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Guerre à la fessée !

Guerre à la fessée !

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Le débat sur l’interdiction de la fessée fait partie des marronniers du modernisme à l’œuvre dans la société occidentale. Il revient régulièrement pour montrer qu’il y a encore des combats importants à mener y compris dans nos sociétés jouisseuses et permissives pour le triomphe complet de l’humanisme. Un ensemble de biens pensants s’indigne aujourd’hui et prend appui sur une troupe d’experts en psychisme pour donner un pedigree scientifique à leur idéologie à la fois libertaire et liberticide. Une campagne télévisuelle contre les «violences éducatives ordinaires», lancée par la Fondation pour l'enfance (1) à partir du jeudi 28 avril sera diffusée sur toutes les chaînes et sur le Web à l’occasion de la Journée internationale contre les violences éducatives programmée le samedi 30 avril 2011. Cette campagne se veut choc. Montrer au pékin comment il peut dans sa vie ordinaire, sa vie cachée et triviale, avoir les gestes d’un monstre. Un peu comme à l’époque, on nous expliquait qu’à partir de trois verres de vin par jour, on n’était qu’un alcoolique. Dans le spot sur la fessée, on voit une enfant de huit ans recevoir une claque de sa mère pour un verre de jus d’orange renversé par maladresse. La grand-mère, au regard doux et triste, qui assiste à la scène, demande alors «pardon» à sa fille. Le message s’affiche alors : «Des parents qui battent ont souvent été des enfants battus. Eduquons sans violence. Ni claques, ni fessées». Réjouissons-nous, il nous reste encore les mots, les gros yeux, les punitions, … pour un temps. Réjouissons-nous et décortiquons la manœuvre en cours. Vidéo ici

La légitimité abolie


Contre le déluge d’experts psychanalystes dont se sont équipés les idéologues anti-fessé, il convient de ne pas se laisser intimider et d’enraciner notre réponse dans le bon sens et nos expériences qui valent au moins autant que les leur. Commençons d’abord par la gifle que nous avons méritée et souvenons-nous à quel point elle a brisé en nous l’orgueil qui nous habitait de façon plus efficace et généreuse que toutes les leçons de morales imaginables. Ensuite prenons soin de définir la fessée comme la marque de la violence légitime, de la légitimité du pouvoir détenu par les parents. Une des habitudes du modernisme est de mettre sur un même plan violence légitime et violence hors la loi, victime et bourreau. Et oh, doucement, il s’agit d’enfants, pas de criminels… Oui et pourtant, le raisonnement est le même. Le spot TV nous montre une gifle légitime mais injuste car donnée à la suite d’un geste uniquement maladroit. Imaginons cette même gifle donnée à la suite d’une insulte proférée à l’encontre de sa mère par un petit gars, au hasard, un truc du type, « tas gueule sale femelle ». Le geste aurait alors été applaudi comme la marque de la légitimité et de la justice. On aurait pu donner dans le vol de portefeuille à un candidat à la présidence de la république en 2007, mais cela aurait été servir la soupe au centre mou. La fessée est l’anti-raisonnement, c’est le 49.3 de l’éducation, c’est le point d’arrêt à la palabre inutile. La perte de légitimité tant désirée par les tenants de l’anti-fessée, ne réglerait en rien le problème de l’injustice, qui seul est le cœur de la mauvaise éducation et qui peut irriguer tout agir éducatif et pas seulement la fessée. Taper à mauvais escient ou parler de travers, ne plus rien hiérarchiser, voilà bien ce qui provoque le dérèglement comportemental de l'enfant.

Le but d’un geste physique n’est pas de faire mal. Assimiler fessée et maltraitance est une insulte à tous les enfants battus. C’est absolument indécent pour les victimes de mettre leur bourreau sur un même pied d’égalité avec les parents ordinaires. Le geste de la fessée est la part visible de la colère. Parce que nous sommes incarnés. On n’aime pas sans embrasser de temps en temps. Et bien, on ne se fâche pas sans délivrer une fessée de temps en temps. La colère est un signe de rupture, de désaccord complet avec l’attitude de l’enfant. Il s’agit d’un retrait temporaire de la bienveillance pour accepter que la fessée rétablisse l’enfant dans son amour. Catherine Dumonteil-Kremer (2) s’insurge du fait que l’adulte abuse de son pouvoir en frappant plus petit que soit, comme s’il y avait une lutte imaginable entre enfant et parent. La fessée n’intervient pas dans un combat, mais comme une sanction. Dans la position des parents depuis la naissance de leur enfant, tout est abus de pouvoir. Le parent et l’enfant ne sont pas au même calibre c’est certain. Et c’est même la raison pour laquelle les mots trouvent leur limite dans cette relation, les mots n’ont pas la même signification contrairement au geste qui est limpide de compréhension. La loi naturelle entre l’enfant et le parent est une loi d’amour et de dépendance, et c’est l’amour qui implique l’éducation

