cependant, à bien y regarder, folie ou terrorisme serait assez légitimes au fond.

Folie d’abord, car dans un monde où l’existence en est réduite à l’appartenance, l’individu qui sort du rang a besoin d’un grain de folie. Dans un monde où nous sommes confrontés à une overdose de bien. Ce bien devenu scientifique, ce bien inopposable, ce bien résultat de l’alliance entre l’idée révolutionnaire et la société de consommation, ce bien protéiforme que l’on appelle tantôt planète, diversité, tantôt développement durable, multiculturalisme… qui nie l’individu dans l’appareil auquel il doit s’incorporer, se dissoudre. Le crime est de fait l’ultime possibilité de renouer avec l’aventure, l’ultime possibilité de devenir un héros, l’ultime possibilité de réintégrer la narration dans le monde. Le coup de folie est donc légitime et on ne peut plus humain. Le crime est la possibilité de sortir de la tourbe en manifestant son refus d’appartenance. Le crime est la preuve de l’existence de l’homme. L’homme existe, je l’ai rencontré, il avait un pistolet semi-automatique en main.

Maintenant le terrorisme. La légitimité du terrorisme. Le fait que le jeune meurtrier ait été en intervention en Irak est très significatif. Le fait qu’il intervienne dans la lignée d’un acte terroriste en 2009 où Nidal Hassan avait voulu venger une frappe de drones et sans doute bien d’autres choses fait échos vis-à-vis de toutes les stratégies géopolitiques de l’occident depuis quelques dizaines d’années. Dans tous les théâtres d'opérations, on drogue les soldats pour faire le ménage. Le mal a été externalisé depuis longtemps, il est expulsé hors du territoire de l’empire. Et on fait semblant d’ignorer l’enfer dans lequel est plongé une partie de la planète : exécutions en chaîne, mutilations d’agonisants et de cadavres sans distinction, viols… On fait semblant d’ignorer toute la jouissance des humains en meute qui se livrent aux massacres. On fait semblant d’ignorer que la guerre et la drogue révèlent de façon collective et quasi-légale le mal que notre pêché a engendré en nous. De façon un peu simpliste, on aurait envie de souligner l’absurdité de cet Occident qui joue les vierges effarouchées sur son territoire après avoir mis le bordel partout dans le monde… Bref, le terrorisme trouve sa légitimité dans la volonté de forcer certains territoires à se sentir concernés par le mal. A rappeler à l’Empire du bien qu’il ne peut être en guerre sans éprouver la possibilité du mal en lui.

Incompréhension vis-à-vis d’un tel acte, entend-on ? Certains diront que c’est inhumain sans doute. Alors que nous devrions tomber à genoux immédiatement pour les criminels potentiels que nous sommes, identiques au tireur fou et, rendre grâce que nous ne soyons pas encore passés à l’acte.

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