D’un radicalisme à l’autre
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La France découvre avec effroi ce qu’il est convenu d’appeler la radicalisation de jeunes français convertis à l’islam. Aussitôt, la machine à prévenir l’amalgame se met en marche. Dounia Bouzar publie un document certes intéressant, mais tellement convenu qu’il mérite un examen plus attentif.
Sur la base des signalements faits par les familles des jeunes « radicalisés », le document tire la conclusion que 20 % de ces familles sont athées, et 80 % sont de souche française et non issues de l’immigration. Histoire de bien souligner que ces jeunes peuvent en effet s’appeler Thomas ou Jules et avoir grandi dans une famille catholique.
Il faut donc observer, comme le fait le document, que ces chiffres décrivent seulement les familles ayant appelé, qui ne constituent pas un échantillon représentatif des familles concernées par ce phénomène.
Dans son souci de ne surtout pas lier islam, immigration et jihadisme, le document va jusqu’à donner une définition instructive de la « radicalisation » : « Sera nommée ici "radicalisme" » un discours qui utilise des préceptes religieux présentés comme musulmans pour mener un jeune à l’auto-exclusion et à l’exclusion de « tous ceux qui ne sont pas comme lui. ».
Ouvrir un dictionnaire suffit à se rendre compte que la notion de radicalisation renvoie aux racines : est « radical » celui qui s’accroche à ce qui est fondamental. Le dictionnaire de l’Académie Française précise : « Pousser à l'extrême, raidir, durcir ».
Or il est peu probable que ce soit en lisant le catalogue de La Redoute que ces jeunes se soient radicalisés. Le document admet du reste que les « recruteurs » se saisissent « d’un "accessoire" lié à l’histoire de l’islam, [l’ôtent] de son contexte et de sa fonction pour l’utiliser aux fins de leur projet apparenté à une idéologie totalitaire. »
Reste à savoir si cet accessoire fait ou non partie de l’islam, et si l’on fait violence au Coran pour le mettre au service d’une idéologie totalitaire. Ainsi, s’il est vrai que « La subtilité et la force des groupuscules radicaux consistent à persuader musulmans et non-musulmans qu’ils ne font que revenir à la source de l’islam. », il faut reconnaître qu’ils y parviennent, et il suffit de se promener sur un site salafiste pour y voir des références constantes au Coran.
S’il y a radicalisation, on gagnerait à s’intéresser aux racines, et pas seulement en termes sociologiques. Dans les temps où la France était davantage chrétienne, les jeunes désoeuvrés qui découvraient l’Evangile et décidaient de le vivre dans toute sa radicalité s’appelaient Charles de Foucault, par exemple. Le très radical Maximilien Kolbe ne décide-t-il pas d’entrer dans le « bunker de la faim » à la place d’un prisonnier père de famille ? La radicalité évangélique consiste à « donner sa vie pour ceux que l’on aime » (Cf. Evangile de st Jean, 15,13). Trouve-t-on de telles racines dans le Coran ?
Un exemple frappant de l’angélisme de ce rapport est le traitement de la notion de « taqiyya », qui signifie tromperie et dissimulation ou, comme dit le rapport : « Se faire passer pour de simples musulmans orthodoxes pour bénéficier du droit à la liberté de conscience garantie dans les états démocratiques laïques. »
Le Coran (3 :28) dit ceci : « Que les croyants ne prennent pas pour alliés des infidèles au lieu de croyants. Quiconque le fait contredit la religion d'Allah, à moins que vous ne cherchiez à vous protéger d'eux ».
L’islamologue Raymond Ibrahim a montré dans plusieurs publications combien, au contraire, cette idée de dissimulation est importante dans l’enseignement de Mahomet et des chefs religieux. Elle implique notamment que nous devons rester vigilant, puisque le Coran permet au musulman de considérer comme bon tout ce qui est favorable à l’islam, et comme mauvais ce qui lui est défavorable.
Si l’islam radical est meurtrier, ne faut-il pas s’en prendre à sa racine ? Et quelle est sa racine, sinon le Coran ? Celui-ci n’affirme-t-il pas (47 :4) « Lorsque vous rencontrez (au combat) ceux qui ont mécru frappez-en les cous. Puis, quand vous les avez dominés, enchaînez-les solidement. Ensuite, c'est soit la libération gratuite, soit la rançon, jusqu'à ce que la guerre dépose ses fardeaux. » Cette notion de « frapper au cou » nous est familière, de même qu’est évocateur ce passage terrible (8 :57) « Donc, si tu les maîtrises à la guerre, inflige-leur un châtiment exemplaire de telle sorte que ceux qui sont derrière eux soient effarouchés. Afin qu'ils se souviennent. »
Le Coran n’est pas un livre qui raconte une histoire, avec des allégories, comme peut l’être la Bible, mais un texte juridique, qui légifère sur ce qu’il faut faire pour marcher « dans le sentier d’Allah ».
Le document ne manque pas de rappeler que, même dans le monde chrétien, des meurtres sont commis au nom du Christ. Un bref examen des textes permet tout de même de discerner :
Il suffit en effet d’ouvrir le Nouveau Testament pour s’apercevoir que le Christ sait la violence qui habite l’homme, et s’emploie sans cesse à la désamorcer.
Ainsi devant ceux qui envisagent de lapider la femme adultère, devant saint Pierre tirant son épée, devant les provocations de Pilate, le Christ enseigne par son exemple. La clé des Evangiles est l’amour, dont il est dit qu’il surpasse toute connaissance.
Les textes de l’islam, qu’il s’agisse du Coran ou de tous les textes additifs, énoncent des règles juridiques qu’il s’agit seulement de connaître pour les appliquer. Il n’y a pas d’amour là-dedans : le Coran se rattache au fond à la gnose, cette idée que c’est la connaissance qui sauve. Informé de la volonté divine exprimée dans le texte sacré, le croyant est sauvé par une connaissance dont il n’a pas la compréhension, car rien ne vient surpasser cette connaissance.
C’est là sans doute une des clés pour comprendre son emprise sur des jeunes en perdition : il offre un ensemble de règles très claires à sa vie, sans exiger de lui qu’il fasse usage de sa réflexion. Ici les analyses du rapport de Dounia Bouzar sont très intéressantes, à condition de comprendre que nous allons à l’échec tant que nous ne serons pas capables d’aimer notre propre culture et de la transmettre sans nous excuser sans cesse.
Au radicalisme, nous ne pouvons qu’opposer nos propres racines, et nos racines sont chrétiennes.