Catherine Dumonteil-Kremer (2), toujours, explique avec une grande pédagogie : « Il (l’enfant) leur (les parents) fait entièrement confiance et une tape va générer chez lui un sentiment d'insécurité. Le frapper, c'est aussi donner l'idée à l'enfant que la violence peut être une solution. » En aucun cas, les contraventions n’ont incité les gens à voler, la prison à séquestrer. Les fessées n’incitent pas non plus l’enfant à être violent. Au contraire, à la vue de casseurs cagoulés en ville, nous pensons spontanément et à raison : « ils n’ont pas reçu assez de fessées. » Que les sauvageons immaîtrisables aujourd’hui ne soient pas éduqués n’est pas un mystère, c’était déjà le constat chevènementiste de la campagne présidentielle de 2002. Jamais nous n’avons eu autant de nuisances, de nocences pour reprendre une expression chère à l’écrivain-candidat Renaud Camus (3), que depuis que les pères ont renoncé à leur autorité, se sont pétris des complexes émasculateurs sous la croupe molle de notre république matriarcale.

Collectivisation de l’enfant


Depuis 2008, le Conseil de l'Europe recommande à ses Etats membres d'interdire fessées, gifles et autres gestes du même genre. Pourrait-on encore tirer les oreilles, ou y apposer une pichenette ? C’est peu probable. En 2009, la députée UMP, enorgueillie de son statut de pédiatre, donc d’experte, Edwige Antier avait déposé une proposition de loi dans le sens de l’interdiction de la fessée. Cette proposition n'a toujours pas été examinée par le Parlement. Il faut dire, qu’entre deux grèves et deux émeutes, ce n’est pas forcément la priorité de notre pays de mal élevés que de lever la main sur la fessée. Sachant que l’on ne parle pas de la protection des enfants maltraités. Les lois existent là-dessus. Elles ont du mal a être appliquées, mais elles existent. La loi supplémentaire que l’on veut faire passer sur l’interdiction de la fessée est la marque d’une idéologie en marche surfant légèrement sur l’émotion des enfants battus. Ce qui sous-tend cette idéologie, c’est que l’enfant appartient à tout le monde, qu’il fait partie du patrimoine commun de l’humanité, un peu comme une planète.

En cas de lois, on imagine très bien les dénonciations des gens à qui on a appris dans un réflexe pavlovien à s’indigner. Imaginons un petit gars de quatre ans en crise, tapant des pieds et des mains au sol d’un supermarché, imaginons le père, qui dans un mouvement brusque l’attrape par le col en usant de sa supériorité physique pour le remettre sur pied. Aussitôt les regards, aussitôt la honte, aussitôt les soupçons, aussitôt la réprobation et l’anéantissement de l’image du père. Il est sans doute extrémiste de songer à une nationalisation de l’enfance. Néanmoins, l’idéologie qui sous-tend l’interdiction de la fessée, est celle là, celle de la nouvelle Sparte. Construire de dociles électeurs de gauche en leur faisant croire qu’ils sont rebelles alors qu’ils ne cessent de justifier le pouvoir en place : Voilà le programme de l’Education Nationale depuis quarante ans. Voilà aussi ce qui veut rentrer dans chaque famille pour maîtriser ce pan de l’éducation laissé à la sphère privée. Et c’est par la judiciarisation des rapports filiaux que l’idéologie consent à pénétrer dans l’intime des familles. Ces rapports qui sont normalement régis par la loi naturelle seront modifiés insensiblement. On obtiendra que des enfants puissent demander réparation à leurs parents pour les fessées reçues plus jeunes. Il n’y aura plus d’impunité pour les dictateurs familiaux, les tyrans ordinaires. Une cour de La Haye pour les abus de pouvoirs familiaux sera créée. On connaît déjà ceux qui réclament le droit à ne pas naître. Et comment voulez-vous que l’on n'ait pas des envies soudaines de distribuer des claques ?

Où commence la violence ? Ce qui crée une rupture commence par vexer l’enfant, que ce soit : privé de dessert, sort de table, va au coin ou tu la vois celle là. Tout est violence du moment que cela contrarie le libre nuire de l’enfant. L’enfant vexé se civilise, commence à prendre en compte l’autre, à mettre les formes nécessaires à la vie en société. Evacuer les moyens de correction de l’enfant comme la fessée, est risquer de ne mettre en œuvre que le type d’éducation correspondant à la moyenne des enfants sans savoir s’adapter à chacun. C’est médicaliser tout comportement qui ne saurait se corriger sous la simple injonction orale de l’éducateur. C’est au final, rendre irrécupérable toute une série d’individus. Irrécupérables comme ces gouailleurs mal vieillis aux crachats chargés, et aux gestes instinctifs. Irrécupérable comme cette racaille indigne de nos fessées… Voilà toute la générosité de nos idéologues. Voilà toute l’épuration suggérée par l’abolition de l’autorité et de sa légitimité à l’intérieur du cercle familial.

