Découvrez la collection Mauvaise Nouvelle, aux Éditions Nouvelle Marge.


Dénoncez-vous les uns les autres

Dénoncez-vous les uns les autres

Par  

Benoît Duteurtre trouve matière à satires dans le monde occidental où nous vivons et suffoquons. Son dernier roman, Dénoncez-vous les uns les autres, dépeint l’univers de dénonciation où les individus se meuvent, corsetés par un politiquement correct judiciarisé duquel ils ne peuvent pas réchapper : les antispécistes vous filment à l’abattoir où vous devez vous-même tuer l’animal que vous consommerez ensuite ; les réseaux sociaux prennent le relai pour calomnier les viandards, les racistes, les sexistes, les blancs hétérosexuels de 50 ans et tous les rebuts de l’ancien monde qu’ils traîneront l’un après l’autre, jusqu’au dernier, devant les tribunaux. Tous coupables. Tous doivent expier pour les crimes du passé que sont le racisme systémique ou le suprémacisme blanc. Tous doivent être ostracisés et réduits à néant.

Dans l’imaginaire de Duteurtre, la présomption de culpabilité règne en maître et le bannissement social est implacable pour les rétifs avérés ou supposés au nouvel ordre moral : « M. O’Neal est sans emploi depuis la révélation de ses idées sexistes qui ont conduit l’Eolian Company à le remplacer … par une femme ! Il est également sans allocations, en application de la loi-cadre qui supprime toute aide publique aux personnes condamnées pour des propos inappropriés. »

Le décor du récit est froidement orwellien : « Ils marchaient à présent l’un contre l’autre, boulevard de la Transition écologique, sans quitter l’étroite file réservée aux piétons. » Les rares rebelles, au risque de l’opprobre et de la prison, s’expriment ainsi : « Non ! Tout ce que j’ai construit va dans le sens contraire du monde. Cette société a détruit les beautés qui m’enchantaient. Voudriez que je sois généreux avec elle, que je lui offre mes rêveries sur ce passé englouti ? Désolé, ce siècle n’est plus le mien ; et j’ose même le détester, tant il s’éloigne de ce que j’aime. Songez que le simple fait d’aimer certaines choses révolues -comme la séduction, la viande rouge, la cigarette, les conquérants, que sais-je encore- fait de vous un dissident ! Notre époque voue toute son énergie à nettoyer le passé, casser les statues, balayer tout ce qui ne correspond pas à ses valeurs. »

Giusuppe, vieil esthète épris de la précieuse liberté qu’offrait le passé récent, assène aux antiracistes, antispécistes, décolonialistes, wokistes, militants de l’intersectionnalité sa vérité, la vérité : « Il faut comprendre que ceux qui prétendent faire triompher la vertu sont parfois des monstres cruels ».


Aristote, l’ennemi des libéraux libertaires
Aristote, l’ennemi des libéraux libertaires
Quand les Sophistes proposaient le règne des jargonneurs
Quand les Sophistes proposaient le règne des jargonneurs
Israël depuis Beaufort
Israël depuis Beaufort

Commentaires


Pseudo :
Mail :
Commentaire :