La beauté sauvera le monde - Incarnation
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Mode et modèle ont la même racine, considérer une chose par la médiation d'un modèle est la considérer en préservant son unité (en termes actuels scientifiques, c'est la considérer en tant que boite noire). C'est aussi la considérer du point de vue de l'efficience, sous l'angle empirique de l'action sur l'objet. La démarche du modélisateur présuppose un penchant pour le réalisme en ce que naturellement il identifie vérité de l'objet, certes relative, et action efficace sur celui- ci. Résultat qui est le signe d'une compréhension intime mais non absolue de l'objet observé. Il est bien accepté dès l'origine qu'un modèle n'est pas la vérité absolue de l'objet inatteignable par essence. Il est une simplification dont la légitimité procède de sa pertinence traduite en acte.
La complexité de l'objet pris en tant que tel dans son unité fonctionnelle excède en général les possibilités cognitives, intellectuelles, et mémorielles (du point de vue des connaissances établies et mises en œuvre) de l'homme. Le propre des paramètres observables est d'être indépendants par essence les uns des autres, il le faut pour pouvoir les mettre en équation. Ils interagissent au sein de la structure étudiée mais gardent leur autonomie intrinsèque et au regard des possibilités cognitives et expérimentales de l'observateur. Il en est ainsi de pression, température, volume pour un réacteur chimique. A titre d'exemple, pour investiguer le phénomène complexe de la couleur, on dispose des couleurs primaires dont l'œil est équipé de cellules correspondant à ces trois fréquences dans la gamme du visible, la perception des couleurs et des nuances reste opaque. Mais au moins on connait ces paramètres. Si on considère le phénomène comme une boîte noire qui a sa propre unité, dans ce cas, sur le plan épistémologique, la notion de paramètre indépendant s'identifie avec celle de mode. Ainsi nous posons que les trois modes de l'être sont le vrai, le bon l'harmonieux.
- Le vrai en ce que tout étant a son ordre interne, statique pour le minéral, dynamique pour le vivant et pour le cosmos organisé par le champ de gravité et le mouvement des astres. Le vrai est de l'ordre de l'information, de l'intelligible et de l'apollinien. Ce premier concept se recoupe avec les causes formelles et matérielles d'Aristote, tout étant contient une intelligence. On peut citer l'ADN à titre d'exemple.
- Le bon est le principe vital qui fait que tout étant se perpétue en sa forme ou évolue au lieu de se décomposer. Le bon est de l'ordre de l'énergie. Soit dit en termes humains, de l'émotion, de l'instinct et du dionysiaque, du vouloir vivre. Bonne aussi est l'énergie du lien qui maintient au niveau atomique chaque chose dans sa forme et aussi c'est un cadeau qu'il y ait quelque chose plutôt que rien. Ce second concept se recoupe avec la cause motrice d'Aristote. On identifie ainsi dans l'empirisme les essences de Platon et les causes d'Aristote. On peut tenir pour paramètres indépendants l'énergie et l'information qui se rencontrent est sont indissociablement et harmonieusement insérés au sein de la matière. L'incarnation est ici considérée empriquement dans son unité volontairement préservée, option intellectuelle ou l'on s'abstient un instant de séparer l'esprit et la matière. A cet égard la fameuse équation E=MC2 crée un lien indissoluble entre énergie, connaissance en tant que lumière et matière.
- L'harmonie correspond à la cause finale d'Aristote, elle est son observation la plus subtile et mystérieuse. De fait l'explication de la vie nous échappe, le passage du connu de la matière et de la forme à l'infinie complexité du vivant excède nos possibilités de connaissance humaine. De fait la vérité en tant que cause finale est immanente. Même contrariée et présente négativement "en creux", elle est au début et à la fin de tout processus, elle est hors du temps.
Si la cause finale nous échappe, par contre, il est à noter que le cerveau est lui aussi triplement équipé : rationalité, émotion et sens, sens pris en tant que traitement de l'information, mise en forme harmonieuse. On peut y voir, à nouveau, dans cette trilogie cognitive et cérébrale, les trois modes de l'être version espèce humaine. Le vrai, le bon et l'harmonieux correspondent à trois formes d'intelligence (rationnelle émotionnelle, les sens soit le cognitif pur pré- verbal), trois modes de fonctionnement cérébral intrinsèquement autonomes. Possiblement et par essence indépendants les uns des autres mais qui interagissent le plus souvent. A titre d'exemple, le bien en tant que morale est une interaction du vrai et du bon, le sentiment également. L'intuition met en jeu ensemble le rationnel, l’émotionnel, les sens en tant que fait cognitif en soi que l'on cultive et expérimente dans la mimésis à titre d'exemple. L'intuition n'est jamais totalement déconnectée de la perception.
Husserl cherchait à la suite de Descartes un fondement général des sciences, une "évidence apodictique", à mon sens il s'agit du fait qu'on ne sort jamais de l'empirisme sans le savoir. C'est ce que nous enseigne la corrélation noético-noématique, autrement dit l'étude du rapport sujet objet dans lequel l'objet est aussi envisagé comme miroir des possibilités et des modes de connaitre du sujet. En effet, si on suit Coppens, la possibilité du concept est apparue avec la transformation du corps, le cerveau est et reste à son service. Autrement dit du point de vue du cerveau considéré en tant qu'organe moteur, il est au service de la main qui doit être prolongé d'un outil ou d'une arme pour la survie. De ce point de vue vital nous sommes des singes dégénérés qui ne se suffisent pas à eux même au sein de la nature.
