Hollande et Juppé se font des idées
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Le concept est une jouissance intellectuelle qui prend tout son intérêt quand il survient après la contemplation de la réalité, plus ou moins belle certes mais, tautologiquement réelle. Hollande et Juppé prouvent cette semaine, qu’à l’instar des adeptes de l’art contemporain, ils placent désormais non seulement le concept avant toute contemplation de la réalité, mais à la place de la réalité. Les collabos se sont donc laissés contaminer par la dialectique de l’art contemporain.
La réalité de la chute et l’idée qu’ils s’en font
La semaine passée fut la manifestation d’une pénétration de l’esprit de l’art contemporain dans la sphère politique. On a célébré le concept, on s’en est réclamé ! Maurras opposait la France du pays réel et la France du pays légal. Bien sûr cette cassure révolutionnaire a toujours cours et permet davantage de déracinement à chaque génération. Mais nous faisons désormais le constat que le pays légal se vautre dans le concept, s’en réclame et prend l’exercice politique pour une performance digne des meilleurs happenings d’art contemporain. Mais de qui s’agit-il, de qui s’agit-il ? Hollande et Juppé. Mais de quoi s’agit-il, de quoi s’agit-il ? Du discours de campagne déguisée de Hollande d’un côté, et du lancement de l’exposition « tous migrants » à Bordeaux sous le patronage de la bonne gueule d’impôt de Juppé d'un autre côté.
François, dessine-moi la France
De Gaule avait une certaine idée de la France : « Toute ma vie, je me suis fait une certaine idée de la France. Le sentiment me l'inspire aussi bien que la raison. » Cette phrase avait la forme d'une déclaration d'amour du général pour la France et précisait tout au plus qu'il avait un dessein pour elle. Quant à François Mitterrand, concernant la France et les idées, il disait simplement, dans une volonté de donner des gages autant à sa droite intérieure qu'à sa gauche intérieure : « Quand la France rencontre une grande idée, elles font ensemble le tour du monde. » Tout ceci est très beau. Et bien sûr, le président normal, lui, ne peut être qu'une caricature de tout ça. Il va tenter de rependre pour tout gâcher, une habitude désormais quinquennale. Lors de son intervention salle Wagram consacrée à la « démocratie face au terrorisme », intervention qui fut en fait un discours de campagne destiné à s'opposer aux discours identitaires de Sarkozy, le chef de l'Etat a déclaré que la France « était une idée, bien plus qu'une identité ».
Se faire une idée de la France pourrait revenir à adhérer intellectuellement a posteriori à quelque chose de bien réel. Dire à quelqu’un « j’ai des idées pour toi », cela n’a rien à voir avec lui dire « tu es une idée ». Dire à quelqu’un qu’il n’a pas d’identité, qu’il est une idée, est une violence incroyable. D'ailleurs, on peut changer d’idée comme de chemise, beaucoup plus facilement que d’identité. Le déni de la réalité est une œuvre diabolique. Il ôte à l’autre le droit d’exister. C’est même plus fort que le crime. Il serait préférable de dire que la France est morte plutôt que de dire qu'elle est une idée, au moins un cadavre est bien réel. Je me fais des idées ou les socialistes ont un problème avec la réalité ? C'est dire si l'art contemporain est idéal pour pénétrer leur cerveau. Les lendemains qui chantent sont un désir du tout conceptuel, où la France, la planète, l'univers, l'homme ne seraient que des idées comme une autre. Il voudrait faire revenir Dieu au stade du projet… Terminons par l’esprit Camus sur Twitter :
De Gaulle avait une certaine idée de la France. François Hollande, qui ne sait pas lire, en a conclu que la France était une idée.
— Renaud Camus (@RenaudCamus) 8 septembre 2016
En France on n’a pas de pétrole, mais on a Hollande.
Alain, prends ta valise, pars et surtout, ne te retourne pas…
Que voit-on depuis mercredi à Bordeaux exposé sur les quais sur le miroir d’eau aux beaux yeux des touristes ? Un radeau de survie gonflable rempli de gilets de sauvetage, une vingtaine d’autres bouées disposées autour, et les mots, que dis-je, le slogan : « Tous migrants ! » inscrits sur une banderole. On connaissait le slogan issu des rangs de Touche pas à mon pote : nous sommes tous des enfants d’immigrés. Slogan qui voulait signifier que la France s’était constituée et enrichie par des vagues successives d’immigrés. Slogan assimilationniste qui niait le fait que la première des causes de ses vagues successives se sont traduites par des invasions agressives : romains, barbares, vikings, arabes. Slogan qui niait également que la majeure partie était des Français de vieille souche avant que l’on impose à ce pays une immigration massive visant à faire de la main d’œuvre une ressource échangeable et remplaçable comme les autres. Bon, mais Juppé, en permettant cette exposition d’art contemporain, va plus loin ! Tous migrants ! Les ficelles de l’art contemporain sont toujours des lianes. L’objectif des auteurs, bien sûr, est d’interpeller, de conscientiser à fond le bon peuple « pour rappeler que l’urgence est au partage et à la solidarité envers les réfugiés ». Le catéchisme républicain veut culpabiliser le bourgeois. Cette œuvre mériterait bien d’être dégonflée par quelques identitaires à l’instar du plug anal de la place Vendôme. Dégonfler ce qui n’est pas une œuvre. L’art contemporain est un militantisme comme un autre.
Juppé montre ainsi qu’il collabore pleinement à l’idée de Hollande selon laquelle la France n’est pas une identité mais … une idée. Les migrants, un concept utile pour avoir des occasions d’expérimenter la charité. Sauf qu’au-delà du canot de sauvetage, on peut s’amuser avec le côté obscur de la face, nous sommes témoins de beaucoup plus d’œuvres d’art contemporain spontanées au quotidien : des bidonvilles aux portes des villes, des matelas sur les trottoirs de Paris, des quartiers entiers transformés en décharges… Calais pourrait même être vu comme un FRAC (Fonds Régional d’Art Contemporain) à ciel ouvert. S’il suffit d’ajouter une banderole avec le slogan « Tous remplacés » ou « Tous colonisés » ou « Tous envahis » pour avoir droit à l’attention de Juppé, on peut le faire. Ne parlons pas des performances d’art contemporain de Cologne ou d’ailleurs. Les happenings se multiplient manifestement. Mesdames, rasez les murs !
Et puis si nous prenions ce slogan « Tous migrants » au mot ! Partons. Ils viennent chez nous, allons chez eux. Après tout, j’ai toujours aimé le soleil, les palmiers et les petits plats méditerranéens. Au maire de Bordeaux de donner l’exemple. Un mouvement général va naître, et nous pourrions, pourquoi pas, échanger Bordeaux contre Alep. Tire-toi Alain ! Sois cohérent. C’est l’aventure qui t’attend ! Alain, prends ta valise, pars et surtout, ne te retourne pas… Qui t’aime te suive !