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Les enquêtes du père Brown

Les enquêtes du père Brown

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Dans Les Enquêtes du Père Brown, Gilbert Keith Chesterton met en scène avec humour un enquêteur philosophe, un Hercule Poirot prenant la posture du poète : le Père Brown. Chesterton est à l’image de son personnage quand il affirme : « Bref, il est dans la vie des coïncidences féeriques que les gens pour lesquels la prose seule existe ne remarqueront jamais. Comme Poe l’a très bien exprimé, dans son paradoxe, la sagesse doit tenir compte de l’invisible. » Chez lui, même les criminels sont doués et inventifs : « Le criminel est un artiste créateur […] Il se rappelait que le criminel s’était évadé, un jour, grâce à une paire de ciseaux, un autre, grâce à un incendie, un troisième, en payant la surtaxe d’une lettre non affranchie, et un quatrième, en faisant regarder par ceux qui l’entouraient, à travers un télescope, une comète qui devait détruire la terre. »

Que faire donc face à tant de créativité dans le larcin ou dans le crime ? « Si vous savez ce qu’un homme va faire, marchez devant lui, mais si voulez deviner ce qu’il fait, restez derrière lui. Egarez-vous où il s’égare, arrêtez-vous où il s’arrête, allez aussi lentement que lui. Vous pourrez voir alors ce qu’il a vu et agir comme il a agi. Tout ce que nous avons à faire, c’est épier ce que nous pourrions rencontrer de bizarre. »

Le Père Brown est intarissable lorsqu’il s’agit d’évoquer ceux qu’il traque et dont l’expertise force son admiration : « Un crime, dit-il, est une œuvre d’art comme une autre. Ne sursautez pas. Les crimes ne sont en aucun cas les seules œuvres d’art qui sortent de l’atelier infernal. Mais toute œuvre d’art, qu’elle soit divine ou diabolique, porte toujours une marque distinctive, à laquelle on ne peut manquer de la reconnaître – son fondement est simple, si complexe que puisse être sa réalisation. Ainsi, dans Hamlet, par exemple, le caractère grotesque du fossoyeur, les fleurs de la jeune fille folle, la parure fantastique d’Osric, la pâleur du fantôme et le ricanement du crâne sont autant d’objets étranges, tressés en une sorte de guirlande confuse autour de la simple et tragique figure d’un homme vêtu de noir. »

Avec Chesterton, la foi catholique à laquelle il se convertît durant sa vie, n’est jamais loin. Ainsi le montre le dialogue entre le Père Brown et un collègue prêtre que surprend un détective :

« Les premiers mots que le détective surprit appartenaient à la fin d’une phrase du Père Brown : « … c’est ce qu’ils voulaient dire au Moyen-Âge, lorsqu’ils parlaient des cieux incorruptibles. »

Le grand prêtre approuva de la tête et dit :

  • Ah oui, ces infidèles modernes font appel à la raison ; mais qui peut contempler ces millions de mondes et ne pas sentir qu’il pourrait y avoir de merveilleux univers, au-dessus de nos têtes, où la raison serait essentiellement déraisonnable ?
  • Non, repartit l’autre, la raison est toujours raisonnable, même dans le dernier limbe, à la dernière frontière des choses. Je sais qu’on accuse l’Eglise de ravaler la raison, mais c’est le contraire qui est vrai. Seule, ici-bas, l’Eglise place vraiment la raison au-dessus de tout. Seule, ici-bas, l’Eglise affirme que la puissance de Dieu elle-même se meut dans les limites de la raison.

Le grand prêtre leva sa tête austère vers le ciel constellé d’étoiles et dit :

  • Pourtant, qui sait si dans cet univers infini… ?
  • Physiquement infini, interrompit l’autre en se tournant brusquement sur son banc, non pas infini au point d’échapper aux lois de la vérité. »

Lire Chesterton permet de sourire et de rire en suivant le fil d’intrigues pétillantes nimbées de mystère, de métaphysique parfois ; cela nous rend à une forme de profondeur et fait la nique à la plate et grise modernité.


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