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Le citoyen modèle, expert en management national

Le citoyen modèle, expert en management national

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« Choisir un homme politique comme on ferait passer un entretien d’embauche », voilà ce que l’on entend parfois et de plus en plus souvent dans la bouche des citoyens modèles. Ceux-là ne sont pas abonnés au vote blanc ou au vote nul. Ce sont eux qui ont inventé l’expression « vote utile » et par voie de conséquence qualifier d’inutile toute volonté d’exprimer ses idées dans toute leur originalité. Au passage, c’est le chantage du vote utile qui nous fit passer à côté des quelques-uns qui nous semblaient un peu honnêtes et en capacité de défendre une certaine idée de notre civilisation. Nous passâmes ainsi à côté de Royer, Chevènement, Villiers, Séguin, et plus récemment Jean Lassalle.

Le citoyen cause comme un technocrate

Revenons à nos moutons… euh pardon … à nos citoyens modèles en quête d’un PDG pour l’entreprise France. C’est le fait de travailler en entreprise qui esquinte. Le monde du travail est parfois le seul lieu où l’on peut côtoyer une forme d’abstraction, cette dernière est d’ailleurs souvent à l’intelligence ce qu’était le canada-dry à la bière. Cela y ressemble, on a l’impression de faire les mêmes efforts intellectuels, mais en fait, on ne fait que traduire dans un jargon d’expert en processus ce qui devrait relever du bon sens. Les salariés prennent donc le monde de l’entreprise comme la source de leurs raisonnements. Quant à l’imaginaire… il leur faudrait lire des livres pour ça. Le salarié déboulant dans la vie de la cité va donc causer et penser comme un technocrate. Ses choix vont être « raisonnables » !

L’entreprise France mérite un bon manager

A partir du moment où la France va être réduite à un machin semblable aux entreprises, une personne morale comme disent les économistes sans connaître la définition des mots, alors nous proclamons la mort de la politique. Ce qui devient obsédant, primordial, ce sont les questions économiques et si un sujet sociétal émerge, ce n’est que dans la perspective d’une performance souhaitée.

Et c’est ainsi que l’on ne cesse de se voir rétorquer dès que l’on évoque une possibilité de changer un peu la société : « Ça ne marchera pas. » ; « Ce n’est pas possible. » ; « Ce n’est pas viable économiquement. » ; « Soyons un peu sérieux. » … Plus le droit de rêver, rengaine ton utopie, ravale ton identité et dégaine ton cynisme. Le champ du possible se voit terriblement réduit. Le souci de performance devient le leitmotiv de ces nouveaux citoyens experts en management d’une nation. Ils ont tous lu une fois les échos dans leur vie et ont tout compris de la nécessité d’alléger le coût du travail à tout prix et de l’impossibilité de se soustraire à la mondialisation.

Ayant tout compris, les citoyens modèles peuvent choisir avec confiance le bon manager de la nation, le bon cadre dirigeant de l’Etat. Les technocraties ont trouvé dans les entreprises de bonnes fabriques de citoyens modèles, de clones.

Pas étonnant que l’on finisse par élire Macron quand on pense choisir quelqu’un à un entretien d’embauche. L’effet de halo est énorme en entretien d’embauche. Et on finit par ne recruter que des gens dont la seule compétence est de savoir passer des entretiens d’embauche. On finit par n’élire que des pros des campagnes, comme Macron désormais. Tout le monde se résout à la nécessité d’un plan social pour la France sans plus oser rêver à une autre société.

C’était pourtant ça la politique. Imaginer une société permettant à nos valeurs et à notre culture de s’incarner au mieux. On n’est pas obligé, non, de transformer nos entrées de villes en bordel commercial. On n’est pas obligé de valoriser davantage l’acte d’acheter par rapport à celui de travailler. On n’est pas obligé de participer au balai des containers à travers la planète. On n’est pas obligé de transformer toutes nos entreprises en banques et nos cultivateurs en financiers. On n’est pas obligé d’accumuler du jetable dans les cieux. On n’est pas obligé de voir dans chaque œuvre d’art la possibilité de pratiquer légalement le délit d’initié. On n’est pas obligé de jeter toute la misère ddu monde sur les routes qui mènent toutes chez nous pour une humanité d’apatrides. On n’est pas obligé. Se soustraire est possible si on veut bien faire de la politique encore.


Le monde du travail deviendrait-il asexué ?
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Le citoyen nouveau est encore un coupeur de têtes
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« Attendu que… »
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