Apogée et déclin des Mérovingiens
France Mauvaise Nouvelle https://www.mauvaisenouvelle.fr 600 300 https://www.mauvaisenouvelle.fr/img/logo.pngApogée et déclin des Mérovingiens
La fin de la faide royale, ayant opposée les reines Brunehaut et Frédégonde, puis leurs fils, permet à Clotaire II de monter seul sur le trône. Le roi, et plus encore son fils Dagobert, contribuent au début du VIIème siècle à l’apogée de la dynastie mérovingienne.
Le temps de la réunification et du renouveau (613-638)
Par la mort de Thierry II, dont les fils ont été éliminés, Clotaire II reste seul roi des Francs. Ce dernier installe alors sa capitale à Paris, comme l’avait fait son aïeul Clovis. Toutefois, le royaume franc est toujours divisé en trois regna, l’Austrasie (Est de la France actuelle, Est de la Belgique actuelle et les régions rhénanes), la Neustrie (Nord-Ouest de la France actuelle, sans la Bretagne) et la Burgondie (actuelle Bourgogne, comprenant le Nord de la vallée du Rhône et le Centre) dans lesquelles les aristocrates s’agitent, c’est pourquoi Clotaire II organise un concile afin de légitimer son pouvoir et de sceller la paix. Ainsi, s’inspirant de Clovis, il réunit à Paris, en octobre 614, une assemblée de soixante-dix-neuf évêques et de nombreux Grands devant lesquels il reconnaît les torts de la dynastie mérovingienne et promulgue à cet effet l'édit du 18 octobre, qui condamne les abus passés. Il a, en outre, la sagesse de respecter les particularismes régionaux. C'est ainsi que, dès 613, il maintient à la tête de chacun des trois royaumes un maire du palais : l'Austrasien Radon, le Bourguignon Garnier, et le Neustrien Gundoland. Les trois provinces du royaume des Francs sont donc réunies sous son autorité même si l’Austrasie et la Burgondie continuent à former des entités distinctes.
Figure 1 - Le territoire de Clotaire II en 613
Malgré cette réunification, des tensions demeurent. Le roi est sans cesse obligé de négocier avec les regna et multiplie les concessions à l'égard des aristocraties bourguignonne et austrasienne. En effet, il confirme les privilèges de la première par l'octroi de diplômes à l'issue de l'assemblée de Bonneuil de 616, puis il accorde à la seconde un souverain en la personne de son jeune fils Dagobert Ier, qu'il envoie régner en Austrasie en 623-624 sous la tutelle de Pépin de Landen (580 – 27 février 640) et d'Arnoul, évêque de Metz. Dans un premier temps, Dagobert est nommé vice-roi, recevant un territoire incomplet car Clotaire II souhaite conserver l’Alsace et la Champagne, ainsi que les villes de Verdun, Toul, Chalon-sur-Saône et Reims) mais, en 626, Dagobert est proclamé roi et reçoit presque l’intégralité de l’Austrasie, seule la Provence et l’Aquitaine restent sous l’autorité de son père. Malgré ces initiatives, deux éléments vont affaiblir définitivement l’autorité de la dynastie mérovingienne : les fortes dissensions entre la Neustrie et l'Austrasie font perdre toute homogénéité au royaume, et les Maires du Palais bénéficient d'un pouvoir croissant. En effet, afin de les remercier de leur concours durant les conflits, le roi accorde l'inamovibilité de leur charge.
Clotaire II meurt en 628, a environ quarante ans. Il laisse deux héritiers qu’il a eu avec deux épouses différentes mais, contrairement à nombre de Mérovingiens, il est resté monogame. Ainsi, ce dernier a épousé en premières noces Haldetrude, qui enfante Mérovée (décédé en 604) ; puis Bertrude, qui donne naissance à Dagobert (né entre 600 et 605) ; à la mort de cette dernière, en 618, il se remarie avec Sichilde, qui met au monde Charibert II (né vers 610).
