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Rencontre avec Félicie Vignat, peintre

Rencontre avec Félicie Vignat, peintre

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Propos recueillis par Maximilien Friche

Rencontre avec Félicie Vignat, peintre Dans son souci de révéler l’existence d’un art véritable, au delà de l’art conceptuel subventionné, MN rencontre régulièrement des peintres pour les faire sortir des « grottes » dans lesquelles la société aime les laisser peindre. MN aimerait voir achevées les « années noires de la peinture ». Après Lionel Borla, François-Xavier de Boissoudy, et Mathieu Iquel, c’est au tour de Félicie Vignat de nous faire découvrir son travail. Peintre depuis 15 ans à Toulouse, Félicie Vignat a accepté de répondre aux questions de MN.

MN : Au premier regard, on ne pourrait dire véritablement si vos peintures sont abstraites ou la représentation d’un réel. En insistant son regard, la question ne fait que s’épaissir. Il nous semble voir tantôt ce qu'il reste sur un sol, une matière, après le vent, ce qu'il reste après la mer. Les traits soulignent les couleurs, les dessinent, comme les rides sont la marque d’une histoire, les contours d'une narration. Êtes-vous à la recherche des traces, d’indices ? Voulez-vous mettre celui qui contemple en quête ? On voit plein de choses en fulgurance dans vos peintures, puis plus rien véritablement quand on se fige devant. On reconnaît, on recompose, on imagine un point de vue, une simplification efficace du réel opérée par l’artiste, une mise en scène particulière. L'abstraction n'est-elle qu'une illusion ?

FV : Quand je peins, je pense rythme, ligne, composition, équilibre, lumière, matière et émotion… le peintre est comme un chef d’orchestre qui doit allier toutes ces composantes et ainsi offrir une œuvre cohérente. Ma peinture aujourd’hui se situe dans l’abstraction, en effet je ne tente pas de re-présenter la réalité telle qu’elle se présente devant moi, mais je recherche plutôt dans l’acte de peindre ces moments si précieux qui nous relient au monde qui nous entoure, ces instants peuvent se traduire par un geste, une couleur, une matière. Je ne contrôle pas tout, je ne réalise pas d’esquisses, je pars de la page blanche, c’est la peinture qui me guide, un geste en appelle à un autre, une couleur se lie à une autre… la peinture fait appel à sa propre émotion, son énergie, elle est à la fois concrète par sa structure et instinctive.

Je peins ce que je dois peindre, tout en cherchant mon propre vocabulaire, une toile naît d’une autre toile et en appelle à une autre… l’histoire se tisse au fil des jours, parfois il existe des ruptures, alors pour s’en sortir il faut chercher de nouvelles portes à ouvrir, de nouveaux horizons. Pour moi la peinture, c’est comme la poésie, l’histoire n’est pas linéaire, les mots sont des couleurs, les rythmes des gestes… Une couleur, une ligne ou une forme peut servir de point de départ… une toile se construit au fur et à mesure des passages, des recouvrements ou des griffures… elle peut surgir d’un geste ou d’une longue maturation… chaque œuvre est unique et porte une histoire différente.

Pour répondre à votre question, je ne cherche pas la représentation du réel, je n’essaie pas non plus d’imposer au spectateur une seule vérité, je ne fais que peindre simplement ma propre histoire que je ne connais pas encore, peut être la quête de l’essentiel, sans oublier le plaisir immense que procure la création. L’abstraction est peut être qu’une illusion comme l’est la réalité, personne ne voit le même paysage, notre perception est différente selon les moments de notre vie. Aussi chaque spectateur lira un tableau selon sa propre histoire et son évolution personnelle.

Vignat

MN : Nous constatons dans votre travail récent une certaine évolution par rapport aux toiles des années précédentes, Les formes élémentaires aplaties ont fait places aux lignes. Les plans horizontaux nous font entrer en profondeur dans le tableau, nous mette dans un mouvement de fuite. Cherchez-vous à multiplier les horizons ? Est-ce pour montrer que notre regard est fait pour l'infini ? Est-ce l'infini que vous tentez de convoquer dans vos toiles ?

FV : Mon travail est en perpétuelle évolution (je ne vous ai présenté que quelques années de peinture, car au commencement mon travail était plus figuratif). Il est vrai que récemment je suis revenue aux lignes pour ré- ouvrir mon espace, le travail est moins dans la matière mais plus dans la fluidité des formes pour un peu plus de mouvement et de liberté. Quant aux couleurs je travaille essentiellement dans la subtilité des gris (gris bleu… gris vert…), ce qui me permet de ne pas trop me perdre dans des couleurs très fortes qui ne me réussissent pas toujours. Le noir est une couleur qui revient souvent, elle me permet de jouer sur les contrastes et de structurer l’ensemble.

Est-ce que je tente de définir l’infini ?… Je tente d’autres horizons, d’autres possibles… d’autres aventures singulières …parfois je peux puiser mon inspiration sur des peintures plus anciennes, à d’autres moments je me lance sur l’inconnu et je peux être surprise moi-même de ces nouveaux changements. MN : Vos couleurs sont parfois maltraitées, grattées. Est-ce pour en faire de la matière ? Qu’est-ce que peindre au final, quel est le matériau essentiel du peintre : la couleur, la matière, la lumière ? Comment articulez-vous ces trois éléments entre eux ? Comment vous servez-vous de chacune de ces composantes ?

FV : Je ne pense pas que mes couleurs soient maltraités, mais je ne les utilise presque jamais pures sorties du tube, je prends soin de les préparer à partir du pigment, je peux alors choisir la consistance de la pâte et ainsi mélanger intuitivement les couleurs ensemble pour plus de subtilités.

Pendant quelques années, j’ai essentiellement travaillé les matières en utilisant des formes sobres et structurées, le résultat était plus frontal, mais il est difficile de tout exprimer dans le même temps… richesse des matières, des couleurs et de la lumière. Hier, je travaillais sur la matière, aujourd’hui sur la lumière, les couleurs s’inscrivent alors naturellement…demain ma quête se portera peut être sur un autre support.

La création est difficile à exprimer concrètement, elle est à la fois simple et complexe. La création est un regard, un questionnement personnel, on peint sa propre histoire individuelle ou collective. Pour moi la création est vitale, ce sont des moments de grande joie malgré les doutes et la complexité de réaliser cet art dans une société souvent hostile face aux créateurs et à leur utilité.

Vignat

Prochains événements de Félicie Vignat :

  1. 68ème Salon des Réalités Nouvelles, Parc Floral de la ville de Paris, exposition du 19 au 26 Octobre 2014, vernissage le 18 Octobre de 18h00 à 20h00.
  2. "L'Art dans le ruisseau", 6 rue des vignes, 11200 Conilhac-Corbières, Samedi 19 et Dimanche 20 Juillet 2014.

Plus d’info : www.felicievignat.com


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