Prière permanente

D'églises et de chapelles mon cœur est tout peuplé ;
Qu'on ne me dise jamais que leurs pierres sont éteintes,
Que la mort les possède, qu'elles sont creuses et sans force
Quand je sais qu'un lieu vide n'est jamais déconstruit
 – Mais que l'arbre est vivant au-delà de la Croix  :
Quand la Foi se bâtit par fragments de patience – ,
Quand le Temps nous dépasse jusqu'au plein Ciel sacré ;

Quand les pierres n'offriraient qu'un angle du saint regard
De Dieu, elles seraient immuables, les témoins drus
Et les jalons constants de la Grâce pour les Hommes.

Une église ne meurt pas, pas plus que la Parole,
Et si l'être est trop vil pour respecter la Pierre,
Il ne saurait jamais la réduire tout à fait,
Même noircie de fumée, même effacée par l'herbe
Haute et fétide de nos Enfers modernes, toujours
Elle vit, songe et palpite pour renaître au soleil !

Qu'importe si celui-ci se voile très longuement
Pour égarer les cœurs dans une lente Dormition,
Ce sommeil peu sensible, d'inhumaine facture
N'est pas de fougue égale face au charme nu des pierres
Et s'il est terne et tenace, il ne vaut pas prières
Ni ce souffle calme des Hommes qui dicte l'Eternité
Dans la musique de l'air, par l'élan des nuages :
La charité bleuie de la lumière des jours.