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La meilleure part du temps

La meilleure part du temps

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Qu’est-ce que le temps ? Qu’est-ce que ce moment avec début et fin dans lequel nous vivons tant bien que mal ? Voilà une question philosophique qui est éminemment métaphysique car elle est au cœur de la condition humaine et pose la question du salut de l’humanité. Guillaume Sire nous livre un essai sur cette question, tout en fuyant la forme académique de l’essai et c’est heureux. Voici un livre dépouillé de toute dialectique, il n’est pas chargé de nous convaincre mais de nous dire… Aux arguments pétris de jeux de mots, d’inversion de définitions anciennes et d’invention de concepts nouveaux, Guillaume Sire préfère nous parler avec force et conviction. Il parle avec autorité. Son essai prend donc des allures de sermon et c’est reposant, car notre raison n’a pas à combattre, mais tout notre être simplement à recevoir.

Avant de nous enseigner, l’auteur passe aux aveux. Il avoue avoir joui en bourgeois, très fier d’avoir tout compris du monde et de sa destinée après avoir lu Nietzsche tout jeune. « Je me croyais intelligent », confie-t-il. Et puis, et puis, se croire intelligent et jouir ne suffit pas à tout résoudre, il est revenu dans l’aventure intellectuelle et spirituelle de plein fouet. Qu’est-ce que le temps donc ? Guillaume Sire nous replonge dans la Genèse. Le temps est conséquence directe de la chute, vous serez comme des dieux qu’il a dit le serpent… et Guillaume Sire synthétise ainsi : « le temps procède donc de cette division polythéiste. » Le temps est donc intimement lié au mal. « Si Adam et Eve savent désormais ce qui est bien et ce qui est mal, c’est parce qu’ils ont inventé le mal, et si le temps existe désormais, c’est pour empêcher que le mal existe de toute éternité. » Et Guillaume Sire s’amuse de voir le premier couple se justifier devant leur créateur, chercher des circonstances indulgentes, de vrais coupables hors de lui, … Plutôt que d’accepter être le réceptacle de l’amour divin. « Son premier réflexe à présent qu’il n’est plus innocent, est de clamer son innocence. »

Le temps, sa compréhension, apparait comme une clé de lecture qui permet d’envoyer valdinguer intelligence artificiel, transhumanisme, science de l’organisation… Nous voyons se dessiner doucement un programme politique pour le salut de l’humanité. « L’humanité est passé d’une conception qualitative du temps, à une conception quantitative. » C’est vrai que nous vivons dans l’ère de l’organisation, de la division du temps, du travail, de la valorisation de tout. Mais Guillaume Sire enfonce le clou : « Le temps n’est pas une quantité. » C’est tout simplement ce qui nous sépare de la toute éternité, le chemin retour. Rassurons-nous, nous avons quelques possibilités de saisir des épiphanies de l’éternité grâce à l’art notamment. « Il y a donc ici, dans le temps, une part d’éternité » Mais ne perdons pas de vue que le vrai génie prend son temps.

Guillaume Sire se pose la question : « Comment poser la question du Bien et du Mal, en faisant l’économie du corps, c’est-à-dire du temps ? » Marqué par l’apostolat de Benoit XVI qui fut réconciliation de la raison et de la foi après celui de Jean-Paul II qui fut réconciliation du corps et de l’âme, l’auteur prescrit : « il faut réarmer la raison en lui redonnant un corps. Il faut ré-équiper le corps en lui rendant raison. »

Plus on avance dans la lecture de l’essai plus les articles se font courts. C’est que la vérité, encore une fois, se passe d’argumentaires, elle s’énonce. L’auteur est submergé par elle, et semble cheminer vers l’aphorisme, cette poésie de la pensée. Il est vrai que « le poète est présence. Le poème est parfait, mythique. » Nous avions l’intégrale et l’abrégé et voici maintenant une sorte de résumé sous forme d’aphorismes du catéchisme de l’Eglise catholique. Il n’y a donc rien de nouveau dans La meilleure part du temps, et pourtant il est essentiel qu’à chaque génération des écrivains se lèvent et reformulent la vérité de toute éternité. Guillaume sire rejoint donc ainsi Fabrice Hadjadj ou bien l’excellent Henri Quantin.

‌Publié une première fois dans le Bien Commun
http://lebiencommun.net/kiosque/


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