Les femmes grandes perdantes du jeu de dupes libéral libertaire
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Revenons à notre sujet d’étude préféré : les femmes ! Et cela, en compagnie de Christopher Lasch, intellectuel américain, historien et critique social des évolutions et turpitudes du capitalisme moderne, décédé en 1994, dont l’ouvrage Les femmes et la vie ordinaire paraissait post mortem aux Etats-Unis en 1997. Lasch, contempteur du progressisme échevelé qui déconstruit tous les référentiels structurants, affirmait dans une formule percutante que « Le déracinement déracine tout, sauf le besoin de racines. », formule qui entre en résonnance avec la belle sentence de Simone Weil : « L’enracinement est le besoin le plus méconnu et le plus nécessaire de l’âme humaine. » Les femmes et la vie ordinaire est un livre savant qui explore la condition des femmes, l’amour, le mariage, et l’histoire du féminisme en Occident depuis le XIIIème siècle. Lasch, peu avant de mourir, confiait à sa fille qui le secondait dans son travail mené jusqu’à l’extrême limite de ses forces : « Je tente de mettre au jour les relations entre l’idéologie moderne de l’intimité, le nouvel idéal domestique du dix-neuvième siècle et le féminisme – quelque chose dans ce goût-là. Travail qui s’intitule provisoirement "La domestication d’Eros". » Sa volonté, en tentant de percer les secrets de la psychologie amoureuse des femmes au long des siècles, était de penser « une histoire de l’humanité sous un jour tout nouveau, dans un sens plus intime ».
Critiquant l’ingérence des experts de l’Etat libéral moderne dans la vie privée des personnes, les rendant dépendantes des structures bureaucratiques et d’une philosophie paternaliste, Lasch stigmatise la dépendance aux élites ainsi organisée, ce qui est selon lui l’antithèse de la démocratie. L’inféodation aux experts de toutes sortes a contribué à la dégradation de la vie ordinaire et à l’infantilisation des citoyens. Lasch fait ainsi le constat que « La vie moderne est trop organisée, trop consciente d’elle-même, trop prévisible. » Elle ne laisse plus d’espace au mystère, au jeu, à la passion : « La dépendance envers des moyens purement scientifiques de compréhension de l’humanité a pour conséquence une vision réductrice de la nature humaine dépourvue des artifices de la clairvoyance artistique et littéraire. » Le contrôle des élites s’exerce aussi spécifiquement à l’égard des femmes qui doivent se soumettre aux nouvelles exigences fixées par la doxa : un travail professionnel pour elles en plus de la vie domestique, une indépendance sentimentale, sexuelle et dans le choix de la procréation… Les brevets de modernité, en Occident, sont ainsi décernés uniquement à celles qui ont accompli la rupture avec le monde d’avant, celui d’une trop grande dépendance aux hommes. Christopher Lasch place son argumentation sur deux fronts : la remise en question à la fois de l’idée selon laquelle la famille moderne, « bastion d’égalitarisme et d’affection », représente un franc succès, et la conception féministe de cette même famille moderne comme étant « une forme nouvelle de l’oppression patriarcale ». Il insiste très justement : « Consolidant son propre pouvoir par la surveillance et l’infiltration plutôt que par la force, l’Etat tire profit de cette crise de la famille. A l’origine, ce contrôle non coercitif, non autoritaire et manipulateur, cherchait à saper le contrôle patriarcal, mais il créa en fait une nouvelle autorité de l’Etat, en particulier parce qu’il mina la foi des gens en l’efficacité de leurs propres actions. L’intrusion des experts extérieurs, l’appropriation de la responsabilité des vies individuelle et familiale par des professionnels, ainsi que la rationalisation plus générale de la vie, ôtent aux gens la volonté et le respect de soi qui vont de pair avec la prise de responsabilité de leur propre existence et l’apport d’une contribution respectée à un noble but, un but qui transcende l’intérêt personnel. » Nous pourrions résumer les choses de la façon suivante : déresponsabilisation individuelle, encouragement des élites (experts, médias, voix autorisées, néo-féministes) à la sécession permanente entre hommes et femmes, particulièrement dans le couple, refus de transcendance par une post-modernité vouée à la Raison. Ce sont ici autant de facteurs principaux mais non exhaustifs qui ont créé la société individualiste que nous connaissons. Celle-ci se nourrit de la méfiance instillée dans les rapports entre hommes et femmes, et l’on n’est pas loin de jurer, en vertu de l’observation des situations conjugales actuelles, que les femmes sont perdantes en acceptant le jeu artificiel d’une hyper-indépendance par rapport aux hommes. Car en effet, quel résultat ce « jeu » donne-t-il finalement ? La statistique est implacable : une femme sur deux vit seule en France, et élève le plus souvent (seule) ses enfants. Les femmes sont bien les premières perdantes du grand jeu de dupes organisé par l’Etat libéral libertaire qui s’est immiscé au sein des foyers et y a imposé sa tyrannie douce.
Si le féminisme et la controverse qui l’accompagne sont éternels, le « féminisme moderne » est apparu au XVème siècle avec Christine de Pisan (chroniqueuse et poétesse de la vie de Jeanne d’Arc, qui fut elle-même une sacrée féministe !). On constate que jusqu’à une époque récente, heureuse inspiration, « Le féminisme moderne promettait non pas d’intensifier la guerre des sexes mais d’instaurer une ère nouvelle de paix entre les sexes, dans laquelle les hommes et les femmes se considéreraient comme égaux et non antagonistes. » Puis, le néo-féminisme agressif et idéologisé est apparu dans les années 50, se dotant plus récemment d’armes de destruction massive telles le hashtag #balancetonporc. Ce dernier a généré une hystérisation des relations entre hommes et femmes au sein des sociétés occidentales un peu partout dans le monde. Satisfait de ce phénomène de durcissement, le néo-féminisme s’est assigné pour but d’imposer une révolution anthropologique majeure en se donnant trois priorités : le bannissement définitif du mâle, la destruction de l’altérité homme/femme et l’instauration du genre. Le brouillage des repères naturels et moraux ainsi engendré renforce à dessein l’individualisme, l’exaltation des minorités et la culture diversitaire. Grâce à ces déconstructions finement orchestrées, le modèle libéral a toutes les chances de se débarrasser du vieux monde pour instaurer l’humanité 2.0 placée sous un contrôle orwellien et censée achever un processus de pacification par le biais du marché (cette providence artificielle) et par l’abolition définitive des frontières physique et anthropologique.