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Comment sculpter une prière pour tous ?

Comment sculpter une prière pour tous ?

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De quoi a-t-on besoin pour prier ? De temps ? D’un lieu ? De l’Eglise ? De mémoire pour dire son lot de prières apprises par cœur et rabâchée avec un brin de superstition comme des formules magiques ? De rien ? De Dieu. Lui-même. Commençons par Gustave Thibon, « La prière me parait le mouvement naturel de l’âme vers Dieu. Elle ne consiste pas à demander à Dieu telle ou telle grâce particulière, mais lui-même. » (P23) Le dilemme maintenant, c’est comment prier à deux ? Y a-t-il quelque chose entre la prière publique de l’Eglise et la prière intime ?

Isabelle Chevignard, a rédigé deux recueils de prières. Le livre de la prière du couple a été publié en juin et Tu as du prix à mes yeux et je t’aime, sorti début 2020. Dans le premier, Isabelle Chevignard a eu justement l’ambition de répondre à la difficulté de prier à deux, de trouver cet intermédiaire entre la prière publique et le for intérieur, de donner des idées aux couples. Dire à deux la même prière ne doit pas être se donner l’illusion d’avoir fusionné, non, c’est simplement manifester ce qui nous relie au créateur, c’est reconnaître que l’autre, qui partages une vie avec moi, est aussi relié au créateur. Isabelle a voulu faire des propositions concrètes, correspondant à des situations et des souffrances précises, en phase avec ce que les gens vivent, mais cependant avec des mots universels. Chaque mot se pèse, il ne faut pas être bavard, il faut être précis. Cela se sculpte une prière, jusqu’à l’os ! Isabelle dit avoir voulu éviter ce qu’elle appelle les phrases « merveilleusement pieuses ou autres bondieuseries » mais au contraire « faire état de ce sur quoi on s’égratigne, appeler un chat un chat, car rien dans nos vies ne désintéresse Dieu. » Exit donc les « louange à toi ! » à foison dès que les difficultés et les deuils arrivent. Nous ne pouvons pas brûler les étapes, et ressentir dès maintenant que tout est grâce. Nous devons simplement rester sincères avec Dieu.

De la même façon, le recueil à paraître traite de nos fragilités : la maladie, le chômage, le deuil, les fragilités psychologiques, la solitude, le pouvoir… L’ambition d’Isabelle Chevignard était de trouver les bons mots pour qualifier ce qui fait souffrir et mieux s’en remettre à Dieu, directement, sans l’obstacle du vague ou du flou. On pense immédiatement au marchandage d’Habraham avec Dieu aux sujets des justes de Sodome. L’adresse est directe, sans fioriture, et insistante. Que Dieu aime se faire prier, ne devrait pas nous faire douter de l’efficacité de la prière… Isabelle a quant à elle pris modèle sur des figures comme Moïse qui, dans leur imperfection, s’adressent à Dieu directement, parfois dans la colère, mais toujours en vérité. Jésus, Dieu fait homme, ne prie pas autrement. Au jardin des oliviers, Jésus ne lance pas une phrase merveilleusement pieuse, ne dit pas « louange à toi ! », mais demande (si c’est possible) « que cette coupe passe loin de moi » et sur la croix, il lance également dans un cri « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » Voilà la voie du dialogue dans la prière. « Il faut être en capacité de tout déposer devant lui et ainsi se faire pauvre. Il attend ça de nous. La pauvreté est l’attitude juste de celui qui prie. Dans cet état de pauvreté et de vérité avec Dieu » On pense bien sûr à Sainte Thérèse de Lisieux qui s’exprimant simplement voulais trouver un ascenseur pour s’élever jusqu’à Jésus, car elle se sentait trop petite pour monter le rude escalier de la perfection. Notre pauvreté est la plus grande richesse que Dieu puisse utiliser car Il attend que nous lui déposions tout devant lui. Plus je serai petit, et plus il lui sera facile de m’élever.

Soulignons pour finir sur le rapport du beau et du vrai. Les prières peuvent ressembler à des poèmes. Que ce soit « droit au but » ne doit pas empêcher que ce soit Joli et doux aussi. Isabelle Chevignard conclut : « la prière nous ouvre une porte sur la joie, nous fait entrevoir une lumière et nous incite à être plus attentifs aux manifestations de Dieu dans nos vies. » L’objectif est de ne jamais Le perdre de vue. Même quand il n’avance plus, même quand on chute, même quand les larmes nous voilent l’horizon.


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