Un approximatif ministre des Affaires étrangères

Quand la République islamique d'Iran se voit dotée à Paris d'un ambassadeur mis en titre temporairement par M. Séjourné, c'est que nos affaires vont mal.

 Séjourné convoque un approximatif ambassadeur d'Iran, qui serait en somme un mollah inexistant. Les journaux eux, largement, volent comme un tapis de mauvais conte, au secours de notre ministre empêtré dans son jargon et qui fait face à un gros avatar ! Ces journaux étranges et ces rubricards pressés en livrées de fausses bonnes nouvelles, ces domestiques du pouvoir, décidément étroits, ceux qui, pour ménager M. Séjourné et ses maladresses successives, se donnent la bonne mine de faire la leçon à de justes contradicteurs, en défendant ce ministre à flots d'encre imprécis quant à son révélateur propos manqué au sujet "l'Ambassadeur d'Iran en France", décidément, qu'ils visent mal, manquant leur cible et qu'ils soutiennent en médiocres tirailleurs de la bafouille communicative et servile le bafouillage peu adroit (ne soyons pas dans l'ordre de la cruauté, ce qui serait inutile à son propos) et trop pressé du ministre. Ah, oui, qu'ils le soutiennent avec un sens aigu du ratage, comme de manière courte, niaise et si peu ajustée.

Ce n'est pas une raison suffisante en apparence d'avoir vu en France se faire torpiller le corps diplomatique (et l'échelon précisément des Ambassadeurs de France), certes, être rayé, voire décapité par un trait de plume et le temps d'un décret presque vacancier de M. Macron, au moment où ce corps prestigieux était pourtant nettement nécessaire, quitte à y limoger ou à le réformer, sans détruire intégralement ni faire tabula rasa. Il faut encore que les zélés courtisans justifient la bévue ministérielle de M. Séjourné en faisant mine de confondre exactement quant aux caciques iraniens - certes inquiétants diplomates et de longue date - un ambassadeur en titre et accrédité avec un chargé d'affaires, soit avec cet intérimaire, cet intermittent enturbanné, en l'occurrence, d'un bien mauvais et triste spectacle du monde. Le mot juste n'est pas la reconnaissance en ce personnage d'Iran d'un ambassadeur en plein, mais c'est bien celui qui précise les limites d'un responsable diplomatique de remplacement, d'un jeton de présence monté sur pattes, lequel n'est que de fait à Paris et n'est là qu'en y assurant l'intérim au seul défaut voulu par l'Iran de la présence effective d'un ambassadeur officiel et nettement défini, ou d'un chef de mission diplomatique.

Séjourné n'est pas précis, et il est honnête de le lui faire remarquer quoi ? Un rien, ou presque rien ? ce fait tout simple et tout tranquille ; et il devient bancal de le réfuter ce cas d'imprécision. M. Séjourné devrait se cantonner lui aussi exactement et modestement dans une charge et dans un service moins parlant, se faire ministre muet pour un temps, pas seulement envers les responsables russes, mais au bénéfice ministériel des Français (ministre est un mot curieux, tout tenu dans ce service, un service bien mené et gardé sinon borné, et finalement étant le cas, le principe, ce qui devrait fixer la définition même du rôle et du devoir d'un ministre envers son peuple, un peuple à défendre comme à représenter). Par ailleurs, ou bien il est adepte de l'imprécision historique, géographique, géopolitique ou dans le seul ordre du vocabulaire (dans un rôle certes difficile mais dans lequel les mots ont un sens), mais d'une imprécision pas même rêveuse, ou bien ceux qui mettent à jour ses fiches ne connaissent pas assez fortement et clairement leur métier. C'est à se demander s'ils sont aussi doués et inspirés envers l'Iran que la muette Sandrine Rousseau face aux révoltes juvéniles et notamment féminines qui s'y passaient et s'y passent encore… ? Quant au bricolage de fiches, M. Séjourné pourrait consulter M. Macron, lequel en fit paraît-il au bénéfice de feu Paul Ricoeur…

C'est bien tout cela que devraient méditer quelques-uns des défenseurs abusifs, ceux qui montent un peu trop aux entrefilets pour sauver le diplomate relatif qu'est M. Séjourné, et qui l'embarquent dans leur coulage imprévu par eux mais, hélas, visible, sinon risible. On ne rit pas, assurément pas, quand la situation mondiale est si lourde et si grave. Mais la bévue de M. Séjourné est elle aussi, sans en rire, trop pleine, voire outrée de lourdes conséquences possibles. Tragiques surtout, pour les Français d'abord ! Bien des formes et formules actuelles et fêtées ou recommandées de nos amateurismes étatiques me fatiguent. Et m'agacent. Même ou surtout, ces formules creuses quand elles concernent des "ambassadeurs" à titre temporaire et au maigre titre de séjour. Quand la République islamique d'Iran se voit dotée à Paris d'un ambassadeur mis en titre temporairement par M. Séjourné, c'est que nos affaires vont très mal, à la fois mal suivies et mal servies.