Victor Vieilfault entre prière et poésie
Livres Mauvaise Nouvelle https://www.mauvaisenouvelle.fr 600 300 https://www.mauvaisenouvelle.fr/img/logo.pngVictor Vieilfault entre prière et poésie
Mauvaise Nouvelle : Votre recueil de poésie s’appelle « L’âme en voyage » et nous voyons l’âme mise en question tout au long de ce recueil. J’ai comme ressenti une sorte d’urgence de votre part de remettre l’âme sur le devant de la scène. Je me suis même demandé si vous n’aviez pas fait le constat que certains s’étaient laissé vider d’âme. Votre combat, avec la poésie, est-il de conduire chacun à redécouvrir leur âme ? Est-ce un combat particulièrement contemporain ou de tous temps ?
Victor Vieilfault : Notre France est marquée par une accélération de l'effet de ciseau marxiste qui consiste à renverser l'ordre naturel des choses : les moyens devenant des buts, les buts devenant des moyens. Ainsi, la consommation devient un but, la vie intérieure un moyen, travailler toujours plus rapidement devient une nécessité, s'épanouir dans sa vocation une possibilité sous conditions financières, réussir dans la vie un but, avoir des enfants et une famille une option, avoir un enfant avec les yeux bleu un but, transmettre la vie une façon comme une autre de laisser une trace dans le monde, la lecture devenant une manière de se divertir et de se distraire, et plus une occasion de construire sa liberté intérieure.
Face à ce rouleau compresseur marxisant que le XXème siècle nous a laissé un héritage, la raison seule est impuissante. Les métastases sont trop nombreuses et trop éparses dans tous les pans de la société pour que l'on puisse espérer stopper cette dynamique infernale. Il faut aller au cœur, soulever l'émotion enfouie très profond, faire buguer le logiciel déshumanisant installé insidieusement dans chacune de nos consciences et qui empoisonne nos réflexions. Cela c'est le rôle des correspondances poétiques qui font dérailler la pensée pour la mettre sur les rails de la Vérité. L'écriture poétique est présente dans le monde pour ouvrir l'intelligence à ce qui lui est supérieur. On a cessé d'être chrétien depuis que l'on se prend trop au sérieux. L'homme n'est pas tout puissant, l'homme ne peut pas tout. En disant cela, j'enfonce une porte ouverte, mais c'est pourtant le point nodal de notre décadence occidentale. On meurt de vouloir vivre par soi-même. Je pense que notre époque atteint un sommet dans ce domaine en raison du développement exponentiel des technologies numériques, biologiques et industrielles. Les limites avec lesquelles nous flirtons n'ont jamais été aussi dangereuses pour la survie de notre humanité.
MN : J’ai également le sentiment que votre poésie cherche à reverticaliser l’homme et à le remettre en aventure. L’homme est-il sorti de sa propre histoire en niant sa vie intérieure ? Quelle grande aventure lui reste-t-il vivre ?
VV : L'homme perd sa droiture et sa colonne vertébrale, se courbe à mesure que les écrans font flancher son regard vers le trottoir. La gauche marxiste souhaitait rendre l'homme plus horizontal, plus fraternel. Elle a réussi à le rendre encore plus vertical qu'avant, mais cette fois-ci avec une ascendance vers le nombril plutôt que vers le Ciel. Bravo les apprentis sorciers de l'humain ! Et merci pour le service rendu à la patrie… On se retrouve aujourd'hui avec une société française fragmentée en mille morceaux avec une base culturelle qui s'appauvrit à vue d’œil et avec une solidarité portée à bout de bras par ce qu'il reste de chrétien, d'amour désintéressé du prochain, par des personnes qui croient encore au Ciel et d'autres qui n'y croient plus.
La grande aventure à vivre, c'est de chercher à bâtir un nouveau creuset français, qui rassemble le balayeur et le chef d'entreprise autour d'un destin commun : - une identité française ancrée dans la coopération avec les pays pauvres et dans la culture d'un mode de vie qui magnifie l'humain (encouragement de la vie familiale et des corps intermédiaires comme lieux d'éclosion du génie humain, développement d'une belle langue précise et poétique, célébration d'une gastronomie délicate) - une économie libérée qui encourage les initiatives provinciales et qui récompense le travail - une justice qui place l'homme au cœur et qui ne laisse pas un citoyen développer en lui-même une culture de l'impunité.
MN : Cioran disait que l’on habite une langue. Et vous évoquez l’importance de la langue française et même de la patrie. N’est-ce pas un détour lorsque l’on écrit des poèmes-prières comme vous le faites ? La France vous paraît-elle médiatrice ? Et dans ce cas, comment éviter une certaine fétichisation ?
VV : C'est dommage, dit Dieu, lorsqu'il n'y aura plus de français, il y a des choses que je fais il n'y aura plus personne pour les comprendre. Cette réplique tirée du Mystère de la Charité de Jeanne d'Arc de Charles Péguy illustre bien ce que je crois de la langue française : une langue pétrie par des siècles de prière, d'expériences, de recherches du bon mot et qui sent le parfum de la joie de la Parole. Le français est une langue utilisée prioritairement depuis des siècles pour les échanges diplomatiques. Pourquoi ne pas considérer qu'elle peut également nous aider dans nos échanges avec le Ciel ? Pour éviter toute fétichisation, il suffit de se rappeler ce verset de la lettre de St Jean qui ramène à l'essentiel : « Celui qui dit qu'il aime Dieu qu'il ne voit pas, et qui n'aime pas son frère qu'il voit, est un menteur. »
Pour commander un exemplaire du recueil dédicacé :
https://sites.google.com/view/victorvieilfault
Extrait du recueil de poèmes, L’âme en voyage, de Victor Vieilfault
« Mon drapeau est un voile fondu dans mon regard
Veille rouge et bleutée à ses extrémités
Gage de liberté pointe d’égalité
Ensemencer les âmes, dissiper les brouillards
C’est un songe français pour la fraternité
Que l’avenir prépare dans son plus pur secret. » (extrait de Mon avenir)