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Panthéonade

Panthéonade

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Quand la gauche semble perdre la légitimité du peuple pour ne plus devoir sa présence au pouvoir que de la légalité, voilà qu'elle s'entiche à nouveau de symboles. Désireuse de montrer que depuis 1789, elle joue à domicile, elle se lance par épisodes dans l’édification du grand mythe républicain. Elle panthéonise ! Les faiseurs de néologismes ont toujours préféré les verbes du premier groupe pour rester accessibles aux masses. Ainsi, le premier d’entre nous, le fils aîné de la chose publique, devenue appendice du machin dont De Gaulle qualifia l’Europe, bref, François Hollande, annonçait vendredi 21 février 2013 au Mont-Valérien le transfert des cendres au Panthéon en 2015 de Pierre Brossolette, Germaine Tillion, Jean Zay et Geneviève De Gaulle-Anthonioz. Tous les quatre étant des figures illustres de la résistance. Un homme et une femme, et encore un homme et une femme car désormais tout doit se faire au rythme du chabadabada, pour la promotion de la diversité au travers l’Histoire. Le Panthéon aussi a le droit à sa certification AFNOR, à son label diversité.

Cette entrée au Panthéon de la bande des quatre se fera le 27 mai 2015, "lors de la journée nationale de la Résistance". Leurs poussières ainsi élevées au rang de cendres éternelles sont censées servir d’exemple selon les propres dires du président en exercice. L’exemple est simple, c’est le sacrifice de sa vie pour la France. Brossolette s’est défenestré pour protéger les réseaux résistants, Zay a été abattu d’une rafale dans le dos par les miliciens. Quant aux femmes, elles ont survécu à la résistance pour pousser un peu plus loin la charité. Les exemples ne sont pas mauvais pour un monde sorti de l’Histoire et boudant les héros et l’esprit d’aventure. On a tout de même le sentiment qu’Hollande attend comme fruits de cette canonisation laïque quelques miracles républicains (par l’intercession des fameux martyrs) pour l’aider à résister à la crise et surtout à l’impopularité. C’est peut-être sa façon de prier à ce Hollande…

Dans le match gauche-droite qui se déroule sur terre révolutionnaire, dans cette course au plus républicain, et au plus moderne, la panthéonisation est une arme dialectique de choix. 10 contre 4. La gauche a toujours voulu maîtriser l’écriture de l’Histoire, quitte à la réécrire ou la "révisionner" d’ailleurs. Mitterrand a panthéonisé 6 héros, Hollande vient d’en acter 4. Alors que Chirac en offrit 2 et Sarkozy fit son effort de modernité en élevant les cendres du poète humaniste aux vers niaiseux, Aimé Césaire, pour cocher la case "diversité" dans sa politique d’ouverture. De Gaulle quant à lui se contenta de confirmer son propre mythe en rendant Jean Moulin redevable de sa propre personne une nouvelle fois.

Face à la mascarade, au rite républicain, au culte de la coquille vide, je préfère rester de ceux qui sont nés en ayant déjà un pied dans la fosse commune. Que mes os se contentent d’incorporer l’appareil de la planète. Non à la panthéonade. Oui, quand la réaction choisit ses néologismes, elle commence par se faire plaisir. Je veux continuer d’appartenir à cette vraie armée des ombres tellement attachée à la terre, qu’elle semble ne la quitter que très peu de temps, tellement attachée à la terre de France qu’elle consent à en être le fumier, tellement attachée à la patrie, qu’elle se fond dans le décor.

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