Lost in transition
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La semaine dernière se tenait à Paris le Ouisharefest. Durant trois jours, activistes, entrepreneurs, startupeur, professeurs et chercheurs se sont rencontrés sur le thème « Lost in transition ». Pour la troisième édition de cette grande messe de l’économie collaborative, les organisateurs ont en effet souhaité ouvrir le champ de leur réflexion non plus au seul comment mais aussi au pourquoi de cette révolution économique.
Qu’est-ce que l’économie collaborative ?
Il n’existe pas de définition de ce concept. Son périmètre est flou, fluctuant et n’a pas d’autre limite finalement que celle de l’imagination de ses promoteurs. Derrière ce mot se cachent de nombreux acteurs. Des têtes de gondoles comme Uber, Blablacar ou Rbnb aux plus modestes amap ou autre coopératives locales en passant par l’incontournable Wikipédia. Chacun d’entre nous, en cherchant un peu, trouvera dans ses habitudes de consommation un exemple de cette économie qui se veut plus humaine et responsable.
Pourtant, ne nous trompons pas. Si chacun prône avec un certain angélisme, le retour de l’entraide et du contact interpersonnel, il s’agit tout de même d’économie et donc de gros sous. S’appuyant sur les nouvelles technologies de l’information, de nouveaux acteurs ont fait une entrée fracassante dans la cour des grands. En à peine 6 ans, la capacité d’accueil proposée par Rbnb a dépassé celle proposée par des empires hôteliers qui ont mis 60 ans à se construire. La presse bruisse régulièrement de levées de fonds mirobolantes dont ne rêvent même plus nos industriels. Les start-up se présentent comme le nouvel eldorado et les plateformes collaboratives séduisent de plus en plus les investisseurs.
Objet de mode ou révolution ?
Loin du cliché d’une jeunesse bobo parisienne, le OuiSharefest est un melting-pot géographique et générationnel. Les compétences se croisent, les opérationnels fréquentent les théoriciens dans une ambiance chaleureuse, décontractée mais très professionnelle.
C’est la force de ce mouvement d’assoir expérience et convivialité à la même table. De ce point de vue-là, l’économie collaborative répond à un besoin fondamental de l’individu : être reconnu comme acteur utile à la bonne marche du monde. Chacun est considéré pour ce qu’il apporte. Les hughs et les embrassades font partie du folklore.
Il faut aller au-delà. Décloisonner, favoriser l’échange, assumer le droit à l’erreur, libérer la parole, poser un regard bienveillant sur autrui… tout cela ressemble à une douce utopie. Mais il serait stupide d’enfermer les acteurs de l’économie collaborative dans ce schéma d’enfant naïf. L’économie « classique » a tout intérêt à intégrer et à s’inspirer de ce mouvement.
Il était intéressant d’entendre les participants du festival se poser la question du but de ce nouveau modèle économique. Les réponses ont été diverses tout au long de ces trois jours. Deux pistes principales se sont croisées : libérer les énergies et respecter l’homme et son environnement.
S’agissant de la première, je peux témoigner de l’optimisme et de la passion des intervenants. Il règne dans l’économie collaborative une sorte d’euphorie grisante. Attention à la gueule de bois. Sur l’aspect environnemental, des questions restent en suspens. Par exemple : ce covoiturage que vous réalisez rentabilise votre déplacement en rationalisant l’usage d’une voiture. Pour autant, votre trajet est toujours plus polluant que s’il avait été fait en train.
Une nouvelle économie catholique ?
Il souffle sur ces modèles économiques un vent révolutionnaire. Le thème « Lost in transition » traduit bien le désarroi des participants. Ils sentent qu’il leur faut aller plus loin et transformer la société sans trop savoir comment le faire. De nombreux intervenants ont abordé des sujets transversaux : politique, démocratie, monnaie, philosophie… Quel que soit le domaine concerné, tous se sont accordés à considérer le bien commun comme le graal de toute démarche collaborative. Or, existe-t-il une notion plus subjective que celle-ci ? Chacun a son histoire, sa sensibilité, ses craintes… Quelles sont donc les limites du bien commun ? Est-il exclusif du bien individuel ? A qui est-il commun ?
On mesure à l’aune de ces questions, que la réflexion initiée est loin d’être terminée. Bonne nouvelle, l’église Catholique y réfléchit depuis plus de 2 000 ans. C’est même ce qui fonde sa doctrine sociale. Nos entrepreneurs chrétiens et nos pasteurs seraient inspirés dans faire la promotion. L’économie collaborative est une formidable chance pastorale. Ne la négligeons pas.