Perrin ne se laisse pas intimider par le politiquement correct
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Voilà un libre qui tombe à pic. André Perrin, philosophe et enseignant, dans Scènes de la vie intellectuelle en France publié aux éditions L’Artilleur, se demande si le débat est toujours possible dans notre pays. Sous-titrant son ouvrage d’un l’intimidation contre le débat, on devine dès la première de couverture sur quels terrains sensibles et minés il va nous conduire. D’emblée, il relate la polémique née de la sortie, en mars 2008, du livre Aristote au Mont-saint-Michel où l’historien réputé Sylvain Gouguenheim, professeur à l’Ecole Normale Supérieure de Lyon, remettait en cause certains dogmes officiels selon lesquels l’Occident médiéval devrait tout ou presque aux arabes et à Averroès, qui lui auraient transmis l’essentiel de l’héritage grec. Sa critique de cette position largement répandue dans les milieux universitaires qui cherchent à tout prix à valoriser l’islam, au détriment des filières latines de cet héritage, lui valut une levée de boucliers des gardiens de la doxa islamophile. Les journaux Le Monde et Libération, là où s’exprime la « meute française » composée des « stakhanivistes de la pétition et de l’excommunication », furent comme toujours à la pointe du combat pour mener la cabale et tenter de tuer l’imprudent iconoclaste immédiatement qualifié de dangereux islamophobe. C’est par l’usage bien connu de la reductio ad hitlerum, ce bon vieux sophisme, que l’on empêche d’exister dans notre beau pays tout avis dissonant qui pourrait contredire la pensée unique : « Désormais il ne s’agit plus de savoir si tel ou tel théorème est vrai mais s’il est bien ou mal sonnant, agréable ou non à la police, utile ou nuisible au capital. » André Perrin, regrettant cette forme d’aveuglement au réel, met en scène dans son livre neuf de ces débats médiatiques « qui ont dessiné le paysage idéologique de ces dernières années » et s’inquiète de voir des intellectuels qui, « confondant la position du savant avec la posture du militant, inscrivent leur discours dans une logique de l’action, traitent leurs interlocuteurs comme des ennemis et s’emploient par divers moyens à rendre impossible un véritable débat. » Très justement, en intellectuel rigoureux, Perrin critique qu’on ne lise pas l’ouvrage de l’auteur que l’on condamne a priori et qu’on « n’ait pas ce minimum d’empathie qui permettrait d’entrer dans ses raisons, en appliquant l’élémentaire principe de charité ».
Le 12 novembre 2006, le pape Benoît XVI prononce à Ratisbonne une conférence intitulée Foi, raison et université : souvenir et réflexions. Les médias, radios et télévisions, reprennent sans vérification des dépêches d’agences de presse affirmant que le pape y a dénoncé la violence de l’islam. Des églises sont incendiées, une religieuse septuagénaire de Mogadiscio assassinée. Ces très graves réactions sont le fait de personnes qui n’ont pas lu le discours du pape, détiennent une information erronée diffusée par des journalistes eux-mêmes ignorants des propos réellement tenus par Benoît XVI. Le pape, reprenant un court dialogue entre l’empereur byzantin Manuel II Paléologue et un lettré persan qui reproche à Mahomet d’avoir diffusé la foi par l’épée, affirmait simplement que « ne pas agir selon la raison est contraire à la nature de Dieu », et se situait dans le thème de la conférence dédiée à la foi et la raison. L’ignorance, le colportage de mensonges et l’idéologie semèrent ainsi la violence et la mort dans de nombreux pays.
André Perrin regrette encore que toute question sur la notion d’identité soit bannie du débat en France. Les qualifications d’idéologie rance et nauséabonde, des pires heures de notre histoire, sont brandies pour couper court à toute tentative. Il est vrai que l’identité renvoie au sujet brûlant, pour les peuples, de l’immigration. Le libéralisme triomphant se nourrit de cette immigration, de l’abolition des frontières et des différences culturelles, fait son miel d’une main d’œuvre bon marché et cherche sans cesse à élargir la base des consommateurs compulsifs jusqu’aux extrémités de la planète. Sa toute-puissance lui assure une hégémonie et le préserve de toute remise en cause.
