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Sommes-nous encore en démocratie ?

Sommes-nous encore en démocratie ?

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Sommes-nous encore en démocratie ? questionne Natacha Polony dans le titre de son nouvel essai. L’intellectuelle de gauche, hostile au néolibéralisme apparu dans les années 1970 avec Reagan et Thatcher, matérialisé par le fameux « there is no alternative » repris par Emmanuel Macron, invite à repousser la technocratie de Bruxelles, le pédagogisme qui a tué l’école et la méritocratie républicaine, le déploiement des dogmes du management anglo-saxon dans la fonction publique, l’islamisme et son identitarisme politico-religieux qui détruit peu à peu notre pays… « Le temps est venu de faire tomber les nouvelles Bastille » affirme-t-elle dans un élan aux accents révolutionnaires. Elan qu’elle souhaite bien sûr pacifique, rationnel, pas trop populiste, à son image d’éditorialiste à l’hebdomadaire Marianne et à France Inter. Parfois associée au camp des nouveaux réactionnaires, au côté des Gauchet, Debray, Finkielkraut, Julliard, Muray jadis, on s’interroge en la lisant attentivement sur ce qui la sépare d’un Eric Zemmour par exemple? La réponse est simple. L’écrivain Renaud Camus parle de ces « intellectuels empêchés » qui ne vont pas au bout de leurs intentions, tenus par leur appartenance au camp du Bien, résolus à ne pas se retrouver en butte avec un ostracisme définitif, une disparition des radars médiatiques. Natacha Polony est passionnée par le « grand déclassement » et par la lutte des classes à réactiver, dans le sens d’un renversement à opérer des élites économiques mondialisées qui ont détruit les classes moyennes occidentales, dans le sens encore d’un soutien aux gilets jaunes, petits blancs ruraux ou péri-urbains qui constituent pour l’essentiel ce que le géographe Christophe Guilluy nomme « la France d’en-bas ». Elle est évidemment passionnée aussi par le « grand réchauffement », justifiant ainsi pleinement son ancrage à gauche : « Tout à coup, l’acte de consommation apparaît pour ce qu’il est, un acte politique qui peut servir  à favoriser un système plutôt qu’un autre. C’est à ce croisement du politique et de l’économique que se jouera, par la reprise de contrôle des citoyens, la reconquête démocratique. C’est par le local, en reconstituant des bassins économiques à échelle humaine, que l’on sauvera la planète, mais aussi le lien social et économique. » L’ambition assumée ici est de sauver la planète, et de « sauver la fin du mois », en une synthèse qui réconcilierait l’enjeu du pouvoir d’achat et l’engagement en faveur des causes impérieuses dont la gauche se veut gardienne. Mais qu’en est-il donc du troisième pilier, après le grand déclassement et le grand réchauffement, à savoir le « grand remplacement » et l’urgentissime question de traiter la question migratoire et la restauration de l’autorité de l’Etat afin que la civilisation européenne ne disparaisse pas ? Voilà ici le point qui la distingue de Zemmour puisqu’elle ne le traite tout simplement pas dans son livre. Ce problème ne semble pas exister pour notre auteur, alors même que c’est la cause racine des maux qui nous frappent de plein fouet. Cette immigration massive -500000 nouveaux entrants chaque année dans notre pays- voulue par les libéraux afin d’enrichir les multinationales en réduisant leurs coûts de production, désirée par les élites qui y voient une sorte de paradigme moral matérialisé par le récent Pacte de Marrakech, au service de l’idéologie dominante du multiculturalisme, est l’impensé des écrits de Polony. Il y a un autre point qui la différencie de celui qui se campe en « dissident numéro un » et dont on dit qu’il génère par son influence une zemmourisation de la société française : l’affaire de l’association Génération identitaire désormais dissoute par le ministre de l’intérieur Darmanin, dont elle a qualifié les membres de « complotistes et racistes ». Sans nuance, sans prise de hauteur dans l’analyse, sans ce ton pondéré et un peu surjoué qu’elle adopte dans les émissions radiodiffusées. Zemmour quant à lui, à raison, a pris la défense de Génération identitaire qui pratique l’agit-propre non-violent et cherche à réveiller l’opinion publique assoupie sur le problème de l’immigration en France. Natacha Polony apparaît bel et bien comme une intellectuelle empêchée, une révolutionnaire de salon qui ne prendra guère de nouvelle Bastille si elle s’entête à ne pas aller au fond des problèmes qui sont la réalité quotidienne des français. Pensons au témoignage du professeur de philosophie de Trappes, Didier Lemaire, ayant désormais « une cible sur le dos » -si, si, nous sommes pourtant bien en France-, qui explique que des pans entiers de territoire ne sont plus régis par les lois de la République mais par la loi islamique.

Prenons cependant le meilleur du livre de Polony et gageons qu’elle saura se déciller totalement un jour. La guerre civile -voir les derniers évènements à Lyon et sa banlieue, et ce qui se passe partout en France toute l’année- de moins  en moins larvée devrait selon toute logique l’y aider.


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