A la mort de son père, Dagobert accoure d’Austrasie afin de récupérer le royaume et, bien qu’il ait un frère, sa légitimité en tant qu’héritier n’est pas contestée, que ce soit par les aristocrates d’Austrasie, d’où il vient, ou par ceux des deux autres regna car Charibert est écarté de l’héritage sous prétexte d’imbécillité. Dès les premiers mois de son règne, Dagobert entreprend une grande tournée en Austrasie et en Burgondie, afin de rassurer l’aristocratie sur ses intentions, mais les austrasiens continuent à s’agiter. Ainsi, pour apaiser les tensions, et bien que cela divise le royaume, il décide d’envoyer son frère en Aquitaine ; Charibert II installe sa capitale à Toulouse et son territoire s’étend des Pyrénées aux rives de la Dordogne. Suite au décès de ce dernier en 632 (et la mort suspecte de son neveu, Chilpéric, en 633 ; on ne sait pas s’il est mort naturellement ou à l’instigation de son oncle) Dagobert récupère l’Aquitaine, ce qui lui permet d’unir à nouveau le royaume des Francs. Ainsi, devenu unique roi des Francs, Dagobert a à cœur de poursuivre la politique de son père, tentant de rétablir l’autorité royale au sein du royaume. Il commence par disgracier Pépin de Landen et Arnould, devenus trop puissants ; sur les conseils d’Eloi (ancien orfèvre devenu trésorier), la frappe des monnaies est centralisée à Paris, afin de mettre fin aux fraudes ; il interdit aux leudes de partager leurs terres entre leurs héritiers, les contraignant à adopter le principe de la primogéniture ; enfin, il fait agrandir la basilique Saint Denis, embellie sous la direction d’Eloi. Par ailleurs, il tente de consolider les frontières du regnum Francorum, principalement en Aquitaine (avec la Gascogne) et en Bretagne mais, s’il parvient à soumettre les Basques, il ne doit se contenter que d’un accord diplomatique avec les Bretons. Pour autant ces mesures n’apaisent pas les tensions avec les aristocrates austrasiens et neustriens car ceux-ci n’apprécient guère l’union des trois provinces qui menace leur indépendance. Ainsi, après une révolte des premiers en 634, il est contraint d’envoyer son jeune fils, Sigebert III (né en 630 de sa relation adultère avec Ragnétrude) en Aquitaine et de placer à la tête de la Neustrie son deuxième fils, Clovis II (né en 635), suite à l’insatisfaction grandissante des aristocrates. Il parvient donc à faire respecter son autorité monarchique tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du regnum Francorum, où seuls les Saxons parviennent à mettre en échec sa politique. Malheureusement, sa mort, le 19 janvier 639, ouvre une crise dynastique qui aboutira un siècle plus tard, à l'élimination des Mérovingiens par les Carolingiens, dynastie issue de la lignée des maires du palais d'Austrasie.
Commence dès lors l’ère des rois fainéants…
Rois fainéants et maires du palais (639-657)
Figure 2 - Un roi fainéant en voyage
En effet, les rois succédant à Dagobert Ier sont connus sous le nom de "rois fainéants" car, durant le dernier siècle de la dynastie mérovingienne (de 639 à 751), le pouvoir va être exercé par les Maires du Palais qui ne laissent aux rois que l'apparence du pouvoir. Si le nom de ces rois n'apparaissait pas au bas de certains documents officiels, on ne saurait pratiquement rien de ces derniers. Ces jeunes souverains sont souvent présentés par les chroniqueurs du IX° siècle comme des incapables, épuisés par leurs débauches, n’ayant plus l’envie de gouverner ni même la force de vivre. En réalité, leur inaction s'explique surtout par leur faiblesse et leur impuissance. Souvent très jeunes, les querelles familiales pour le pouvoir ne leur laissent qu'une espérance de vie très faible et les souverains mérovingiens deviennent les jouets de l'aristocratie. D'autre part, dans un contexte général de crise économique en Occident, les richesses acquises par leurs prédécesseurs se sont considérablement amenuisées, à cause notamment de l'arrêt des campagnes militaires pour étendre le royaume, des détournements de l'impôt et des dépenses engagées pour venir à bout des révoltes et pour acheter la fidélité des vassaux. L'autorité des Mérovingiens s'affaiblit donc pendant cette période de pauvreté et de déclin de la monarchie, tandis que s'imposent peu à peu les maires du palais. À l'origine simple intendant, le maire du palais devient avec le temps le réel administrateur du royaume, comparable au premier ministre au bas moyen âge, en raison de son rôle central dans les relations avec l'aristocratie franque. Étant issu de celle-ci, en effet, le maire du palais défend naturellement les intérêts des nobles, ce qui vaut aux détenteurs de la charge un prestige croissant. Progressivement, la charge de maire du palais consiste notamment à déclencher les guerres, à négocier les accords avec les pays voisins, à nommer les évêques, les ducs et les comtes. Des trois maires du palais, celui de Bourgogne disparaît assez tôt, puis la lutte s'engage entre les deux autres.