Notre auteur aborde ensuite, au fil des chapitres, toutes ces pertes de liberté d’expression, de liberté tout court : la disqualification par la « phobie », ce que Philippe de Villiers appelle la « cage aux phobes », honte à celui qui est homophobe, islamophobe…. ; la condamnation médiatique, le 6 mars 2010, d’Éric Zemmour qui avait déclaré, ce que d’aucuns voient comme une évidence mais qu’il est interdit de dire, que « La plupart des trafiquants sont noirs et arabes, c’est un fait. » ; le scandale provoqué par Michel Onfray qui mettait en garde sur le danger des images et des émotions démesurées qu’elles suscitent au sujet du petit Elyan retrouvé tragiquement noyé sur une plage, images qui, aussi choquantes soient-elles, ne « peuvent en aucun cas déterminer une politique migratoire » ; les réactions indignées contre Manuel Valls qui, visitant un marché d’Evry, avait affirmé, enregistré à son insu, qu’il faudrait « ajouter quelques blancs, quelques white, quelques blancos » pour améliorer l’image de sa ville. Dans ce dernier exemple, on voit bien que la mixité sociale, ce dogme de la pensée gauchiste, fonctionne au détriment des « faces de craie » priées de se montrer discrètes pour laisser toute la place et toute la visibilité aux « minorités ».
Perrin nous rappelle utilement, et afin peut-être de nous aider à muscler notre détermination de conservateurs résistants, combien les déconstructeurs sont lucides et appliqués dans leur entreprise de casse méthodique : « C’est une réforme de société et on peut dire même une réforme de civilisation. » affirmait ainsi Christiane Taubira au sujet de la loi sur le mariage homosexuel. Ce qui pouvait apparaître comme la nouvelle fanfaronnade d’un politique orgueilleux avait en fait une tout autre signification et poursuivait un but puissant. André Perrin : « S’il était vrai à la fois que les opposants au projet étaient homophobes et que l’homophobie n’était pas une opinion mais un délit, il en résultait non seulement qu’aucun débat opposant des opinions n’était possible, mais encore que tous ceux, simples citoyens ou représentants de la nation, qui y auraient participé sans approuver le projet de loi se seraient rendus coupables d’un délit dont ils auraient dû répondre devant les tribunaux, de telle sorte que seuls auraient été autorisés à débattre démocratiquement, entre eux, les partisans du projet. ». Nous poursuivons en relisant les propos de Houellebecq en 2001 : « La religion la plus con, c’est quand même l’islam. », il ne fut pas condamné pour cela par le Tribunal correctionnel au motif que ses propos ne « contenaient aucune volonté d’invective, de mépris ou d’outrage envers un groupe de personnes composé d’adeptes de la religion considérée », réfléchissons encore avec l’auteur aux terribles dégâts causés par les lois mémorielles, ces outils de la dictature des minorités soucieuses de revanche et de multiculturalisme qui les verront très probablement s’imposer par le nombre. Que les immigrationnistes et remplacistes dorment tranquilles ! Ils ont mis tout en place pour qu’il n’y ait jamais de statistiques ethniques en France qui puissent chiffrer précisément et rendre public le nombre d’immigrés. Si cela devait arriver, le populisme, déjà en voie de réaffirmation, ce qui nous réjouit profondément, merci à Trump, merci à Poutine, merci au Brexit, …, parviendrait alors à reprendre le pouvoir et à replacer l’identité au cœur des nations. Les peuples redeviendraient souverains et mettraient probablement au bûcher ces élites mondialisées qui les détestent.
Allez, juste pour le plaisir, avec l’auteur, un sujet de vraie liberté d’expression pour les apprentis philosophes de classes de terminale : toutes les civilisations se valent-elles ?