Découvrez la collection Mauvaise Nouvelle, aux Éditions Nouvelle Marge.


Fontaine Wallace, une ironie consolatrice

Fontaine Wallace, une ironie consolatrice

Par  

Vingt ans après Superflu, nous découvrons que nous n’avons pas vieilli, en tous cas nos oreilles et ce qui vibre en dedans. Une chance que le dessin des rides devienne doux sous la voix de Nicolas Falez. Il jette le voile de sa voix sur nous pour nous bercer dans l’illusion d’une éternelle jeunesse. Superflu ? C’était trois albums : Et puis après on verra bien (1998), Tchin Tchin (2000) et La Chance (2007). Après plus de vingt ans de silence, qui fut sans doute synonyme d’élan pour lui, Nicolas Falez revient avec un album-groupe, un projet, nommé Fontaine Wallace. Ils n’ont pas vieilli, la vieillesse est un leurre. Il rêve encore. Nicolas Falez est entouré de Cécile Béguery (basse), Fabrice de Battista (claviers) et Ludovic Morillon (batterie). Strict minimum, strict nécessaire pour charmer. Rien ne peut nous écœurer là-dedans, rien de gras, rien de vulgaire. Juste un chanteur et son chœur soyeux qui racontent sa banalité au rythme de la galère. Voilà une berceuse pop, une berceuse pour adulte. Si vous êtes habitués à ce qui fait le buzz, vous passerez à côté. Pas grave. Fontaine Wallace me fait penser à ces chanteurs de métro que personne n’écoute et qui semblent s’épanouir dans l’indifférence. De toute façon, il y a trop de chanteurs, il le dit lui-même. Autant partager avec ceux qui tendent l’oreille ce sentiment d’être surnuméraire. Si on veut être vrai, on ne peut que s’excuser de se prononcer pour rappeler que la vraie existence ne peut être qu’à l’image de celle des anges, discrète.

Nicolas Falez traîne sur quelques syllabes, sans effet de voix, sur la retenue. Sa nonchalance est générosité. Chanter, c’est comme parler, pourquoi être un autre ? Il n’a personne à imiter. C’est la voix ordinaire de nos vies cachées que nous entendons. La musique et la voix forment notre semblable en chanson, notre reflet. On se reconnaît par hasard, comme ceux qui se voient par de là le temps agir et qui parviennent à se faire pitié. Que nous raconte-t-il ? La banalité de nos vies, les no man’s land, l’absurdité du quotidien à perpétuité, notre urbanité qui se passe si bien de nous. Et l’alchimiste Falez transforme cet ordinaire en poésie. On se raconte des souvenirs pour lesquels on ne peut avoir que de la tendresse. Toute la vie finit par se dire à l’imparfait. Pas de remords néanmoins, pas de combat. Il révèle l’absurde et en sourit. Chirurgien des agonies, Général des défaites, Joueur d’échecs. Il révèle l’ironie du sort et nous console. Inutile de se plaindre, la tragédie est indissociable de la vie. Sa lucidité est sans agressivité. L’annonce de la mauvaise nouvelle se susurre chez Fontaine Wallace, elle se murmure, se reçoit au creux de l’oreille. Souviens-toi qu’il y a trop de chanteurs. Et trop de discours sur les chanteurs aussi. Ces mots on les a déjà dits ; Cet amour on l’a déjà fait. Alors qu’est-ce qu’on fait ? On se prolonge ? On savoure les mélodies simples et efficaces, cette douce chaloupe entêtante. On danse bien sûr, surtout avec le haut du corps, on marche au rythme de la galère du batteur pour mieux épouser la berceuse. Nous savons désormais que l’ironie peut être consolatrice, nous en avons la preuve avec cet album de Fontaine Wallace.


Le Sud, lieu mythique puis de désenchantement de Victor Erice
Le Sud, lieu mythique puis de désenchantement de Victor Erice
Jorge Luis Borges à l’écran argentin
Jorge Luis Borges à l’écran argentin
La Vallée Close de ? Jean-Claude Rousseau
La Vallée Close de ? Jean-Claude Rousseau

Commentaires


Pseudo :
Mail :
Commentaire :