En 639, après un quart de siècle d’unité, le royaume des Francs est à nouveau divisé. Sigebert III (634-656), le fils de Raintrude, âgé de 9 ans, reçoit l’Austrasie, et Clovis II (639-657), le fils de Nanthilde (vers 610-642), qui n’a que 4 ans, reçoit la Neustrie et la Bourgogne. Du fait, de l'avènement de deux souverains mineurs, la réalité du pouvoir est confiée à des maires du palais : Pépin de Landen (638- 640), puis Otton (640-643), et enfin Grimoald (643-662), le fils de Pépin de Landen, en Austrasie ; Aega (638-641), puis Erkinoald (641-657) en Neustrie. Enfin, en 642, l'assemblée d'Orléans restaure la mairie de Bourgogne au profit de Flaochad, neveu par alliance de la régente Nanthilde.
Figure 3 - Le partage de 638
En Austrasie, Pépin de Landen, qui avait été écarté par Dagobert, parvient à se faire nommer maire du palais, mais il décède en 640 après avoir récupérer une partie du trésor de Dagobert Ier. A sa mort, la charge de maire du palais est confiée à Otton, le précepteur de Sigebert III. Toutefois, cette nomination ne plaît guère à Grimoald, fils du défunt qui, grâce à un acte de bravoure ayant sauvé la vie du roi pendant la guerre contre la Thuringe en 643, reçoit la charge de maire du palais au retour de la guerre suite à l’élimination de son concurrent. Sigebert III est assassiné à Metz le 1er février 656, à l'âge de 26 ans, dans un complot, mais sa succession pose problème car il laisse deux héritiers : un fils adoptif, Childebert III, le fils de Grimoald adopté cinq ans plus tôt alors qu’il désespérait d’avoir un jour une descendance (mais cette hypothèse est remise en cause depuis quelques années par les historiens qui pensent de ce dernier serait un enfant illégitime de Sigebert, confié en tutelle à Grimoald), et Dagobert II, son fils légitime né vers 652. Toutefois, Grimoald, soucieux de ne pas partager l’héritage du défunt, décide de faire tondre le jeune Dagobert II, et le fait enfermer dans un monastère en Irlande.
Par ailleurs, on ne sait presque rien des dix-huit années de règne de Clovis II car les sources sont très lacunaires concernant cette période. Aussi, nous savons qu’il accède au trône à l’âge de trois ou quatre ans par conséquent, la régence est exercée par sa mère Nantilde, et le maire du palais de Neustrie, Ega. Ce dernier, décédé vers 640, est alors remplacé par Erkinoald. En 649, il épouse une esclave anglo-saxonne, Bathilde, qui avait été achetée à York par le maire du palais et qui lui donne trois enfants : Clotaire III (né en 652), Childéric II (né en 653) et Thierry III (né en 654). Enfin, il meurt en octobre 657, à l’âge de 23 ans.
Le temps de la prépondérance neustrienne (657-680)
Figure 4 -La descendance de Clovis II
A sa mort, Clovis II laisse donc trois fils en bas-âge. L’aîné, Clotaire III, alors âgé de quatre ans, est proclamé roi de Neustrie et de Burgondie sous la tutelle de sa mère, Bathilde et du maire du Palais, Erkinoald, lequel décède l’année suivante et est remplacé par Ebroïn, choisi par les leudes de Neustrie. Par ailleurs, suite à la mort de Childebert III en 662, le maire du palais est contraint de donner un roi aux leudes d’Austrasie, envoyant le jeune Childéric II, âgé de huit ans, à Metz, dont la régence est assurée par Wulfoald. En 664, Bathilde se retire au monastère de Chelles, qu’elle avait fondé, abandonnant le pouvoir à Ebroïn. En 673, Clotaire III meurt, à l’âge de 21 ans.
Le défunt roi n’étant pas marié, il ne laisse pas d’héritiers. Sa couronne est donc cédée à ses frères mais, comme Childéric II est déjà roi d’Austrasie, Ebroïn fait monter Thierry III sur le trône de Neustrie. Toutefois, les leudes de Neustrie, qui haïssent le maire du palais, décident de l’arrêter et de l’emprisonner dans le monastère de Luxeuil et, Thierry III étant considéré comme la créature d’Ebroïn, est déposé et tondu.
