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Réflexions sur « Le Vrai Croyant » d'Eric Hoffer

Réflexions sur « Le Vrai Croyant » d'Eric Hoffer

Par  

« Every great cause begins as a movement, becomes a business, and eventually degenerates into a racket ».

En français ça peut donner ceci : « Toute grande cause débute en un mouvement (d'opinion), devient un business, et dégénère finalement en racket ». J'ai rajouté d'opinion car dans cette citation d'Eric Hoffer cette notion est sous-entendue. Les lecteurs assidus de mon blog ont déjà compris où je veux en venir en citant Eric Hoffer qu'ils ne connaissent peut-être pas. Très bien ! Je vais rafraîchir les mémoires. Hoffer a écrit en 1951 un essai philosophique magistral, The True Believer, sur les causes psychologiques du fanatisme, qu'il soit religieux, politique, radical ou réactionnaire. L'idée centrale d'Hoffer s'appuyant sur l'histoire passée et qui n'a jamais été démentie depuis par les faits, est que les mouvements d'opinion des masses sont interchangeables qu'il s'agisse de mouvements politiques, du fascisme, du communisme, du socialisme nationaliste ou des religions catholique, anglicane, protestante, juive ou musulmane.

Pour Hoffer les mouvements de masse prennent naissance dans un désir de changement suffisamment répandu parmi une population qui n'accorde plus aucune confiance au système dans laquelle elle vit. Le mouvement de masse ne peut pas perdurer sans leader mais pour qu'un leader se dégage il faut que la masse soit convaincue que ce dernier portera et défendra bien les aspirations du mouvement. L'histoire a cependant montré que les mouvements de masse étaient interchangeables. Hoffer cite deux exemples. Saul était un fanatique antichrétien et après sa conversion devint un fanatique du christianisme. Dans les années 20 et 30 les communistes et les fascistes allemands étaient des ennemis jurés mais en réalité ils étaient en compétition pour le même but, rallier la population marginalisée par la crise économique. Les mouvements de masse ont aussi besoin de symboles, la swastika pour les Nazis ou la faucille et le marteau pour les communistes pour reprendre le dernier exemple, la francisque pour le régime de Vichy, un curieux amalgame de communisme et de fascisme et les bonnets rouges pour les Bretons.

Les mouvements de masse trouvent leur soutien chez les nouveaux pauvres, car ils ont en mémoire les temps meilleurs dans lesquels ils vivaient alors qu'il n'y a pas de mouvements de masse dans des populations extrêmement pauvres qui n'ont d'autre préoccupation que leur survie quotidienne. Les mouvements de masse requièrent également un total abandon de soi pour la « cause », qu'elle soit politique, religieuse, nationaliste ou révolutionnaire conduisant à la réapparition d'un état d'être primitif. Enfin, pour asseoir leur crédibilité les mouvements de masse n'hésitent pas à utiliser tous les moyens de persuasion, la coercition et le prosélytisme afin que chaque individu reconnaisse dans les discours ou les parades l'écho de ses propres aspirations. Hoffer va même jusqu'à dire que les mouvements de masse sont réussis s'ils ne prônent pas la croyance en un dieu mais plutôt en celle d'un démon, quelle que soit la symbolique qu'il puisse prendre et en général le meilleur « démon » est « l'étranger » pour les mouvements de masse nationalistes ou les puissances de l'argent pour les mouvements de masse d'idéologie marxiste.

Les leaders des mouvements de masse (Gandhi, Trotsky, Lénine, Hitler) se présentent comme des oppressés et dénigrent alors les institutions en les considérant comme l'unique source du ressentiment des masses. La soif de foi ou de doctrine est alors alimentée par des slogans vantant la nouvelle foi. C'est alors qu'apparaît le fanatisme qui fut très bien incarné par des personnalités peu reluisantes comme Marat, Robespierre ou Mussolini. Et insensiblement le mouvement de masse devenu institutionnalisé conduit inévitablement à un asservissement idéologique des populations quelles que puissent être leurs motivations premières. Avec l'organisation des Croisades et l'Inquisition, l'Église catholique n'avait rien à envier en termes de fanatisme au fanatisme du djihadisme d'aujourd'hui. Autant les Bolcheviques que les Jacobins étaient devenus rapidement aussi répressifs que les monarchies qu'ils avaient concouru à renverser.

Hoffer prédit la durée de vie de la « phase active » d'un mouvement de masse. Les mouvements ayant un but très précis sont de courte durée et ne conduisent pas à des effusions de sang onéreuses pour la société, ce fut le cas de la Révolution américaine. A contrario cette phase active des mouvements de masse sans but vraiment défini conduit à des massacres et d'autres exactions justifiées par l'idéologie initiale du mouvement toujours plus ou moins floue ou mal définie pendant de nombreuses années. Ce fut le cas du nazisme en Allemagne et du Bolchevisme en Russie. Il existe des exceptions comme Cuba ou la Corée du Nord que Hoffer ne mentionnait pas dans son ouvrage (1951) mais ces deux derniers exemples sont en accord avec le mot de Hoffer : le mouvement a dégénéré caricaturalement en racket organisé de la population entière au profit du leader et de son entourage proche.