Dialectique peace and love


Si l’idéologie sous-jacente au discours d’expert est si facile à débusquer, c’est qu’on la reconnaît à sa dialectique, à la mauvaise foi de ses arguments. Selon un sondage de 2009, 45% des Français voient la fessée comme un outil d’éducation, alors que 52% pensent que c’est un geste à éviter. Déjà l’idée fait son chemin et l’opinion bouge. Aujourd'hui, 80% des parents admettent avoir déjà donné une fessée ou une gifle à leur enfant. Ils n’ont pas encore peur ou honte de l’avouer, mais cela ne saurait tarder, la révolution culturelle est en marche. La marche est lente mais n’a jamais été interrompue depuis la chute des lumières sur le monde. Notre société allant vers toujours plus de gauche, dès lors qu’un sujet se politise d’une façon caricaturale en bien et mal, on ne peut que retarder l’avancée inéluctable du progrès. Qu’on se le dise, le compte à rebours est lancé pour l’interdiction de la fessée en hexagone.

Ecoutons le docteur Lazimi (4), coordinateur de l’opération de communication lancée par la Fondation pour l’enfance : "La loi interdit de frapper un adulte, la loi interdit de frapper un animal, et c'est normal. La loi doit interdire de frapper un enfant". L’angle d’attaque est vicieux puisqu’il y a bien des lois contre la mal-traitance des enfants et que dresser un animal passe parfois par des brimades. Là encore on assimile le père de famille qui donne une fessée au Thénardier qui fait subir des sévices à ses enfants. Là encore on joue sur l’émotion et la culpabilisation. Dans le dossier de presse (5), un tel continuum est établi entre le numéro vert consacré aux enfants battus et les actions militantes contre la fessée qu’il ne peut en résulter qu’un accord implicite et une bienveillance vis à vis de ces tenants du bien contre le mal. Deuxième argument à la mode du coordinateur : seules la France et l'Angleterre n'ont pas légiféré sur le sujet dans l'Union européenne. Si tout le monde l’a fait en Europe, c’est forcément un argument de poids. La première campagne TV et web de prévention des violences éducatives ordinaires a été entièrement élaborée et diffusée gratuitement avec le soutien de l’agence Publicis Conseil. A croire qu’il s’agit vraiment d’une cause prioritaire pour notre pays. A côté la cause pour la prise en compte de la diversité va développer une certaine jalousie.

Supposer que l’homme est par sa nature bon (6) et que la violence légitime de ses parents venant le corriger le pervertit rappelle les plus belles heures de Rousseau et nous rend nostalgiques de l’anti-Rousseau de Joseph de Maistre (7). Si l’homme est naturellement bon, pourquoi même hausser le ton et faire les gros yeux. N’élevons plus nos enfants et laissons-les s’échouer aux bancs de la société, prêts à être internés dans les grands hôpitaux des faiseurs de lois.

Il sera difficile de résister à la mutation culturelle. La fessée sera interdite, la société permettra aux enfants de porter plainte contre leurs parents, aux parents contre les grands-parents, à tout le monde contre les morts, ce sera la guerre généralisée sous la forme de l’abstraction la plus diabolique. Le dernier lien charnel de la société, celui qui existe entre les parents et les enfants sera détruit. Les psychanalistes toucheront bien quelques rétrocessions sur les honoraires des avocats, eux qui ont su persuader leur client que la fessée de leur enfance leur a fait quelque chose quelque part qui est à l’origine de leur psychisme morose de ce jour. Heureusement, la société toujours en quête de faiblesse reconnaîtra la particularité culturelle de certaines communautés et tolèrera que les hommes voilent leurs femmes et que les fils battent leur mère.


A l’age adulte, on aimerait bien parfois recevoir un simple soufflet vexatoire pour quelque chose dont on n’est pas fier, de la part de quelqu’un d’infiniment plus grand, de la part de quelqu’un qui ne serait pas au même calibre que nous et qui nous aime, on aimerait bien bénéficier de cette aide pour nous remettre droit, pour nous conférer une dignité neuve. Mais on n’a le droit qu’aux condescendances tièdes des uns et des autres, aux caresses fourbes, à la tolérance méprisante d’une société qui ne cherche qu’à s’épurer. Si seulement les aïeuls de ces idéologues pouvaient revenir pour les gronder une dernière fois.

  1. http://www.fondation-enfance.org/Une-campagne-choc-qui-va-faire
  2. Catherine Dumonteil-Kremer, Auteur de Poser des limites à son enfant et le respecter, interviewés sur TF1 news le 27 avril 2011
  3. Site du parti de l’in-nocence de Renaud CAMUS
  4. Le monde 27/04/2011
  5. http://www.fondation-enfance.org/IMG/pdf/DOSSIER_PRESSE_27_04_11.pdf
  6. Livre cité dans le dossier de presse : Oui, la nature humaine est bonne ! Comment la violence éducative la pervertit depuis des millénaires (ISBN 978-2-221-10919-9 Robert Laffont, 2009) de Olivier MAUREL.
  7. Contre Rousseau: De l'état de nature – Joseph de Maistre - Fayard/Mille et une nuits - ISBN-10: 2755500522

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