En 673, après la déposition de son frère, Childéric unifie donc les royaumes francs de Neustrie et d'Austrasie sous son sceptre. Il fait placer son frère au monastère de Saint-Denis pour le protéger de ceux qui l'avaient renversé. Il prend pour conseiller spirituel l'évêque Léger d'Autun mais, en 674, celui-ci désapprouve le mariage du roi avec sa cousine germaine Bilichilde c’est pourquoi, furieux, Childéric le fait enfermer au monastère de Luxeuil. D'un caractère violent, le roi ne fait pas l'unanimité chez les grands. Ainsi, en 675, les Neustriens organisent un complot pour le supprimer. Le chef de la cabale, le nommé Bodilon, un noble franc que le roi avait fait battre à un poteau sans jugement, profite que le souverain chasse dans la forêt de Brotonne, près de Rouen, avec ses amis Ingobert et Amalbert, pour tuer le couple royal alors même que la reine Bilichilde est enceinte. L'apprenant, les conseillers du roi - Wulfoald en tête - s'enfuient en Austrasie. Le roi Childéric n'avait que 22 ans et ne laisse aucun héritier par conséquent, son frère Thierry III est sorti du monastère de Saint-Denis où il était enfermé et est proclamé roi des Francs à Saint-Cloud. C'est alors qu'Ebroïn, qui souhaite se venger de Wulfoald et de Léger, sort de son monastère et revendique la mairie du palais de Neustrie. Il mène une armée contre le nouveau maire du palais, Leudesius (qui n’est autre que le fils d’Erkinoald), qui panique et qui s'enfuit avec le roi Thierry. Ebroïn s'empare alors du pouvoir puis assassine son rival. Il proclame ensuite roi d'Austrasie le jeune Clovis III, qu'il prétend être le fils de feu Clotaire III (bien que nous savons que celui-ci n’a pas eu de descendance), mais voyant qu'il était très peu suivi, Ebroïn renonce à soutenir Clovis III, lequel est tondu et enfermé dans un monastère, et se contente du titre de maire du palais de Neustrie. En 678, sur demande d’Ebroïn, Thierry convoque un concile d'évêques pour faire juger l'évêque Léger d'Autun que la maire du palais accuse du meurtre du roi Childéric II. Bien qu'il n'y ait aucune preuve contre lui, l'évêque est dégradé par ses collègues et condamné à mort par le roi. Wulfoald, quant à lui, décide de gagner l’Austrasie et, afin de s’assurer du contrôle de cette région, fait revenir d’Irlande le jeune Dagobert II, qui avait été enfermé dans un monastère dix ans auparavant. Celui-ci meurt le 23 décembre 679, sans doute tué à la chasse par l’un de ses serviteurs, et Wulfoald est assassiné dans la foulée. Suite à la mort de leur maire du palais, les Austrasiens, menés par Pépin de Herstal (vers 645 - 16 décembre 714, il est le petit-fils d’Arnoul de Metz) et son frère (ou demi-frère) Martin, se révoltent. Ebroïn et Thierry mobilisent leur armée et écrasent les Austrasiens à Lucofao, aujourd'hui Bois-du-Fays, près de Laon. La même année, Ebroïn est assassiné par Ermenfred, un leude mécontent qui avait été dépossédé de ses biens par le maire du palais, qui s’enfuit en Austrasie suite à son acte, et c’est Waratton, un ami de Pépin de Herstal mais néanmoins un parent du défunt, qui prend les rênes du palais de Neustrie. Et, alors que la coutume aurait voulu que le maire du palais déclare la guerre à l’Austrasie, qui hébergeait le meurtrier d’Ebroïn, Waratton préfère se rapprocher de Pépin de Herstal. Cette décision ne faisant pas l’unanimité, le maire du palais est renversé par son fils, Giselmar, qui décide de prendre les armes contre l’Austrasie et qui, en 684, parvient à battre les troupes de Pépin près de Namur. Au décès de Giselmar la même année, c’est Waratton qui le remplace mais ce dernier meurt peu de temps après. Ainsi, en 685, la mairie du palais échoit à son gendre Berchaire qui, soucieux de rétablir la politique de renforcement de l’autorité royale mené par Ebroïn, rompt avec l'Austrasie et redonne l'indépendance à la Neustrie, mais il s’attire l’inimitié de nombreux leudes qui s’exilent en Austrasie, auprès de Pépin de Herstal. Ce dernier, bénéficiant de nombreux soutiens, lance ses troupes contre la Neustrie qu’il bat en 687 lors de la bataille de Tertry, près de Saint Quentin. Les Neustriens sont définitivement vaincus. Berchaire est tué au combat et le roi Thierry tombe entre les mains de Pépin de Herstal. Celui-ci le prive totalement de tout pouvoir de décision et l'oblige à le suivre en Austrasie. En Neustrie, Pépin laisse Norbert, l'un de ses fidèles, diriger les affaires.
