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Retraites : l’important est de durer…

Retraites : l’important est de durer…

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Si on garde le sens grec du mot démocratie alors tout citoyen doit pouvoir comprendre et participer à la vie publique. Cette phrase s’applique aussi au dossier épineux de la retraite dont on nous rebat les oreilles depuis plus de 10 ans et avec insistance depuis quelques jours. Force est de constater que plonger dans un tel dossier revêt du sacerdoce de fonctionnaire. Et pourtant, s’il y a bien quelque chose qui vous concernera, excusez-moi d’être trivial, c’est bien le temps de travail que vous devrez effectuer pour pouvoir appartenir à cette catégorie d’apparatchiks que sont les retraités. Vous voyez ceux qui voyagent, ceux qui vont se faire dorer la pilule sur les plus belles plages de France, ceux qui dépensent, en un mot, la France sacrifiée.

Plongeons un peu dans les eaux profondes de ce dossier. Pour cela il faut aller sur le site du COR, non pas du cor au pied, ni celui du cor d’harmonie, mais le Comité d’Orientation des Retraites. Nos fonctionnaires ont de l’humour ! Là se trouvent de nombreux rapports d’une institution qui se veut un organe de transparence pour le péquin moyen et un comité consultatif pour le pouvoir public, notre gouvernement. Armés de ce guide bienveillant, nous voici au cœur d’un sujet qui requiert une grande dose d’abnégation et de courage tant les rouages de ce système sont complexes.

Quels sont les grands principes de notre système de retraite ?


Je ne vous apprendrai rien en vous disant que le principe des retraites est celui de « retraite par répartition » mais peut-être ne connaissez-vous pas les trois principes fondateurs : répartition, contributivité, et solidarité. Le tout est situé après le terme « obligatoire », car nul ne peut se soustraire à ce régime. La loi assigne six autres objectifs à cette politique publique : « maintien d’un niveau de vie satisfaisant des retraités, lisibilité, transparence, équité intergénérationnelle, progression du taux d’emploi des plus de 55 ans et réduction des écarts entre la pension des hommes et des femmes ». Cela tient davantage de l’incantation, on s’éloigne de la transparence et on poursuit plusieurs lièvres à la fois. Si on traduit cela en termes simples cela donnerait : toi, homme travaillant, versera pour le voisin ton retraité une grosse partie du salaire de ton labeur dans un élan de solidarité générationnelle obligatoire. Tu feras cela dans l’espoir fou, que le système n’aura pas changé lorsque tu partiras toi-même à la retraite et qu’un péquin soit tout aussi obligatoirement solidaire de ta vieillesse. Moi, perso, j’aime bien, c’est beau et charitable ! Mais lorsque l’on considère la génération du dessus, on s’aperçoit que déjà sa générosité n’est pas allée jusqu’à avoir un nombre d’enfants suffisant pour maintenir cette belle architecture post guerre. Grande désillusion, on aurait pu anticiper !

Quel est le prélèvement obligatoire sur votre salaire nécessaire à cette solidarité ?


Alors là, la question est compliquée ! Cela dépend de votre statut, fonctionnaire ou privé. Si l’on prend l’exemple repris dans les fiches du COR : un non cadre du privé cotise 26,35 % de son salaire dont 10,65 % est à sa charge et 15,70 % à la charge de l’employeur. Pour un fonctionnaire, le taux à sa charge est de 8,76 %. Pourquoi cette différence ? Je ne sais pas, ce n’est pas expliqué, l’équité privé-public ne doit pas être dans la loi. Quoiqu’il en soit, pour un salaire annuel de 30.000 € pour un non-cadre privé, la modique somme de 7.800 € est prélevée tous les ans pour payer le voisin retraité. Sur 40 années, en prenant l’hypothèse que vous pouvez placer à 2 % par an, cela vous rapporterait la coquette somme de 490.000 €, ce qui ferait 24.000 € par an (80 % de votre salaire) pour vivre pendant 20 années.

Quels sont les rouages du fonctionnement du calcul de ma retraite future ?


Si vous avez bien suivi les derniers événements ces dernières années, pour les générations postérieures à 1956, l’ouverture des droits se fera à 62 ans, il faut avoir cotisé 166 trimestres ou partir à la retraite à 67 ans révolus pour avoir le taux plein. Ça, c’est aujourd’hui, demain ce sera différent mais toujours plus… Au final, vous percevrez dans le secteur privé, 50 % de la moyenne des 25 meilleurs salaires. Et attention, si vous avez la chance d’être dans le secteur public, 75 % du traitement indiciaire du dernier emploi détenu. Là, pas plus d’explication du COR sur cette iniquité flagrante. Hollande, justicier, que fais-tu ?

Bon quittons le COR et cherchons des réponses plus indépendantes des analystes. Prenons le site de la fondation iFRAP, nom bien choisi encore une fois. Dans le dossier « Retraite, les 15 clés de la réforme », elle est effectivement directe : « les retraites sont les premières des dépenses sociales : elles représentaient 278 milliards d’euros en 2010, soit un quart des dépenses publiques et la moitié des dépenses sociales. Avec 14 % du PIB, la France est le pays d’Europe qui consacre le plus pour ses prestations vieillesse après l’Italie (17 %), devant l’Allemagne (11,8 %). Les prévisions du COR ont confirmé un déficit probable de l’ensemble des régimes de 22 milliards d’euros en 2020 » Mazette ! Tout ça et cet institut ose balancer aussi sur l’équité : « Un exemple de différence de rendement : les enseignants. Pour le public, 4 à 7 % de cotisations de moins pour des retraites supérieures. »

Bon c’est assez, résumons-nous. Si nous sommes dans cette situation, c’est parce qu’il n’y a pas eu assez d’enfants à la génération précédente et que, concomitamment, l’espérance de vie a augmenté. Peut-on redresser la natalité hors immigration ? Non car le nombre de femmes en âge de procréer est de plus en plus faible, et que cela ne s’arrange pas. Remarquez, on pourra toujours mettre en place l’euthanasie obligatoire. Alors que faire ? Hollande va sortir sa petite boite à outil et va sûrement allonger la durée de cotisation et augmenter les cotisations patronales. Son objectif est de court terme, après tout, lui, sera pensionné dans moins de 4 ans. Vous noterez que dans ce débat à aucun moment il n’est question de remettre en cause le sacro-saint principe de répartition, autrement appelé le système Madoff. Pas un mot non plus sur le système de retraite par capitalisation, notion complètement absente de la sphère publique. Autre point, aucune comparaison internationale. Mais pourquoi ? A cause de la sacro-sainte solidarité-équité et de la grandeur de la France. Vous comprenez, si je peux capitaliser mes 16 %, plus je gagne, plus ma retraite sera importante. Cela signifierait aussi utiliser les marchés financiers et engraisser les banquiers et toute cette engeance puante et répugnante. Ainsi va la démocratie Française avec un débat public joué d’avance, des petites rustines du plombier français. On assistera aux éternelles grèves des plus privilégiés de nos travailleurs en attendant la chute de ce système.

En bref : vive les 35 heures mais il va falloir tenir sur la durée !

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