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Drieu : Jouer Dantzig sur un match de football

Drieu : Jouer Dantzig sur un match de football

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Les cahiers de la NRF, chez Gallimard, ont publié les Carnets intimes (1909 – 1942) de Pierre Drieu La Rochelle, Jouer Dantzig sur un match de football. L’occasion est ainsi donnée de mieux saisir le cheminement intellectuel et politique du grand écrivain français.

Dans ses Notes sur le nationalisme, en 1942, Drieu écrit : « Mon âme, c’est la France et je ne puis vivre sans mon âme […] Je nais dans une patrie. Je n’aurais pas pu naître ailleurs ou je n’aurais pas été moi. Et je ne peux pas vivre ailleurs – ou en y transportant mes pénates, c’est-à-dire en gardant dans mon for intérieur l’âme de ma patrie et en lui rendant le culte spontané de mes habitudes mentales. Je n’ai pas d’âme particulière. J’ai l’âme que m’a donnée ma patrie. Personne ne naît entre ciel et terre, mais chacun en un lieu, et d’un père et d’une mère, représentants d’une suite d’ancêtres. Un être qui naît n’est pas une création ex-nihilo, il n’est qu’une combinaison. »

Alors qu’il est tout jeune, 16 ans, il note au début de son journal :

Dimanche 7 mars 1909 : « Quelles sont les opinions sur l’Etat ! peuple : mépris, envie, désir de tout. Niveler – peur. Aussitôt qu’on est tranquille, casé, on a des idées raisonnables. »

Mardi 16 mars 1909 : « Comme quoi Paul Adam a raison de dire que l’Idéal latin a fait la Révolution. Cet idéal c’est la Loi. Montesquieu inspirateur du traditionalisme. Il est trop aprioristique avec ses 3 principes des 3 gouvernements. Opposition entre société bourgeoise et chrétienne <basse>. »

Dimanche 4 avril 1909. Rameaux. « Précision relative de la langue du 18° s. (Voltaire, Montesquieu). Termes trop vagues, qui aujourd’hui paraîtraient banaux. Impression curieuse de clarté, de fluidité en surface, mais qui ne pénètre pas. C’est bien le style de gens qui n’ont pas de sensibilité, de réaction violente. Ce sont des esprits logés en des corps fluets. »

Jeudi 13 mai 1909 : « On peut dire que le rôle de l’art est d’élever l’esprit. Or pour arriver à ce but, le poète a recours aux métaphores, c’est-à-dire aux explications, aux paraphrases des choses de l’esprit par des images matérielles. Mais l’art n’a peut-être pas de but – ce n’est peut-être que l’enthousiasme de la vie. »

Carnet d’Angleterre 1909 : « La science a creusé un fossé entre âme et matière, car elle a montré que le mouvement spatial n’a pas besoin d’âme, et a dépouillé la nature du vêtement de qualités sensibles dont l’esprit se revêt. »

Octobre 1911 : « Matinée passée au Bois, dont les allées éloignées sont encore peu fréquentées. Le ciel gris et assez bas. Aux impressions douces de modération, de mélancolie, qu’il effeuille sur nous s’associe cette sensation d’intimité et de tendresse que seul l’automne nous donne. Voici bien la saison des esprits affinés par la civilisation. L’élégance est un fruit de l’automne des sociétés ; fruit aux nuances délicates, à l’arôme d’abord peu frappant et qui pénètre peu à peu et complètement. Or l’essence de l’élégance est la modération -hélas ! n’est-ce pas l’âme et le charme ineffable de l’automne que la nature y est mesurée. Mesurée parce qu’un effort annuel se lasse et va s’assoupir pour le nouveau travail, la nouvelle métamorphose. De même si les gestes, les attitudes d’un délicat sont réguliers, corrects, prévus, n’est-ce pas parce que le flot de la vie s’est diminué peu à peu, a cessé de déborder, de bondir et se contente de son lit qui s’est creusé à la longue par l’usure. »


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