La montée de l'Austrasie et le triomphe des Pippinides (687-751)
A compter de cette date, Pépin devient le véritable maître de l'empire franc, qu'il gouverne tout en laissant subsister encore des fantômes de rois. En effet, les trônes de Neustrie et de Bourgogne passent d’héritiers en héritiers, sans qu’ils n’aient le moindre pouvoir de décision puisque c’est un Austrasien qui dirige les affaires. Ainsi, en 30 ans, trois souverains mérovingiens se succèdent : Clovis IV est proclamé roi à la mort de son père Thierry III, en 691, lequel décède à l’âge de 15 ans et est remplacé par son frère Childebert III, en 695 qui, suite à son décès survenu le 14 avril 711, est remplacé par son fils Dagobert III, âgé de douze ans. Quant à l'Austrasie, Pépin dédaigne y placer un roi, et sans en prendre lui-même le titre, la gouverne comme un état héréditaire dans sa famille. Toutefois, son autorité n’est pas acceptée partout car la Neustrie accepte mal la domination d’un leude d’Austrasie, la soumission de la Bourgogne et de l’Aquitaine n’est que nominale et, dans le sud et dans l’ouest, les gouverneurs locaux ont profité des guerres civiles pour prendre plus d’indépendance. Ainsi, ce dernier passe donc la majeure partie de son règne à guerroyer, de nombreuses provinces ayant juré fidélité aux Mérovingiens mais pas aux Pipinides.
Pépin d'Herstal, après avoir gouverné le royaume franc pendant vingt-sept ans sous quatre rois, meurt le 16 décembre 714. Sa succession est difficile car ses héritiers légitimes soit meurent avant lui, tels ses fils Drogon et Grimoald, qui disparaissent prématurément en 708 et en 714, soit sont trop jeunes pour lui succéder efficacement, tel le fils bâtard de Grimoald, Theudoald, âgé seulement de six ans lorsque son grand-père disparaît. Par ailleurs, les Neustriens, dirigés par leur nouveau maire du palais, Rainfroi, et soutenus par les Aquitains du duc Eudes, par les Saxons, qui franchissent le Rhin, et par les Frisons, se révoltent contre l'autorité vacillante de la veuve de Pépin, Plectrude, et tentent de lui opposer celle d'un Mérovingien, fils réel ou non de Childéric II : un clerc de quelque quarante ans, Daniel, rebaptisé Chilpéric II (715-721), qui succède ainsi opportunément à Dagobert III.
Ce n’est que grâce à l'intervention d'un autre bâtard de Pépin de Herstal, Charles (le futur Charles Martel, vers 688-22 octobre 741), fils aîné de sa concubine Alpaïde, que la situation se renverse brutalement, sauvant ainsi l'Austrasie et les Pippinides. Vainqueur des Neustriens près de l'Amblève en 716, à Vinchy en 717 et aux abords de Soissons en 719, Charles couvre son action du manteau de la légitimité mérovingienne, d'abord en opposant au roi de Neustrie, Chilpéric II, un roi d'Austrasie, Clotaire IV (718-719), peut-être fils de Thierry III, puis en leur donnant un successeur, Thierry IV (721-737), fils de Dagobert III.
Figure 5 - Charles Martel
Fantoche dépourvu de tout pouvoir, Thierry IV, laisse la réalité du pouvoir à Charles, désormais unique maire du palais du regnum Francorum. Tenant solidement l'Austrasie familiale, maître incontesté de la Neustrie adverse et de la Germanie voisine, dont il facilite l'évangélisation avec l'aide principale de saint Boniface (vers 675-754 ; Apôtre de la Germanie, archevêque de Mayence), Charles Martel profite des invasions arabes pour restaurer enfin l'autorité franque dans toute la Gaule. Après avoir battu les forces musulmanes d'Abd al-Rahman ibn Abd Allah à Poitiers en 732, il impose en effet au duc d'Aquitaine, Hunaud (? - vers 756), la prestation d'un serment de fidélité en 736 ; en même temps, il reprend en main le contrôle de la Gaule du Sud-Est, où il occupe la Bourgogne jusqu'à Lyon en 733, puis les villes de la vallée du Rhône au terme de nombreuses expéditions menées en 736, en 737, et en 739.