Pourquoi avoir relaté ici ce livre oublié de Hoffer qui a eu cependant un regain d'actualité récemment avec le Tea Party américain ? Tout simplement pour imaginer ce qu'aurait été l'analyse de Hoffer en termes de psychologie sociale du mouvement de masse écologiste. Considérer que le mouvement écologiste est initialement d'inspiration politique ne choquera personne et les arguments avancés dans la dialectique du discours des masses ont initialement été orientés contre la bombe atomique et ce mouvement de masse a pris une ampleur inattendue avec la guerre du Viet-Nam, entre parenthèses une des pires horreurs perpétrées par les Américains hors de leurs frontières, qui favorisa les mouvements hippies de protestation sur les campus des universités californiennes. Hoffer n'a jamais caché sa sympathie pour ces mouvements hippies qui préfiguraient l'émergence des mouvements écologistes tels qu'ils existent aujourd'hui * (voir note en fin de billet). Si Hoffer était toujours parmi nous (il mourut en 1983) il analyserait le mouvement de masse écologiste comme un mouvement de masse sans but initial précis qui durerait longtemps selon son analyse bien décrite dans son livre The True Believer. Puisque les objectifs du mouvement n'étaient pas précis un amalgame judicieusement pensé allait faire exploser en ampleur ce mouvement. Les technologies modernes asservissent les hommes et le simple fait de considérer que les progrès techniques ne sont pas nécessairement bénéfiques pour la société a suffi à ces mouvements pour trouver l'argument en apparence imparable pour créer ce mouvement de masse. Jouant sur l'ignorance des foules et la désinformation systématique, ces mouvements ont pu émerger et prendre de l'ampleur à l'occasion de divers évènements comme l'accident nucléaire de Windscale en Grande-Bretagne en 1957 puis de Three Miles Island en 1979 liés à la bombe atomique, directement dans les esprits mais en réalité très indirectement et pour ainsi dire pas du tout. Bref, puisque le NTBT (Nuclear Test Ban Treaty) était entré en vigueur pour interdire les essais nucléaires atmosphériques en 1963, il restait tout de même la peur des essais souterrains qui provoquaient des tremblements de terre, modifiaient irréversiblement le sous-sol et provoquaient des contaminations plus ou moins fâcheuses des nappes phréatiques (quand elles existaient hypothétiquement dans des zones désertiques), argument qui fut utilisé par les écologistes opposés à la bombe, on peut aisément les comprendre, pour s'opposer également progressivement au nucléaire civil.

Pour convaincre les masses il fallait d'autres arguments pouvant être rapprochés dans une idéologie globale montrant la dangerosité des progrès scientifiques et techniques. Ce furent tout naturellement les plantes génétiquement modifiées à partir du milieu des années 80, les premières transgenèses végétales datent de 1983, puis les pesticides par un savant amalgame entre plantes transgéniques et ces derniers et enfin, le climat. Dans ce dernier cas, et à peu près au même moment l'élément qui fut amalgamé aux motivations des mouvements de masse écologistes fut la découverte satellitaire du trou d'ozone au dessus de l'Antarctique en 1985. Les CFC furent incriminés sans que l'on soit encore aujourd'hui totalement certain de leur implication directe dans ce phénomène. Toujours est-il que cette observation conduisit au protocole de Montréal en 1987 limitant l'utilisation des CFC. Il faut noter l'accélération des prises de position entre la date de publication de l'article relatif au trou d'ozone et le protocole de Montréal, un délai extraordinairement court de deux années montrant la motivation sans limite des mouvements de masse écologistes. Une extrapolation totalement erronée des observations de l'atmosphère de Vénus à celle de la Terre conduisit un militant écologiste ayant « pignon sur rue », James Hansen, à formuler la théorie de l'effet de serre et du forcing radiatif en 1988. C'était largement suffisant pour initier le mouvement de masse écologiste qui n'était au départ motivé que par la bombe atomique et s'est structuré et focalisé ultérieurement sur le climat à partir d'hypothèses fausses et des désinformations systématiques tant en ce qui concerne les plantes transgéniques et les pesticides que les soit-disant effets adverses d'un changement climatique hypothétique induit par un effet de serre théorique (et jamais prouvé).

