Pourquoi les armes chimiques sont différentes
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Pourquoi les armes chimiques sont différentes
Par Guillaume de Mazalle
29 septembre 2013 20:00
Les armes ne sont, en règle générale, pas illégales par essence pourvu que leur utilisation soit légitime. Au contraire, l'utilisation d'armes conventionnelles peut parfois être condamnable. Chacun aura entendu çà et là quelqu'un ne pas comprendre que les puissances occidentales ne s'offusquent des massacres en Syrie qu'à partir du jour où les armes chimiques ont été engagées. Évidemment, les massacres précédents étaient déjà moralement répréhensibles, et condamnables devant la Cour Pénale Internationale, du fait de l'utilisation de moyens militaires contre des civils. Toutefois, il faut bien comprendre que ce n'est pas la nature de l'utilisation des armes chimiques qui les rend condamnables, mais la nature de ces armes elles-même. Ce n'est pas un hasard si la quasi totalité des États du monde a décidé de les bannir.
Contrairement aux armes balistiques, le gaz ne permet pas de cibler une attaque : le gaz méconnaît militaires et civils, et les soldats entre-eux. L’Histoire nous enseigne d'ailleurs les difficultés d'utilisation de ces gaz pendant la Première Guerre mondiale, où les vents contraires ou tourbillonnants ont parfois causé de très mauvaises surprises à qui les lançait.
Les armes chimiques se distinguent également par leur qualité d'arme de destruction massive. En effet, s'il est possible de tuer de façon quasi industrielle avec d'autres armements, cela peut être long. L'augmentation toujours plus rapide du nombre de victimes de la guerre civile syrienne en porte témoignage. En outre, sur le plan militaire et avec un certain cynisme, une arme destinée uniquement à tuer, comme c'est le cas pour une arme chimique, ne réduit le nombre de combattants adverses que de 1 pour 1 mort, alors qu'un soldat blessé et qu'il faut soigné immobilise 4 à 5 adversaires. C'est dire que l'utilité militaire du gaz de combat est minime.
D'aucuns nous feront sans douter remarquer que jusqu'à il y a peu, aucune grande puissance n'élevait la voix contre la possession d'armes chimiques par Damas. C'est vrai, mais cela précisément parce que les grandes armées avaient théorisé l'avantage militaire minime de ces armes face au tollé que leur utilisation provoque. Dès lors, les armements chimiques étaient placés sur le même plan que le nucléaire : une arme de dissuasion, une arme de "non-emploi". La doctrine militaire prohibe tout rôle tactique, c'est-à-dire sur le terrain, et lui réserve un rôle stratégique pour préserver en dernier ressort l'intégrité nationale ; la décision de son utilisation repose donc sur un choix politique et non militaire. À ce titre, et pour continuer le parallèle chimique-nucléaire, les missiles nucléaires français de faible portée ne sont pas nommés tactiques mais "pré-stratégiques", ceci pour souligner qu'ils ne pourraient être utilisés que comme "coup de semonce" avant une éventuelle attaque plus massive, et en aucun cas pour avoir une efficacité directe sur le terrain.
C'est d'ailleurs à ce rôle de dissuasion qu'Hafez El-Assad, le père de l'actuel dirigeant syrien, avait cantonné son arsenal chimique : inutilisé bien qu'existant, pour éviter tout risque d'une attaque de grande ampleur d'Israël. Les armes chimiques étaient à cette époque "l'assurance-vie" du régime syrien, le nucléaire du pauvre.
De premiers mouvements autour des arsenaux chimiques avaient été observés dès l'été 2012, laissant penser aux services de renseignements français et américain que le régime baasiste envisageait le recours aux armes chimiques pour instaurer un climat de terreur. Tout change au printemps 2013, des images prises à haute altitude montrent un hélicoptère du régime larguer des munitions diffusant une fumée blanche, usage tout à fait inédit de ces armes. La conclusion est alors évidente pour les experts occidentaux : les armes chimiques ont changé de nature aux yeux de Damas et deviennent un moyen d'imposer sa supériorité sur le terrain.
L'exécution des ordres d'engagement des armes chimiques est naturellement confiée aux troupes les plus fidèles, notamment la garde présidentielle dirigée par le frère de Bachar El-Assad. Les techniques d'utilisation des gaz doit être parfaitement maîtrisées, au risque que l'agent chimique soit arrêté par les bronches ou trop vite dispersé dans l'air, elle le seront. L'attaque est dévastatrice.
