Erik Satie toujours précurseur
Livres Mauvaise Nouvelle https://www.mauvaisenouvelle.fr 600 300 https://www.mauvaisenouvelle.fr/img/logo.pngErik Satie toujours précurseur
À propos de l'excellente biographie « Erik Satie » de Romaric Gergorin chez Allia (collection « Classica »)
Erik Satie est toujours et encore d'actualité en 2016 et son œuvre gène toujours les imbéciles et les ignares aux entournures, ils ne la comprennent pas, n'arrivent pas à saisir son exigence :
La preuve en est par la sottise insigne d'un élu Front National d'Arcueil qui le traita il y a quelques temps déjà de « lâche » car Satie ne fit pas la Première Guerre Mondiale, il faut dire qu'il avait quarante huit ans, d'« illuminé » à cause des « sonneries de la rose croix » qui était une blague de l'auteur des « Gnosiennes », d'« alcoolique » de par le goût de Satie pour la fête bien arrosée, et de « communiste » le compositeur des « Gymnopédies » s'inscrivant à la section SFIO d'Arcueil.
Comme disait Audiard fort justement « les cons ça ose tout », je dirais même plus surtout les cons incultes ou insensible ce qui souvent revient au même…
C'était le 31 mars dernier pendant les discussions du conseil municipal sur les festivités prévues pour le cent-cinquantième anniversaire de la naissance de Satie. Apparemment le brave homme, Denis Truffaut, n'a jamais écouté « Parade » ou « les Embryons séchés d'Holothurie » ni même les chansons de « music hall » qu'il écrivit pour le « Chat Noir », les qualifiant de « rudes saloperies » à lire sa « correspondance presque complète » rassemblée par Ornella Volta exégète de « Esoteric Satie », Ornella Volta rencontrée par votre serviteur à l'occasion d'un spectacle sur le musicien montée par mes soins en 1994 à Nanterre et ceux d'autres passionnés du compatriote honfleurais d'Alphonse Allais, compagnon en absurdie.
Satie, surtout la silhouette de fonctionnaire qu'il s'était faite dans la dernière partie de son existence, hante encore les rues d'Arcueil et de Montmartre lui l'amant inconsolable de la volcanique Suzanne Valadon, ancienne acrobate devenue artiste peintre de talent, inspiratrice de la « Messe pour les pauvres » réellement mystique car tous les morceaux de Satie ne sont pas des blagues à la face des cuistres. Il avait fini par s'occuper des gosses de son quartier, parfois avec Cendrars, son ami de toujours, découvrant un jour dans une armoire de « l'ermitage » de banlieue deux-cent vingt faux-cols en celluloïd.
L'auteur de ces lignes adore passionément Erik Satie découvert à douze ans gràce à l'intelligence de son professeur de piano, Anne le Gall. Il m'a accompagné tout au long de mon existence. En dire du mal face à moi c'est risquer ma -sainte- colère. Les « Gymnopédies » sont ma « sonate de Vinteuil ». Elles marquent ma vie amoureuse et personnelle. Satie je l'aime pour son sens de l'absurde, son goût pour la provocation sereine face aux académismes bourgeois, son audace intelligente et son refus de tout romantisme mièvre dans ses compositions.
J'ai joué les « danses pour jeunes hommes nus », le sens du mot Gymnopédie, partout, sur de nombreux pianos, devant public ou non.
Tout a déjà été écrit sur le « Velvet Gentleman » de Montmartre, en particulier par Ornella Volta qui comprend le mieux l'esprit et la lettre du compositeur. Se lancer dans une biographie est risqué, comment l'évoquer : sa vie et son œuvre, sans se répéter ? Romaric Gergorin dans ce livre se base sur le désir de reconnaissance de Satie tout au long de sa vie, sa rivalité avec Debussy et surtout Ravel, plus mondain. Quand Debussy, malade et alité, voudra se réconcilier avec l'ermite de « Arcueil désert » il sera beaucoup trop tard. Gergorin y arrive très bien et le livre se dévore comme sans y prendre garde. C'est la magie aussi du premier « sur-réaliste » que fût Erik Satie, né Eric, transformant son prénom pour faire suer sa belle-mère, une marâtre qui aurait voulu faire de lui un comptable ou je ne sais quelle profession passionnante…