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Voteront-ils ?

Voteront-ils ?

Par  

Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Siège à
ma droite. Je ferai de tes ennemis un
marche-pied à ton trône.

Psaume 109

                La question se pose donc à nouveau : voterons-nous ? Sondage après sondage, l'idée semble s'imposer que nous voulons quelqu'un parce que nous voulons quelque chose. Nous voulons Marine Le Pen ou Emmanuel Macron, Eric Zemmour ou Jean-Luc Mélenchon parce que nous voulons plus de pouvoir d'achat ou plus de sécurité, plus de fonctionnaires ou plus d'ordinateurs et de téléphones portables, plus d'Etat ou plus d'Europe, plus de croissance ou plus d'environnement, plus d'Ukraine ou plus de Russie, plus d'égalité transgenrée ou plus de diversité autogenrée, et plus de centrales nucléaires ou plus d'éoliennes (avec moins de chauves-souris), voire plus de tout en même temps ou encore plus de tout sans rien du tout avec. Ce qui est exclu, c'est que nous ne voulions ni Macron, ni Le Pen, ni Zemmour, ni Mélenchon, et surtout ni Zelinski ni Poutine, et encore moins Biden et l'autre cloche de la commission européenne, sans parler des autres. Et pourtant, si l'on nous demandait notre avis, il se peut fort bien qu'on en arriverait à ce résultat étrange que nous préférons très nettement ne plus rien vouloir du tout pour l'unique profit de ne plus voir sans arrêt ces têtes de tarés ou de minables qui, parce qu'ils sont parvenus à se mettre à la tête d'un appareil de pouvoir, croient pouvoir aussi s'assurer que nous adhérons de tout notre cœur à ce qu'ils nous imposent.

 

                Car ce sont bien d'abord leurs têtes, et leurs voix, leurs attitudes, leurs manières, leur sans-gêne exaspérant, que nous ne pouvons plus supporter, et de les voir s'exprimer à tout instant sur tous les sujets, en s'imitant les uns les autres comme des singes ou, aussi bien, en se montrant du doigt les uns les autres, comme de ridicules petits pions de jeux vidéos, répétant formules et slogans, dénonciations ou anathèmes, professions de foi dérisoires, incantations débiles, reniements masqués, à propos de tout et de n'importe quoi, au milieu des cancans et des sourires convenus, des hochements de tête et des grimaces des bandes de journalistes incultes et grassouillets qui les entourent. Ecœurant spectacle, assurément, et désolant concert de platitudes répétées en boucle, au rythme d'une actualité qu'on dirait programmée pour permettre à toutes les nullités de se faire valoir sur le dos de la misère du monde. L'Assemblée Nationale ne vient-elle pas, tout juste après avoir cautionné deux ans de dictature sanitaire succédant à l'écrasement du mouvement des Gilets Jaunes, de se refaire une virginité démocratique en ovationnant l'espèce de pitre qui, après avoir offert son propre pays aux attouchements dégoûtants de la famille Biden, se présente maintenant sous des allures de héros de la Résistance, alors qu'il ne songe sans doute qu'à sauver sa peau, au détriment de populations entières que sa politique de trafiquant d'esclaves a stupidement exposées au démon impérialiste de la Russie ? Mais qu'admirent-ils en lui, en réalité ? Rien d'autre que son génie de la « communication », comme nos éternels Informés ont la candeur de l'avouer, émerveillés de voir cet acteur de séries américaines ukrainisées exploiter à fond les images (plus ou moins truquées) de la guerre pour faire vibrer les entrailles gavées des oies de la Représentation nationale et supranationale mondialisée.

 

                La question qui se pose, décidément, est de savoir si nous voterons, et non de savoir pour qui nous voterons. L'heure est trop grave, comme le prouve le geste important que notre pape, se détournant pour une fois (et peut-être, on l'espère, pour toujours) du consensus numérisé des Nations, a fait faire à l'Eglise, en consacrant solennellement « au Cœur Immaculé de Marie », avec « l'Eglise et l'humanité tout entière », en même temps « la Russie et l'Ukraine », en considération de la gravité d'une situation où il est clair que c'est nous tous ensemble qui « avons perdu le chemin de la paix, […] oublié la leçon des tragédies du siècle passé […], enfreint les engagements pris en tant que Communauté des Nations, […] sommes tombés malades d'avidité, nous sommes enfermés dans des intérêts nationalistes, nous sommes laissés dessécher par l'indifférence et paralyser par l'égoïsme », au point d'en arriver, dans l'ignorance de Dieu, à « vivre avec nos faussetés, nourrir l'agressivité, supprimer des vies et accumuler des armes, en oubliant que nous sommes les gardiens de notre prochain et de la maison commune ».

 

                Prions donc, mais ne votons pas. Ne votons surtout pas pour investir quelqu'un, quel qu'il soit, du pouvoir fantasmatique que pourrait conférer, avec la volonté nationale, une capacité nucléaire dont les effets sont sans commune mesure avec ce que pourrait vouloir ou ne pas vouloir qui que ce soit. Les événements qui, depuis l'épisode dramatique des Gilets Jaunes, se sont déroulés ont trop clairement montré qu'il ne faut plus attendre d'aucun pouvoir politique qu'il fasse autre chose que mettre en œuvre des actions qui échappent totalement à la volonté des peuples, des actions littéralement « programmées » en vue de changer la réalité, afin qu'elle ne corresponde plus à ce que, dans nos existences concrètes, nous ne pouvons cesser de considérer comme la réalité, afin de nous obliger à prendre pour unique réalité ce qui n'est, en vérité, que le produit d'une opération – de management, de propagande, de falsification des choses et des mots, peu importe, cela même qu'Ellul avait en vue quand il définissait « l'art politique complet » comme l'art de choisir toujours de préférence l'action « de telle façon qu'elle puisse être un tremplin  de propagande valable quelle que soit sa conclusion réelle : qu'elle aboutisse à un succès ou à un échec de fait »[1]. L'exemple parfait de ce type d'action nous a été donné par la politique sanitaire, au niveau national et mondial, dont il est désormais impossible de savoir à quoi elle a servi exactement d'un point de vue strictement sanitaire, mais dont nous savons qu'elle servira désormais de modèle à toutes les politiques possibles et imaginables, quelles que soient les personnalités au pouvoir, en Démocratie ou en Dictature.

 

                Face à cela, nous devons apprendre à résister autrement, autrement qu'en rêvant d'un changement de gouvernement, comme nous y incite la seule députée digne de ce nom, Martine Wonner. Et si, en tant que Chrétiens, nous voulons agir politiquement, souvenons-nous que le Christ fut d'abord quelqu'un qui refusa la tentation du pouvoir, comme le dit l'Evangile de Matthieu :

« L’ayant transporté sur une montagne élevée, [Satan] lui montra tous les royaumes du monde et leur gloire, et lui dit : je te donnerai toutes ces choses si tu te prosternes et m’adores. Jésus lui dit : Retire- toi Satan ! Car il est écrit : Tu adoreras le Seigneur, ton Dieu, et tu le serviras lui seul. »

Dans Luc, le Tentateur précise : « Je te donnerai toute cette puissance et la gloire de ces royaumes ; car elle m’a été donnée et je la donne à qui je veux. »

 

                Dont acte, très saint Père, et permettez-nous en conséquence de ne pas considérer Internet comme « un don de Dieu », pas plus que l'industrie nucléaire et ses déchets, ou que l'industrie pharmaceutique et ses prodiges.

[1]. L'Illusion politique, Robert Laffont, 1965, p. 181.


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