Le mouvement de masse écologiste trouva ses leaders en la personne d'Al Gore, un des pires escrocs de ces dernières années, et de James Hansen qui sévit à la NASA pendant près de 30 ans (jusqu'en 2013) et est l'auteur avoué des transpositions théoriques et contraires aux principes fondamentaux de la thermodynamique de Vénus à la Terre en matière de dynamique de l'atmosphère. Les « chemises brunes » du mouvement de masse sont des organisations non gouvernementales dont les financements sont des plus opaques. Le mouvement de masse écologiste tel qu'aurait pu le définir Eric Hoffer ressemble donc à ces églises de fanatiques du début du christianisme qui imposaient par la force et les massacres leurs idées. Hoffer n'aurait certainement pas omis de mentionner la teinte résolument extrémiste de gauche de l'idéologie écologiste dont la dialectique n'est pas sans rappeler celle des mouvements politiques extrêmes instaurant le mensonge et la désinformation comme principaux arguments pour convaincre les foules crédules et manipulées par des effets d'annonce catastrophistes comme le film scandaleux produit par Al Gore.

Comme Eric Hoffer le prédisait et pourrait le constater aujourd'hui, le mouvement de masse écologiste semble s'être installé durablement, il est devenu un gros business puisque les pays de l'OCDE consacrent 1 milliard de dollars par jour pour satisfaire ses exigences imposées aux politiciens décideurs et il est entré dans la phase terminale de son objectif : le racket de l'ensemble des peuples de la planète par le surenchérissement de l'énergie ! J'ajouterai que l'interdiction des plantes génétiquement modifiées et le développement des biocarburants concourent également au renchérissement des denrées alimentaires et donc à la paupérisation cette fois de l'ensemble des peuples de la planète. Eric Hoffer était prophétique et son analyse du développement des systèmes politiques totalitaires ou religieux s'applique parfaitement au mouvement de masse écologiste.

Il y a un autre mouvement de masse qui se dessine cette fois-ci en France devant le pourrissement apparemment incurable de l'état du pays, de l'État lui-même, des institutions et des lois devenues inadaptées au contexte moderne, de la structure administrative tout aussi antédiluvienne et enfin du partage des responsabilités qui n'a plus aucune connexion avec la réalité quotidienne que vit chaque citoyen. L'emprise de l'État français à tous les niveaux est devenue telle que l'on se demande si la République française, pays des droits de l'homme et du citoyen n'est pas devenue la caricature d'elle-même. Eric Hoffer trouverait un sujet d'inspiration majestueux en auscultant la santé de la France au jour d'aujourd'hui. Depuis le retour des socialo-écolo-marxistes au pouvoir, plus ou moins par erreur, les classes moyennes laborieuses ont été sauvagement matraquées par une fiscalité asphyxiante et destructrice. Cette frange loin d'être négligeable de la population, et elle englobe aussi de nombreux fonctionnaires, est devenue le ferment d'un nouveau mouvement de masse tel que le définissait Eric Hoffer dans son ouvrage : les déçus du système politique et législatif, les déçus qui voient leur pouvoir d'achat s'effondrer et qui à un moment ou à un autre se soulèveront en masse pour tenter de mettre en place une organisation mieux adaptée du pays. Il y a en quelque sorte une urgence à trouver un leader pour ce mouvement de masse qui se profile, mais où est-il ? Sans leader, sans slogans, sans symboles, comment les masses pourront-elles, dans un grand mouvement de masse national, balayer les institutions et les règlementations désuètes pour la plupart issues du régime atypique de Vichy, exiger des réformes en profondeur de ces institutions, de la fonction même des politiciens, du découpage des communes, des cantons, des arrondissements, des départements et des régions, un imbroglio administratif qui ne profite qu'à une élite auto-proclamée et ferment évident de toutes sortes de corruptions, d'exiger une redéfinition du rôle du syndicalisme qui comme pour la justice, doit être totalement déconnecté de la politique et de toute idéologie, de la réforme en profondeur des corporatismes nombreux et variés qui minent la croissance économique, de refondre l'éducation nationale et le système de santé qui ne sont que des services pouvant avantageusement être confiés au secteur privé, d'une limitation du rôle de l'État aux seules fonctions régaliennes qui sont effectivement de son ressort et enfin d'une réforme du fonctionnariat qui est un archaïsme issu de la royauté qui fut combattue et mise à terre par les Jacobins. Faudra-t-il attendre un nouveau Danton, un Montesquieu ou un nouveau De Gaulle pour que ce mouvement de masse prenne forme et remette la France dans la bonne voie ?

Note. À la vue de cette analyse et nonobstant les origines des mouvements écologistes, je persiste et signe en accord avec moi-même que l'écologie n'est pas un mouvement issu de la droite radicale mais bien de mouvements hippies initialement marginaux et par a priori opposés à tout et son contraire. Il me semble que considérer les mouvements écologistes comme issus d'une certaine « droite » structurée est une erreur même si le Tea party a repris à son profit, cette fois dans un but idéologique avéré, l'ouvrage d'Eric Hoffer.

Billet librement inspiré d'un article paru dans Forbes, autre source Wikipedia (puisqu'il est de bon ton de citer ses sources).

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