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Ceux qui voudraient fuir : Marion

Ceux qui voudraient fuir : Marion

Par  

Ce qui aurait pu lui permettre de renoncer à la drogue, c’était une chose autour de laquelle reconstruire sa vie. Comme un point au­tour duquel nouer tous les fils perdus de ses souvenirs, les plus beaux comme les plus cinglants. Marion n’avait pas ce point fixe et donc elle flottait étrangement à la surface du monde, sans but précis, sans chemin discernable. Tout meurt de ne pas avoir été poursuivi. Elle le savait, mais ça ne l’empêchait pas de passer d’une chose à une autre sans jamais songer à rassembler, même symboliquement, toutes les forces diffuses de l’existence humaine.
Marion regardait parfois le ciel, et ce qu’elle voyait du ciel ressemblait à sa vie : ces linéaments incertains qui s’effilochaient dans l’espace, c’étaient autant de moments qui s’accumulaient sans que rien ne vienne leur donner une forme véritable. Ces nuages qui filaient vers on ne sait où en se déchirant, c’était une écriture qui se noyait dans le blanc après l’avoir parcouru pen­dant quelques lignes. Des mots qui devaient dire une aspiration, un désir profond, toutes sortes de sentiments qui avaient besoin d’être clairement identifiés pour être autre chose que des mirages, pour s’incarner à travers quelque chose de sensoriel, de physique, pour lever l’inhibition qui la glaçait depuis des années. Il lui fallait vivre, tout simplement. Mais elle en était incapable.
Tout ce qui chez Marion demandait une incarnation restait sans écho, les traits de son caractère fuyaient, les possibles perspectives qui s’offraient à elle s’éloignaient à vitesse grand V. Rien n’était fixé. Elle était sans visage. Et plus elle courait vers une sorte d’impersonnalité, moins elle se sentait exister.
Extrait de Ceux qui voudraient fuir (Ed Nouvelle Marge)

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