Pour prouver l’inutilité des rois mérovingiens, il néglige, au décès de Thierry IV, en 737, de recourir aux services d'un nouveau roi de cette dynastie et décide de gouverner l'empire franc jusqu'à sa mort survenue à Quierzy, le 22 octobre 741. Par ailleurs, peu avant sa mort, il procède à un partage « royal » de sa succession entre ses deux fils légitimes – Carloman (715-755), qui reçoit l'Austrasie, l'Alémanie et la Thuringe, et Pépin le Bref (715-768), auquel il accorde la Bourgogne, la Neustrie et la Provence – et son fils naturel, Griffon (726-753), est pourvu de quelques terres en Austrasie, en Neustrie et en Bourgogne, terres qu'il détient dès lors sans droit de souveraineté.
Suite à leur accession au trône, Carloman et Pépin le Bref emprisonnent leur demi-frère, Griffon, triomphent des révoltes qui ont suivi la mort de Charles Martel, en particulier chez les Alamans (742, 744, 746), et jugent prudent, pour ôter tout prétexte institutionnel aux révoltes des ducs nationaux, de rétablir un Mérovingien, Childéric III (fils de Chilpéric II, ? -751). Par ailleurs, les deux frères qui aident saint Boniface dans l'évangélisation de la Germanie, le chargent de réformer le clergé franc (742-744). Seul maire après l'abdication de Carloman en 747, Pépin triomphe d'une nouvelle insurrection en Bavière, où reparaît Griffon ; la Bavière reste alors soumise à Pépin jusqu'à la majorité de son duc, Tassilon en 763. Sur l'avis favorable (et sollicité) du pape Zacharie (? – 752 ; pape de 741 à 752), le maire dépose Childéric III qui est tondu et enfermé à l’abbaye de Saint-Bertin à Sithiu, près de Saint-Omer, où il finira ses jours, puis se fait élire roi des Francs par l'assemblée des grands et oindre par saint Boniface à Soissons en novembre 751. Pour assurer sa légitimité, Pépin est sacré roi en 754, à Saint-Denis par le pape Étienne II (consacré pape le 26 mars 752, mort le 26 avril 757 ; il succède à Zacharie et précède Paul Ier). Son couronnement marque l'avènement de la dynastie des Carolingiens, qui perdurera jusqu'en 987.
Ainsi, la famille des Pippinides (Grimoald, Pépin de Herstal, Charles Martel puis Pépin de Bref) aura durant 110 ans occupé le pouvoir à la place d'une dynastie mérovingienne effacée.
Conclusion
Les historiens portent souvent un jugement très sévère sur les mérovingiens en insistant sur la cruauté, la cupidité et la fourberie des rois francs. Il faut cependant avoir à l’esprit que les sources qui nous sont parvenues sont principalement, à l'exception des découvertes archéologiques, des écrits qui datent des carolingiens qui, pour mieux se valoriser n’ont pas hésité à dénigrer les mérovingiens.
C’est pourquoi, il faut leur reconnaître des points positifs car ce sont les mérovingiens qui ont mis fin aux invasions barbares en Occident et aux grandes migrations de population, qui ont réussi l'amalgame entre le monde barbare et les gallo-romains. Ils ont esquissé la première ébauche de l'Europe qui deviendra l'Empire de Charlemagne et ont été les initiateurs du rapprochement du trône et de l'Eglise. Pour autant, ce qui les aura freinés dans leur "mission" aura été leur conception inadéquate de l'Etat puisque celui-ci était considéré comme un patrimoine familial. En outre, les partages des royaumes entre les enfants mâles a été source de rivalité et de conflits qui ont perturbé fortement l'évolution de la société. Enfin, l'absence de budget d'Etat, qui se limitait en fait à la fortune du roi, empêchait le monarque d'entretenir une armée conséquente. Ainsi, pour arriver à ses fins, il était obligé de récompenser les plus méritants, et n'avait d'autre solution que de puiser dans le domaine royal : les serviteurs s'enrichissaient donc au détriment des rois, jusqu'à ce que leur puissance devienne supérieure à celle du clan royal.