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Nous sommes des nains

Nous sommes des nains

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A contrario des gastéropodes qui attendent les larmes du ciel, avez-vous remarqué comment l’homo digitalis grouille lorsque le soleil pointe enfin le bout de ses rayons après un hiver… hivernal ?

Sacrifiant à cette tradition, habilement couplée aux vacances scolaires, nous avons récemment eu la chance de nous promener en famille sur les bords de Loire. Dans ce territoire marqué par l’Histoire, comment ne pas faire halte à l’ombre émerveillée des châteaux tutélaires qui en parsèment les côteaux ? Comment ne pas se sentir petit face à ces orgueilleux édifices ? Comment ne pas se sentir héritier de cette Histoire de France inscrite dans la pierre ?

Vraisemblablement, beaucoup parmi nos contemporains ont trouvé réponse à ces questions qui arpentent ces chemins de rois en jacassant, appareils photos égocentriques à bout de perches, chewing-gum à la bouche et claquettes aux pieds… Pour que leur visite soit ludique, les organismes de tourisme fourmillent d’idées et voici par exemple qu’un moine et une noble dame leur débitent un peu d’Histoire dans un brouet de fariboles et d’allusions grivoises. On rit, on s’applaudit et on passe à la salle suivante commentant la prestation des acteurs…

Le silence retombe sur ce détail que l’on n’a pas vu et qui plus que le bâtiment lui-même nous dit l’amour du bel ouvrage. Ce manteau de cheminée sculpté, cette charpente si bien agencée, cet escalier tissé en dentelle de pierre, ce vitrail chamarré… Or notre héritage tient autant de la gloire de nos rois et seigneurs que de cette patience artisane, de cette transmission du maître à ses disciples, de ce génie enrichi par chaque génération de tâcherons.

Loin des babilles de ce jour, loin d’une société enivrée de son propre plaisir et rassasié de son divertissement, nos ancêtres connaissaient le prix du travail et savaient en respecter l’auteur. La transmission du savoir se faisait par l’esprit et par les mains. L’apprentissage du beau et du labeur bien accompli était une noble voie. Ils savaient bâtir pour défier les siècles ; nous, nous réfugions dans le virtuel. Ils transformaient leurs rêves en pierre quand nous bâtissons de sable numérique. Ils étaient d’une race de seigneurs quand nous sommes des nains.

Pour peu qu’on les écoute, ces pierres ont beaucoup à nous dire. Encore faudrait-il que nous sachions encore les comprendre.


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