L’écriture, pour moi, est un parcours.
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L’écriture, pour moi, est un parcours.
Rétrospectivement, l’écriture fut pour moi un parcours spirituel, partant au départ sur la question de l’absence d'art : les premiers articles étaient plus d'humeur, introspectifs et d'analyse de ressentis. Puis, le propos s'est systématisé. Puis, pour sortir de cette laideur, je me suis mis à la philosophie en autodidacte. Avec les matériaux accumulés, j'ai tenté une théorie de l'art. Ce qui est bien quand on est autodidacte et édité seulement sur internet avec un éditeur à la fois exigeant, fin et bienveillant, c'est qu'on ose tout ; j'ose espérer que ce n’est pas à la façon de Audiard. Puis, de l'art du point de vue fondamental, je suis passé à la théologie, le passage se faisant par le constat que l'expérience du beau est trinitaire (vrai, bon, harmonieux). Car nous avons en quelque sorte trois cerveaux : un rationnel (le vrai), un émotionnel (le bon) et un dédié, c'est moins connu, à la reconnaissance des formes (l'harmonie ou les sens). C'est aussi la conclusion de mon expérience d’aide en psychiatrie (aide au long cours pour la stabilisation d’une personne bipolaire). La conclusion personnelle est que le discernement est un composé harmonieux et bien orchestré du vrai (raison), du bon (intelligence émotionnelle) et de la sensibilité (au sens de l’appareil de mesure).
Donc, j'ai étudié, aussi introspectivement, du point de vue de l'individu, l'art en tant que besoin sur le plan du collectif, il est mis en lumière par la négation. C’est faire d’un mal un bien, selon le principe de Andreu : « Comme une zone cérébrale blessée révèle sa fonction par son absence, l’art contemporain pose de fait la nécessité de définir l'art du point de vue anthropologique ».
Enfin, en identifiant à grands traits les idées de Platon et les quatre causes d’Aristote dans les phénomènes de perception et de modélisation (le vrai est matière et forme, le bon moteur invincible, l'harmonie finale), on peut conclure que tout est régi par le principe trinitaire du vrai, du bon et de l’harmonieux.
Pour finir, vient la poésie, qui est la formulation maximale pour transmettre ses intuitions. La poésie vient ensuite comme un trop-plein et une synthèse en général au bout de dix ans (les Américains disent qu'il faut 10 ans pour être expert). Au fond, la poésie est proche de la peinture dans le sens où tous les mots interagissent tout comme les différentes parties d’un tableau, sans s’égrener sur le fil linéaire de la narration. Pour partager une intuition, c’est le moyen le plus efficace et rapide à mon sens. Ci-dessous, mon poème le plus abouti et qui résume bien tout ce parcours :
Présence visible en tout étant de l'être invisible transcendantal.
De l'Être, par trois modes du sens indivisible, vois là l'arôme ancestral.
La beauté n'est pas un concept, c'est sa beauté de roi.
Le beau symbole, objet du sensible, est sujet en soi.
Dans le silence de l’ego déconcerté, le beau fait sens
Un regard trinitaire discerne fond et forme, donne la voie.
Vrai, bon, harmonieux, le beau découle de l'être par trois voies.
Les sens, le cœur et l'idée sont en cohérence, le beau se fait conscience.
Le vrai est matière et forme, le bon moteur invincible, l'harmonie finale.
Animée ou inanimée, en acte ou en puissance.
Volonté et verbe mariés ensemble dans le sensible engendrent conscience.
La matière est le verbe du divin vivant,
verbe et conscience convertibles,
fondus au cœur du sensible,
de "celui qui est", immanence et transcendance.
La question de la littérature.
La question de la littérature ne se pose plus, selon moi, a priori en termes de postérité, de célébrité, tant la production de livres est pléthorique dans un temps où l’image supplante la lecture. S'ajoute la question du marketing qui fait la notoriété et fausse le jeu de la sélection des talents. Reste cependant ouverte la question du talent. Elle se pose avec acuité au regard de l’IA, il s’agira de faire preuve de profondeur, de puissance poétique et de pertinence dans le contexte actuel pour s’en différencier. Tous les maîtres ont dit des choses universelles dans les termes et le contexte de leur temps. Dans ce capharnaüm, l’écrivain jette au départ une bouteille à la mer, rien de plus. L’important est de dire ce qu’on pense utile de dire et d’en être le premier satisfait ainsi que quelques amis. Rodin en parle dans son livre Art : si on innove un tant soit peu, on est mal reçu au-delà d’un cercle d’amateurs convaincus qui se chargeront de la médiatisation (au sens strict) de l’artiste. En conclusion, pour moi, il faut vraiment écrire pour soi d’abord tout en étant le plus clair possible, tout en visant et espérant un éventuel public. Il ne s’agit pas non plus d’être le seul à pouvoir se lire. Tout cela est particulièrement vrai en France, il faut quitter le pays pour réussir, c’est bien connu, on pense à la pensée originale de René Girard, parti aux États-Unis. Quoi que l’on fasse, on est ignoré, me semble-t-il. Les gens semblent distants, indifférents et, sur le plan général, c’est la grande force des dépressifs que de n'avoir besoin de rien.



