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Iran, le pays des Roses noires – 29 mai 2015

Iran, le pays des Roses noires – 29 mai 2015

Par  

Carnet de bord de Luc Le Garsmeur en voyage en Iran – Jour 14
vendredi 29 mai, Qazvin, Téhéran

Marc et moi visitons brièvement Qazvin ce matin, contre laquelle mon compère a de fortes préventions. Nous avons pris des goûts de luxe et ce n’est certes pas la plus jolie ville d’Iran. Il lui faut par ailleurs à nouveau des cartes postales qu’il trouvera plus aisément à Téhéran. Les Iraniens n’en écrivent pas, et en vendent peu.

Veille de la fête de la Révélation

À Qazvin, un palazzo porte le nom d’Ali Qapu, comme à Ispahan, et un autre celui de Tchehel Sotoun - Bist Sotoun “Vingt colonnes” serait plus approprié. L’église arménienne est malheureusement fermée, mais l’église russe (bordj-e Naghus) visiblement désaffectée, laisse voir la tombe d’un pilote de cette nationalité ; il y a sans doute eu des accords militaires d’ampleur entre Russie et Perse au tournant du siècle puisque le père de Rezâ Châh Pahlavi était un officier de cosaques. Nous vaguons ensuite à travers le bazar et jusque dans la mosquée Nabi Châh, qâdjâr mais de style néo-moghole. Il s’y trouve nombre de soldats dépenaillés et dépareillés en ce vendredi, veille de la fête de la Révélation (de l’ange Gabriel à Mahomet) qui plus est. Ils sont un peu choqués par notre intrusion involontaire et nous convoquent ou éconduisent, je n’ai pas bien compris. Un gradé me semble un peu apoplectique. Mais un conscrit, au keffieh en bataille et le chapelet islamique à la main, nous indique aimablement la direction de l’aminiha Hosseïnieh. Il s’agit d’une maison xviiie bâtie autour d’une roseraie. Les salons y sont couverts de tapis. Il est singulier que la seule nudité féminine licite en Iran, avec celle du visage, soit celle du pied. Après deux semaines dans ce pays, il semble infiniment plus sensuel que cette fourchette sternale que doit cacher le hedjâb...

Manches courtes non islamiquement correctes ?

Nous ne verrons la porte de Téhéran, relique des fortifications qâdjâres, qu’à bord du taxi qui nous mène à la gare. Nous avions l’intention de prendre le train pour la première fois sur cette courte distance finale. Mais le prochain part dans trois ou quatre heures, et nous prenons finalement un autocar. Je laisse ma place à un vieil homme, console un garçonnet qui s’est cru délogé, et me moque de ma peau pelée aux bras par le soleil. Mon voisin me montre alors ses manches longues et je lui réponds que je devrais porter une vêture islamiquement correcte. Au reste, ces manches sont très courtes et elles pourraient m’attirer des réflexions de la police. Il est interdit à un Iranien de découvrir ses biceps, objet putatif du désir féminin.

Mach’Allah “Au plaisir de Dieu”…

Golchifteh, un contact de Marc, finit par nous retrouver et nous emmène chez son ami monteur de films. Elle travaille elle-même comme marionnettiste pour le cinéma, et souhaite faire de même pour des programmes enfantins à la télévision. Au bordj-e Milad “tour de la Naissance [du Prophète]”, haute de 435 mètres (315, antenne exclue), nous contemplons la ville en contrebas, avant notre dernier dîner iranien. Je découvre un riz farci au bœuf, et non l’inverse, et entreprends d’écumer les points de vente de Bahman, ces fines et mauvaises cigarettes iraniennes. Nous interrogeons Golchifteh sur la condition féminine en Iran. Elle nous explique qu’il est beaucoup plus facile aujourd’hui qu’il y a vingt ans, pour les garçons, de rencontrer des filles. Elle nous mène ensuite chez deux de ses amies, vraisemblablement lesbiennes, qui travaillent également pour le cinéma. L’une d’elles, qui réalise des costumes pour des films islamistes, a fait d’une calotte une sorte de trousse de toilette. Elle nous en offre à chacun un exemplaire. Dans notre dernier taxi, pour l’aéroport Khomeïny, le chauffeur, un architecte diplômé qui vend des toners pour photocopieuses, se lamente de ne pas parler davantage l’anglais. Ma dernière notule est pour nos cartes postales (un emprunt lexical, non effectif, du persan au français), dont un employé d’Iran Air nous dit qu’elles sont insuffisamment affranchies. Il s’offre tout de même à les poster pour nous en ville. Mach’Allah “Au plaisir de Dieu”…


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