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État d'urgence ou État policier ?

État d'urgence ou État policier ?

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Dans les heures qui ont suivi les attentats survenus au Bataclan, le Conseil des Ministres a décrété l'état d'urgence sur l'ensemble du territoire français et pour la durée maximale possible avant le vote d'une loi. L'état d'urgence accorde notamment des pouvoirs accrus au pouvoir administratif.

Alors que les moyens policiers et militaires semblaient depuis longtemps ne plus être la priorité des différents gouvernements qui se sont succédés à la tête de notre pays, ces institutions reprennent un semblant d'utilité aux yeux du pouvoir. Dans le cadre de l'opération sentinelle et du plan vigipirate, 10.000 militaires sont déployés en France. Dans le même temps, la police se voit accorder des prérogatives exceptionnelles grâce à l'état d'urgence : perquisitions de nuit et assignations à résidence, par exemple. Alors que les lois liberticides de surveillance électronique allaient, nous disait-on, protéger les Français, les moyens policiers et de coercition reviennent sur le devant de la scène. Preuve en est donc, s'il en faut, que les moyens de surveillance ne se substituent pas mais s'accumulent dans notre législation.

Pour le commun des mortels, l'état d'urgence n'a qu'une influence modérée sur son quotidien. Chacun se plie de bon gré aux contrôles mis en place à l'entrée des grands magasins du Boulevard Hausmann ou des Champs-Élysées, qui pourraient devenir des cibles de choix pour des terroristes, et comprend l'attention que requièrent ces sites. Mais est-il bien utile de faire ouvrir le blouson de M. Dupond à l'entrée de son supermarché de province ? La question de l'opportunité d'étendre l'état d'urgence à l'ensemble du territoire est posée. Certes la mesure est légalement encadrée et, en l'absence de loi ad hoc de prorogation, limitée dans le temps mais l'absence de cadre spatial doit toujours faire réfléchir lorsque l'on parle d'une mesure liberticide, quand bien même celle-ci est justifiée par des enjeux de sûreté.

Peut-on cependant affirmer que la mesure est limitée dans le temps ? Formellement, l'état d'urgence est limité dans le temps mais la chose est infiniment plus contestable sur le fond. La France est en quasi-état d'urgence depuis vingt ans et l'instauration du plan vigipirate, dont les différents niveaux de vigilance sont un non-sens puisque depuis longtemps le niveau le plus élevé est le seul mis en œuvre.

Enfin, notre attention doit se porter sur les abus qui pourraient naître d'une mesure d'exception qui, pour aussi légitime qu'elle pourrait éventuellement être sur le papier, accorde de larges prérogatives à l'autorité administrative. À ce propos, les mesures d'assignation à résidence récemment prise à l'encontre de militants écologistes sont particulièrement inquiétantes. Que les choses soient claires, l'état d'urgence a été décrété suite à des attentats islamistes commis par des éléments de l'État Islamique. Quelle est foncièrement la légitimité des mesures d'exception prise à l'encontre des écologistes ? On perçoit évidemment que le spectre de la COP21 n'est pas loin : des manifestations de mouvements écologistes en pleine conférence environnementale où le super-président Hollande va sauver le monde, que dis-je la planète, seraient mal venues. Bien sûr, on parle plutôt d'assurer la sécurité, mais personne n'est dupe, le Gouvernement abuse largement des opportunités que lui offre la législation de l'état d'urgence. Après tout pourquoi l'État français voudrait-il protéger les écologistes d'un éventuel attentat terroriste ? Pour s'occuper d'eux lui-même, à coup de grenades ?


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