Eugène Boudin, le père de l’impressionnisme
Art contemporain Mauvaise Nouvelle https://www.mauvaisenouvelle.fr 600 300 https://www.mauvaisenouvelle.fr/img/logo.pngEugène Boudin, le père de l’impressionnisme
« L’éternité, c’est la mer allée avec le soleil. » Le célèbre vers d’Arthur Rimbaud pourrait servir de devise de l'École impressionniste.
Les flots toujours recommencés, les embruns, le sable, les reflets de la lune (cf. la toile ci-contre) et du soleil sur la mer, si les peintres des années 1890 innovent en prenant la nature à témoin, ils le doivent en grande partie à Eugène Boudin, moins célèbre que Claude Monet ou Pissarro qui jouissent d’une notoriété internationale.
Les impressionnistes quittent leur atelier. Ils se dirigent, avec leur chevalet et leurs tubes de peinture, vers le bord de la mer, tout comme un spectateur se rend à une représentation théâtrale. Cette interprétation de la peinture de plein air, répétée comme un poncif par des historiens peu soucieux des faits, n'a aucune valeur sur le terrain. Les peintres artisans savent pertinemment que le transport du matériel, le séchage difficile des toiles et les mouches rendent la peinture en plein air tout simplement impraticable. Disons plutôt que les temps modernes sont propices aux voyages prolongés et à l’immersion dans la nature. L’impressionnisme saisit cette époque nouvelle en prenant au sérieux les reflets et les mouvements. Eugène Boudin et Monet, son élève, sont les artistes des reflets. Le célèbre tableau Impression, soleil levant n'a pas été réalisé in situ, dans la nature, mais dans une chambre d'hôtel au Havre… La Venue de l'Avenir, film de Klapisch actuellement à l’affiche, met en scène ce micro-événement qui aura un impact significatif dans l’histoire telle que la racontent les historiens. Monet se trouve dans sa chambre, il vient de passer la nuit avec sa maîtresse (la mère de l’héroïne du film). Il peint les reflets du soleil levant sur la mer. Tout cela s'est déroulé derrière une fenêtre, et non dans la nature. Peignait-il ou non en plein air ? Non. Il s’aventurait sur les côtes normandes ou le long des canaux, puis peignait sa provende par la suite. Quoi qu'il en soit, ses rendus de lumière et de couleurs sont d'une éclatante beauté. Boudin précède l'impressionnisme. Et Monet doit beaucoup à Boudin. Tout comme Deauville doit beaucoup au frère de Napoléon… Nous sommes vers 1860 lorsque le comte de Morny découvre la côte de Nacre. En quelques années, « Dosville », le petit port de pêche, voit fleurir de belles maisons, des hôtels – et une gare fait ensuite son apparition ; une station balnéaire est née !
Le chemin de fer transforme les concepts d’espace et de temps. Imaginons la scène suivante : les visiteurs des salles d’exposition à Paris découvrent, ébahis, les vastes plages illuminées de Boudin, les embarcations engluées dans la vase et les ciels aquarellés qui semblent absorber la lune ou le soleil ! Il ne s'agit pas de contrées éloignées, comme Tahiti ou les îles Marquises, mais de la côte normande, située à seulement deux ou trois heures de train de Paris !
Avec Boudin, la peinture devient, avant même la carte postale, un moyen de promotion touristique. À cette époque, les gares s’équipent de boutiques où le voyageur peut désormais acquérir des romans de gare. Une fois arrivé sur les plages de Deauville, des cabines en bois attendent le visiteur où même les femmes peuvent se changer en toute intimité. Le maillot de bain est une invention de cette époque. La révolution est en marche : à partir de 1860, un visiteur de l’exposition peut donc le matin admirer une exposition de Boudin et faire trempette dans son tableau l’après-midi… une expérience sinon impressionniste, du moins, impressionnante !
Le musée Marmottan www.marmottan.fr a rendu hommage à Eugène Boudin en présentant la plus grande exposition privée de ses œuvres.