En contrepartie est apparue la possibilité du concept, en bref biologiquement nous sommes des artisans. Si on focalise un instant sur l'utilitarisme nécessaire propre à notre espèce on peut s'en convaincre et partant de là de l'importance de l'expérience esthétique comme mode de connaissance holistique, ce qu'on y perd en efficacité on le gagne en profondeur et en finesse. Au fond corréler par le nécessité vitale la pensée conceptuelle et le corps déspécialisé au regard de la survie fait de l'incarnation le lieu où se rencontrent et fusionnent objet et sujet. L'incarnation peut être prise en tant que telle dans sa totalité sans dualité du corps et de la pensée intimement liés par la nécessité. Dés lors qu'on réalise que, faute d'un corps spécialisé doublé de forts déterminismes ou instincts, donner du sens à chaque chose ainsi que la faculté de concevoir des outils sont des tropismes biologiques l'incarnation devient un concept précis et non plus un vague état de fait.
L'objet humain appartenant au monde en tant qu'il est traversé par la nécessité au cœur de l'exercice de la pensée qui est censée lui appartenir en propre. L'objet humain vu sous cet angle, alterne avec le sujet humain conscient de ses caractéristiques d'espèce. La conscience, que la science ne sait pas localiser dans le corps, est un autre sujet qui pourrait bien procéder de cette non-dualité.
L'incarnation en tant que telle devient concept à coté et sur un plan d'égalité avec ceux de corps et d'esprit, non seulement un état de fait empirique, quand on ne peut plus séparer le corps et la pensée mariés indissolublement par la nécessité. Ainsi de ce point vue du rapport nécessaire entre pensée et corps on s'abstrait un instant du dualisme sujet objet.
La dualité onde corpuscule, à titre d'exemple, donne à la lumière deux natures différentes selon le type d'expérience. Chacune des théories est efficace dans son champ d'expérience mais rien ne se dégage en termes de connaissance de cette contradiction absolue sinon la primauté surplombante de l'empirisme.
Ce qui nous est possible à défaut de connaissance absolue en alternative à celle-ci c'est la contemplation et l'expérience du beau en tant qu'expérience orchestrée et unifiée des sens, du concept et de l'émotion, autrement dit de la totalité du cerveau au contact de la nature. C'est prendre sa place dans le cosmos en utilisant ces outils issus de lui et signes de notre appartenance au dit cosmos. C'est ce que j'ai tenté d'exprimer sous forme poétique.
L'incarnation
seconde version plus poétique
1/6
La nature est l’esprit visible,
l’esprit la nature invisible.
La matière est le verbe d’amour du divin.
Le concept, étincelle divine adaptée à notre main.
2/6
Notre essence, être artisan laborieux.
La main dans la tête saisit, conçoit, synthétise.
Vrai bon et harmonie orchestrés, le beau actualise,
le trine discernement sépare monde et chaos,
comme l'huile se sépare de l'eau,
triple sens indissociable, sépare fond et forme promise,
hors du temps, discernent les yeux.
Autre nom de l’entendement, discernement est un don des cieux.
3/6
Espèce manuelle sans spécialisation, appréhension,
préhension nécessitent sens et compréhension.
La vérité n'est pas possession,
lâcher prise et du lest pour l'élévation,
le silence précède le son,
être ou exister, telle est la question.
4/6
La forme accomplie de l'artiste porte le sens.
Tel l'enfant et la rose innocente.
Quand la fleur s'ouvre au temps radieux.
En tout temps et en tout lieu.
Elle seule enchante les sens,
amène notre monde propre à la conscience.
Ananké, les forces de la nécessité font loi même aux dieux,
vérité, bonté et harmonie ensemble commandent aux cieux.
Ensemble elles engendrent beau et juste aux deux sens.
Le concept est matière, à l'image du double mot matière,
la beauté tout comme la vie est entière.
5/6
La beauté n'est pas un concept c'est sa beauté,
quand les sens, le coeur et l'idée sont en cohérence,
elle apparaît à la conscience subtile.
Volonté et verbe mariés ensemble dans le sensible engendrent conscience.
Pour s'écouler l'énergie de vie désire son verbe choisi,
comme le fleuve, son lit, ses berges fleuries.
L'égo est un mot chargé de valeur et d'envie.
Il en oublie souvent sa source infinie.
6/6
Autrement que son alter ego le concept encensé,
dans le silence de l'ego déconcerté, la beauté fait sens.
En toute chose, il nous faut trouver la beauté après l'essence.
Le vrai est matière et forme, le bon moteur invincible, l'harmonie finale.
De toute création, par trois modes du sens indivisible, voilà l'arôme ancestral.
L'eau s'écoule, de la source invisible, le beau est symptôme initial.
De tout amas d'atomes, l'en soi indicible est sa juste idée banale.
Le beau symbole, objet sensible, est sujet en nous tel un cheval.
Le beau est irréductible à ses modes, être présent imprévisible un et total,
image visible en tout étant de l'être invisible primordial.