Une chose est sûre, que cette manière d'agir soit le fruit de l'imagination de l'État-Major syrien, ou de ses alliés russes, nord-coréens ou iraniens, il y a fort à parier que cette technique de combat ne sera pas longue à être partagée entre ces régimes. L'Iran a peut-être déjà des armes de destruction massive en sa possession…
La faible utilité militaire
Contrairement aux armes balistiques, le gaz ne permet pas de cibler une attaque : le gaz méconnaît militaires et civils, et les soldats entre-eux. L’Histoire nous enseigne d'ailleurs les difficultés d'utilisation de ces gaz pendant la Première Guerre mondiale, où les vents contraires ou tourbillonnants ont parfois causé de très mauvaises surprises à qui les lançait.
Les armes chimiques se distinguent également par leur qualité d'arme de destruction massive. En effet, s'il est possible de tuer de façon quasi industrielle avec d'autres armements, cela peut être long. L'augmentation toujours plus rapide du nombre de victimes de la guerre civile syrienne en porte témoignage. En outre, sur le plan militaire et avec un certain cynisme, une arme destinée uniquement à tuer, comme c'est le cas pour une arme chimique, ne réduit le nombre de combattants adverses que de 1 pour 1 mort, alors qu'un soldat blessé et qu'il faut soigné immobilise 4 à 5 adversaires. C'est dire que l'utilité militaire du gaz de combat est minime.
De l'utilité stratégique
D'aucuns nous feront sans douter remarquer que jusqu'à il y a peu, aucune grande puissance n'élevait la voix contre la possession d'armes chimiques par Damas. C'est vrai, mais cela précisément parce que les grandes armées avaient théorisé l'avantage militaire minime de ces armes face au tollé que leur utilisation provoque. Dès lors, les armements chimiques étaient placés sur le même plan que le nucléaire : une arme de dissuasion, une arme de "non-emploi". La doctrine militaire prohibe tout rôle tactique, c'est-à-dire sur le terrain, et lui réserve un rôle stratégique pour préserver en dernier ressort l'intégrité nationale ; la décision de son utilisation repose donc sur un choix politique et non militaire. À ce titre, et pour continuer le parallèle chimique-nucléaire, les missiles nucléaires français de faible portée ne sont pas nommés tactiques mais "pré-stratégiques", ceci pour souligner qu'ils ne pourraient être utilisés que comme "coup de semonce" avant une éventuelle attaque plus massive, et en aucun cas pour avoir une efficacité directe sur le terrain.
C'est d'ailleurs à ce rôle de dissuasion qu'Hafez El-Assad, le père de l'actuel dirigeant syrien, avait cantonné son arsenal chimique : inutilisé bien qu'existant, pour éviter tout risque d'une attaque de grande ampleur d'Israël. Les armes chimiques étaient à cette époque "l'assurance-vie" du régime syrien, le nucléaire du pauvre.
Tout bascule
De premiers mouvements autour des arsenaux chimiques avaient été observés dès l'été 2012, laissant penser aux services de renseignements français et américain que le régime baasiste envisageait le recours aux armes chimiques pour instaurer un climat de terreur. Tout change au printemps 2013, des images prises à haute altitude montrent un hélicoptère du régime larguer des munitions diffusant une fumée blanche, usage tout à fait inédit de ces armes. La conclusion est alors évidente pour les experts occidentaux : les armes chimiques ont changé de nature aux yeux de Damas et deviennent un moyen d'imposer sa supériorité sur le terrain.
L'exécution des ordres d'engagement des armes chimiques est naturellement confiée aux troupes les plus fidèles, notamment la garde présidentielle dirigée par le frère de Bachar El-Assad. Les techniques d'utilisation des gaz doit être parfaitement maîtrisées, au risque que l'agent chimique soit arrêté par les bronches ou trop vite dispersé dans l'air, elle le seront. L'attaque est dévastatrice.
Une chose est sûre, que cette manière d'agir soit le fruit de l'imagination de l'État-Major syrien, ou de ses alliés russes, nord-coréens ou iraniens, il y a fort à parier que cette technique de combat ne sera pas longue à être partagée entre ces régimes. L'Iran a peut-être déjà des armes de destruction massive en sa possession…